« FN Story »
A la base, prenez un type normal.
Enfermez-le, pendant une vingtaine d’années, dans un « loft » hexagonal, avec une masse de congénères.
Arrangez-vous pour que, pendant cette période, simultanément ou successivement, il soit, ou se sente :
- jeté, comme un rebut, par une grande multinationale,
- balancé par-dessus bord, comme un sac de lest, pour que monte toujours plus haut le ballon des profits boursiers,
- humilié de quémander dans les services sociaux, en racontant cent fois son histoire, pour s’entendre dire à la fin qu’on ne peut rien pour lui,
- réduit à s’habiller en survêt, parce que y a pas moins cher, à se cacher pour aller aux Restos du cœur,
- désespéré, jusqu’à la nausée, d’être baladé de CES en jobs, de CDD en petits boulots, de stages « bidon » en ANPE, dans la « flexibilité », l’intermittence, la précarité, et avec pas mieux en vue pour ses gamins,
- écoeuré de savoir que J6M a gagné 2,3 millions d’euros, après impôt, en 2001, soit 6.400 euros net par jour, (mais il ne peut même plus faire les calculs…)
- révolté de savoir qu’un dirigeant licencié d’une chaîne à péage peut toucher une indemnité de plusieurs dizaines de millions d’euros (même remarque que ci-dessus), alors que lui-même a dû se battre comme un fou pour toucher une misère quand on l’a viré,
- surendetté à mort, au milieu d’un million d’autres comme lui, non pas forcément pour avoir acheté à tort et à travers, mais parce que ses revenus ont été brutalement divisés par 5 ou 10, alors qu’il payait sa maison, sa bagnole, ou les deux,
- persécuté par le fisc, qui ne fait jamais aucune remise de dette, allant jusqu’à saisir les indemnités de chômage (alors qu’il transige avec Lagerfeld, un exemple au hasard, en lui faisant des cadeaux de plusieurs millions : pas solvable, pôvre !)
- angoissé à l’idée de prendre un RER le soir, de se faire tuer parce qu’il veut défendre son gamin contre un racketteur, puisque la police ne s’en occupe pas,
- malade de voir brûler sa bagnole sur le parking d’en-bas, comme ça, pour rien, alors qu’il n’avait même pas les moyens de l’assurer autrement qu’au tiers,
- apeuré par les Twin Towers, les attentats, le « danger islamiste »
- bidonné par les sondages, les JT catastrophistes, les experts qui lui disent ce qu’il faut penser, les candidats qui promettent tout à tous, mais on ne voit jamais rien venir, sauf le contraire de ce qu’ils ont promis,
- décervelé par le Loft, les Millions de J.P. Foucault, etc. (vous n’aurez pas de mal à continuer la liste),
- affolé par l’argent facile, tout autour de lui, PMU, loto, trafics en tous genres, etc. (idem),
- surexcité de désirs de posséder par la pub, cette pute qui montre tout et ne donne rien,
- dégoûté d’avoir à choisir un pantin pour l’Elysée, alors que les vraies décisions se prennent en secret à Bruxelles, Seattle, Gênes ou Doha,
- révolté par l’injustice de la justice, tellement lente, précautionneuse et bénigne pour les puissants,
- etc. (vous n’aurez pas de mal… voir ci-dessus).
A la fin de l’expérience, sera-t-il devenu raciste, xénophobe, fasciste et nazi ? Pas automatiquement.
En revanche, si vous lui demandez ensuite de choisir entre 16 bulletins, soyez certain qu’il prendra celui qui sera susceptible de mettre le maximum de m... dans ce système, qui l’a traité pendant vingt ans comme de la m...
Évidemment, ça craint.
Mais ça peut se comprendre !