DEPUS 10 ANS MARIAGE POUR TOUS, DEPUIS TOUJOURS VIOLENCES POUR TOU·TE·S
Cette année, qui est celle des 10 ans du « mariage pour tous », le gouvernement, les institutions, les médias, les personnalités politiques ont eu à cœur de surjouer la célébration de cet anniversaire en masquant la réalité de nos situations, de nos vies. Pire encore, notre combat pour ce droit fait l’objet d’un pinkwashing politique et médiatique méprisant qui vise à rendre invisible notre lutte pour le mariage pour tous-tes et nous en déposséder.
Nous n’oublions pas que depuis 10 ans, la parole haineuse contre les personnes LGBTQIA+ s’est libérée, décomplexée et s’installe durablement dans l’espace public, politique et médiatique. Nous n’oublions pas que la gauche aussi a joué un rôle dans cette normalisation et la banalisation de la violence en laissant les discours haineux se propager. Nous n’oublions pas qu’il y a 10 ans, de nombreux·ses personnalités politiques, des élu·e·s toujours membres du gouvernement actuel s’opposaient avec violence, haine et mépris, contre la revendication de nos droits et niaient nos existences, nos identités, nos vies. Nous n’oublions pas non plus que nous subissons depuis toujours des violences systémiques, mais que depuis plus de 10 ans le système assume et exprime sans complexe son discours raciste, transphobe, autoritaire et porte atteinte à nos droits.
Peut-on se réjouir de la fin d’une inégalité alors même que tant d’autres continuent de contraindre et d’entraver nos vies, de précariser, de stigmatiser, de tuer ?
En empruntant sans complexe les éléments de langage et le positionnement de l’extrême droite, alors même qu’il se positionnait comme un barrage, le gouvernement tend à pousser les populations les plus exposées aux discriminations, aux violences, au VIH/sida vers une surenchère de haine, de rejet et d’inhumanité : pouvons nous prétendre vivre en sécurité et être accepté·e·s en France aujourd’hui ?
DEPUIS 40 ANS, DES POUVOIRS PUBLICS PAS A LA HAUTEUR DE LA LUTTE CONTRE LE VIH-Sida
Quarante ans après la découverte du VIH en 1983, les discriminations envers les PVVIH (personnes vivant avec le VIH) sont toujours présentes et entravent l'accès aux droits sociaux et de santé et contribuent à l'exclusion sociale. Elles sont multiples, exercées par l’État, l'administration, et la société dans son ensemble et elles poussent les personnes vers une marginalisation sociale.
Nous avons constaté une recrudescence importante de la sérophobie durant les débuts de l’épidémie de covid qui nous a renvoyé aux stigmates sociaux, rappelant cruellement les situations vécues dans les années 80. Pourtant les discriminations en raison de l’état de santé sont répréhensibles par la loi, mais nous devons prouver que l’on est victime de sérophobie ce qui est inacceptable.
Le virage ultra sécuritaire, xénophobe raciste de notre Etat amorcé sous Sarkozy fait que depuis plus de 10 ans, les personnes migrantes et/ou malades dont les PVVIH, sont perçues comme dangereux·ses pour la sécurité de l’Etat ou des profiteur·se·s qui viennent se soigner “gratuitement”. Notre société se déshumanise et le sens de l’altérité se perd, comme la recrudescence des refus de PMA par des médecins qui exigent un titre de séjour, alors que rien dans les textes n’impose cette condition.
Nous nous sommes battu·e·s dès le début de l’épidémie pour permettre aux personnes séropositives étrangères de ne pas être expulsées et il faut réagir face à un risque réel de la supprimer de l’arrêté du 5 janvier 2017 qui interdit l’expulsion les PVVIH.
L’Etat est censé protéger les personnes les plus vulnérables, mais il se protège d’elles au nom de la politique d’austérité et de réduction de dépenses publiques en les laissant mourir. Et le ministère de l’intérieur a pris le contrôle sur l’ensemble des politiques sociales et de santé publique dans ce pays. 40 ans de sida, 40 millions de mort·e·s, 40 ans de discriminations, de sérophobie assassine, de violences envers les PVVIH et nos communautés.
LES EXILE•ES LGBTQIA+ VICTIMES DU RACISME D’ETAT ET D’UNE XENOPHOBIE DEJA AU POUVOIR
Par ailleurs, depuis plusieurs mois, le gouvernement prépare une nouvelle loi " asile et immigration" raciste et xénophobe, durcissant la loi Collomb de 2018 qui marquait déjà des régressions importantes. En l’absence de majorité, le gouvernement, dont Gérald Darmanin au premier chef, se dit prêt à discuter des propositions de la droite (et de l’extrême-droite de fait) qui remettent en cause les droits fondamentaux des personnes étrangères et des personnes LGBTQIA+ :
- Droit d’asile : possibilité d’expulser les personnes LGBTQIA+ en danger dans leur pays sans attendre la décision définitive des instances de l’asile, voire remise en cause des engagements internationaux de la France qui fondent le droit d’asile,
- Droit à une vie privée et familiale : remise en question du titre de séjour pour soin, qui permet d’éviter les expulsions de personnes vivant avec le VIH vers des pays où les traitements ne sont pas accessibles,
- Droit à la santé : réduction des soins accessibles gratuitement aux personnes sans titre de séjour par la remise en cause de l’aide médicale d’Etat (AME), refus d’accès aux traitements pour les personnes
En s’en prenant aux droits des personnes étrangères, le gouvernement s’en prend aux droits des personnes LGBTQIA+ qui ont choisi ou ont été contraintes de venir en France pour échapper aux persécutions dans leur pays, à la pénurie de médicaments et au manque d’offre de soins ou à la précarité économique.
