Je vous propose une rétrospective portant sur les origines de la monnaie, basée sur les propos de Jean Rémy et de Valérie Bugault (co-auteur du livre : Le nouvel esprit des lois et de la monnaie). J’apporte d’autres sources sur des faits historiques, notamment la création d’institution international afin de mettre en évidence leurs relations. (Dans la partie 5/6)
Il faut revenir à Venise entre 1280 et 1350. Sans rentrer vraiment dans les détails, Venise s’est enrichie autour du trafic des métaux précieux. Elle a organisé un commerce en démonétisant les pièces d’or européennes pour les couler en lingot. Elle s’est constituée un stock d’or suffisant pour spéculer et provoquer la chute de toutes les banques florentines en 1345.
Ce fut la première grande crise bancaire.
C’est à partir de cette date que la monnaie a perdu son rôle institutionnel, c’est-à-dire que la monnaie était un outil d’unité de mesure, or, on ne spécule pas sur une unité de mesure (comme l’est le mètre étalon). Il permettait de fluidifier l’échange des biens et des services tout en garantissant leurs valeurs. Aujourd’hui, les économistes considèrent la monnaie comme un moyen d’échange, une valeur, une réserve* (sur laquelle on peut spéculer).
La monnaie devient marchandise ; le fait économique a pu dès lors prendre le pas sur le fait politique et ce phénomène n’a fait que s’amplifier.
Il faut attendre 1694 pour voir apparaitre la première banque centrale privée en Angleterre créée par les orfèvres (à la fois banquiers et commerçants), qui ont contrôlé les masses monétaires en circulation en dépit du pouvoir royal. La domination par leur pouvoirs économiques a permis d’imposer leur vision du droit basé sur le fait économique, communément appelé le droit Anglais (que l’on peut qualifier de “loi du plus fort”). Il est important de souligner que la mise en place de cette banque centrale a été présentée comme appartenant à l’état auprès du peuple avec l’approbation du royaume. La méconnaissance du système monétaire par le peuple a notamment favorisé la mise en place de cette imposture.
Au début des années 1700, un petit génie du système financier écossais prénommé John Law, fils d’orfèvre, invente la méthode moderne de tricherie de la monnaie. En 1716, il propose son système au régent français Philipe d’Orléans. Compte tenu de l’état des finances de la France surendettée par les guerres et la construction de Versailles, ce dernier accepte la proposition de John Law. Il crée sa banque Générale par « édit royal » ; un capital très modeste est alors versé pour l’ouverture, mais la signature du régent donne confiance. Les gens viennent déposer leur or en échange de billets avec la garantie inverse. John Law, par cet artifice, crée l’une des premières monnaies fiduciaires basée sur la confiance. La diffusion de billets fut largement répandue à tel point qu’elle est décrétée monnaie d’état. Ensuite, il s’attaque à la dette française en rachetant la compagnie d’occident (compagnie du Mississippi) ; il en vante ses richesses et mérites. Il procède à une levée de fond, et la compagnie d’occident émet des actions de 500 livres. Par cette opération, il crée un tour de passe-passe de génie. En effet, pour acquérir ces actions, il suffit d’apporter à la banque devenue royale, de la dette d’état (dépréciée) des bons du trésor ne valant plus qu’un tiers de leur valeur initiale pour les échanger contre des actions de cette compagnie soi-disant fleurissante.
Finalement, John Law réussit deux coups de maître : le premier en remplaçant les pièces de monnaie or/argent par la monnaie papier basée sur la confiance et garantie par l’état. Le second, en réduisant la dette à court terme de l’état, que l’on appelle aujourd’hui le quantitativising, ou plus simplement, le fait de retirer de la dette d’état en échange d’actions très prometteuses. Deux ans plus tard, il rachète les compagnies des Indes orientales et de Chine qui sont criblées de dettes, il les fusionne et reproduit le même schéma de levée de fonds et vente d’actions de la compagnie d’Occident. Il répète l’opération à plusieurs reprises. C’est un énorme succès : de 500 livres, les actions flambent pour atteindre au plus haut 10 000 livres. Pendant cette période, John Law, par l’intermédiaire de la compagnie d’Occident, commence à prêter avec intérêt à l’état français au taux de 3% en tant que gouverneur de la banque générale (centrale). Fort de ce succès, le régent le nomme ministre des finances.
Cette période faste s’arrête en 1720 quand il est découvert que la compagnie du Mississipi n’est pas si prometteuse (je vous passe les détails). Les gens commencent alors à vendre leurs actions, le gouverneur imprime davantage de billet pour maintenir les cours mais le pot-aux-roses fut découvert et plus personne ne voulut de monnaie papier. Les gens ont souhaité récupérer leur or, mais les coffres étaient vides. L’or des épargnants a servi à payer en partie la dette de la France provoquée par Louis XIV. Des milliers d’épargnants furent ruinés.