Un éditeur marocain porte plainte contre Zemmour pour contrefaçon
Trop, c’est trop : pour l’éditeur marocain Abdelkader Retnani, Éric Zemmour est pris en flagrant délit de… contrefaçon. En cause, l’utilisation du nom La croisée des chemins, site officiel où l’ouvrage du polémiste est en vente, qui s’avère être le nom de la maison d’édition fondée voilà 40 ans par Retnani. Or, et l’on s’en doute, les ouvrages de la maison basée à Casablanca sont à des années-lumière du dernier ouvrage du réactionnaire, La France n’a pas dit son dernier mot .
Souvenirs, souvenirs : privé d’éditeur, Éric Zemmour avait mis en route une fine entreprise. Modifier les statuts de sa propre société pour devenir éditeur-auteur, trouver un distributeur pour arroser tous les points de vente français, et s’assurer de pallier le désistement de dernière minute d’Albin Michel.
La société Rubempré ajoutait la corde de maison d’édition à son arc, et sortait donc La France n’a pas dit son dernier mot, diffusé et distribué par Inteforum. Depuis le 15 septembre, les ventes se montent à 187.571 exemplaires (données : Edistat), arrêtées au 10 octobre : probablement 200.000 au moment où nous publions cet article. Soit plus de 4,14 millions € (HT) de chiffre d’affaires : près de deux millions € pour le potentiel candidat donc.
Or pour centraliser ses communications et rendez-vous, meetings et autres interventions, Éric Zemmour montait La croisée des chemins, plateforme dédiée à son message et ses interventions. Et surtout, aux commandes du livre.
“Je ne partage pas les mêmes valeurs”
Depuis le 4 septembre, l’information avait largement circulé, et n’avait pas échappé au fondateur de la maison d’édition La croisée des chemins. Selon lui, le polémiste n’aurait, ni plus ni moins, fait que voler le nom de la structure éditoriale marocaine. Et la raison sociale se trouve ainsi détournée au profit des actualités zemmouriennes.
« Dès que j’ai vu ce site, j’ai directement contacté mon avocat à Paris. Je ne partage pas les mêmes valeurs ni les mêmes visions que ce journaliste. Je tiens à ce que mon nom ne lui soit pas associé », indiquait-il à L’Opinion. Son conseil, Me Hubert Seillan, s’est donc fendu d’un courrier pour demander que cesse l’exploitation d’une marque, susceptible d’entraîner un amalgame.
« Ses engagements philosophiques sur les thèmes de la liberté religieuse, d’une interprétation contextuelle des écritures, sur les libertés fondamentales et notamment pour les femmes, sur le vivre-ensemble et la tolérance sont si fortement opposés aux vôtres, qu’elle considère que votre choix correspond à une usurpation », poursuit l’avocat.
Mais problème : La croisée des chemins est une marque déposée au Maroc, pas en France. Il existe en revanche plusieurs entreprises qui ont le même nom sur le territoire français.
« L’ancienneté de la maison d’édition, la qualité de milliers d’ouvrages diffusés en Europe, en Afrique et dans la francophonie lui confèrent une notoriété suffisante pour que des confusions s’établissent dans l’esprit du public », note tout de même le courrier de l’avocat.
Marque et démarques
De quoi atteindre le statut nécessaire pour, malgré tout, entreprendre une procédure ? Difficilement : le directeur général de la structure éprouvera de grandes difficultés à démontrer que sa maison a la même notoriété que la plateforme de Zemmour, toute jeune. Ses ouvrages sont commercialisés via des accords de distribution, sur le territoire français, mais sans grand impact commercial.
Qu’importe, assure Abdelkader Retnani, si aucune réaction ne survient suite à son courrier, il entend bien plaider sa cause devant la justice française. « Ceci est une manifestation de colère contre une personne qui n’a aucune valeur, ni principe. J’entame ces procédures pour que les gens sachent, en France surtout, que la ligne éditoriale de la Croisée des chemins ne répond pas aux objectifs d’´Éric Zemmour. J’ai toujours prôné le vivre-ensemble et la tolérance contrairement à lui », poursuit-il.
Une plainte a été déposée début octobre devant la justice française, assure-t-il à L’Opinion. « La procédure est longue, mais on fait confiance à la Justice française pour éviter l’amalgame qu’il y a. C’est la première fois que je rencontre ce genre d’incidents. »
ActuaLitté n’est pas parvenu à joindre l’éditeur marocain pour l’instant. Nous avons en revanche pris attache auprès de l’avocat du polémiste et ajouterons ses commentaires le cas échéant.