LES TRAVAILLEURS ET TRAVAILLEUSES DU SEXE VICTIMES DE LA CRIMINALISATION
Si aujourd’hui, être LGBTQIA+ n’est plus puni par la loi, les travailleur·se·s du sexe (TDS) sont toujours ciblé.e.s par la police et cela permet aux villes et à l’Etat une repénalisation des personnes LGBTQIA+ dans l’espace public.
Combien d’obligations de quitter le territoire français ont été délivrées à des personnes transgenres travailleuses du sexe et séropositives depuis que Macron est au pouvoir ? Les poussant ainsi à travailler dans une plus grande clandestinité et les écartant des parcours de soin et les exposants au VIH/sida.
Les perspectives législatives sont effrayantes en matière de durcissement des politiques migratoires et des politiques de flicage et de répression lors des événements sportifs, tels que la Coupe du monde de Rugby et les Jeux Olympiques. L’agenda de Darmanin représente un risque énorme pour les personnes LGBTQIA+ qui exercent le travail sexuel.
L’abolitionnisme du travail sexuel est un prohibitionnisme. Les lois sur le proxénétisme criminalisent l’entraide et l’accès au logement pour les TDS, la loi de pénalisation des client.e.s précarise les TDS et favorise les violences, les arrêtés municipaux et préfectoraux induisent des contrôles ciblés, des PV et des mises en fourrière de camionnettes. A quand la décriminalisation du travail sexuel et enfin l’entrée des TDS dans le droit commun ?
LES PERSONNES TRANS SACRIFIEES POUR DONNER DES GAGES AUX MOUVEMENTS DE HAINE
Le gouvernement se dit l’allié des personnes trans, mais sans réelle avancée de sa part depuis six ans, le constat est sans appel : la transphobie continue d’être systémique, elle s’est totalement “dédiabolisée” et elle tue toujours, dans l’indifférence et la complicité de l’Etat.
Depuis 2016, avec la loi incomplète sur le changement d’état-civil, qui nous refuse encore notre autodétermination et contraint les parcours de transition, rien n’a été fait par les gouvernements successifs pour améliorer la vie et la reconnaissance des personnes trans.
Au contraire, on constate une adhésion par nombre de responsables politiques et de la société en général aux discours de transphobes qui remettent en cause nos existences, nous stigmatisent et légitimisent les violences.
LA PANIQUE MORALE S’EMPARE DU POUVOIR AUTOUR DE L’EXORCISME “ANTI-WOKE”
A l’instar du mouvement social, des mouvements anti racistes, anti fascistes ou écologistes, et bien d’autres, certains médias ont à cœur de décrire les communautés LGBTQIA+ comme un lobby, un danger civilisationnel et une idéologie qu’il faudrait combattre. Cette parole caractéristique de la fascisation du système, reprise par une partie de la classe politique, n’est absolument pas remise en cause par les institutions, pourtant garantes de l’égalité et de la justice.
Bien au contraire, elles leur donnent raison lorsqu’elles sont entrées ouvertement en croisade contre le « wokisme » et les « ennemis de l’intérieur » et veulent faire taire toutes paroles dissonantes et critiques.
Les violences de l’extrême droite, comme en témoignent les attaques des centres LGBTQIA+ sur tout le territoire, sont minimisées et restent trop souvent impunies, tout comme les violences policières ciblées contre des lieux et des personnes LGBTQIA+ qui ressurgissent et se multiplient. Les violences systémiques, elles, sont protégées par un gouvernement qui refuse toutes évolutions législatives qui feraient reculer les discriminations.
Parce que nos luttes sont intersectionnelles elles dérangent et attisent la haine et la répression d’un gouvernement aux abois, qui montre son vrai visage en se vantant d’être plus “vitaminé” que le R-haine.
Parce que nous n’acceptons pas cette situation, parce que nous refusons que nos droits, nos vies continuent d’être piétinées et méprisées, parce que nous combattrons toujours le racisme, la transphobie, la sérophobie, la putophobie et toutes les discriminations, nous appelons à marcher tou·te·s ensemble ce samedi 24 juin, de la place de la Nation à la place de la République, contre l’extrême droite, contre la haine et l’injustice, contre les “violences pour tou·te·s”.
Premiers signataires:
ARDHIS, Act Up-Paris, Inter-LGBT, AIDeS, STRASS, Coming Out, MAG jeunes LGBT, les Séropotes, Bi'case