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Billet de blog 2 décembre 2009

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Frisson dans tout le Moyen-Orient depuis l'annonce de la faillite de Dubaï

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« Jusqu'où va la politique de l'autruche ? » serait-on en droit de se demander après les déclarations du cheikh Al-Maktoum depuis son palais de Dubaï avant-hier. Devant un parterre de journalistes venus de 46 pays différents pour l'entendre commenter la faillite de son propre émirat, le cheikh n'a rien trouvé de mieux que de se lancer dans une leçon de lexicologie : « Personnellement, je n'utilise pas le mot crise mais le terme transformation radicale et je suis certain que cela sera bénéfique aux Emirats Arabes Unis à court et à moyen terme ».

De l'Algérie à l'Arabie saoudite en passant par l'Egypte et la Jordanie, la presse arabe titrait unanimement hier sur la faillite de Dubaï, faisant fi des leçons panglossiennes de l'homme qui valait 60 milliards de dollars de dettes. Et tous les titres faisaient bien état de crise. Le quotidien égyptien pro-gouvernemental Al-Masri al-Ioum s'inquiétait de l'impact de l'annonce de la faillite du petit émirat sur la bourse égyptienne : 56,6 milliards de livres égyptiennes se sont envolés dans la seule journée du 30 novembre. De son côté, la bourse d'Abu Dhabi accuse une chute de 8,3%, contre 7,3% pour Dubaï (les lois de la finance ne sont décidément pas justes).

Entre les alarmistes et les modérés, il est aujourd'hui difficile de dire s'il faut s'attendre à un gigantesque effet domino sur l'ensemble de la région Maghreb-Machrek ou s'il faut au contraire attendre patiemment qu'Abu Dhabi rachète les dettes de son voisin, et son voisin avec, et que tout rentre dans l'ordre (ce qui semble une issue probable). En attendant, les économies de la région qui jusqu'ici avaient accueilli avec enthousiasme capitaux et projets d'investissement venant de Dubaï, comme si le cheikh al-Maktoum était la réincarnation du roi Midas, ont aujourd'hui la gueule de bois, et la chair de poule.

Le quotidien algérien Al-Khabar rappelait hier avec inquiétude qu'un accord de 100 millions de dollars venait d'être signé entre la compagnie Dubai Ports World – aujourd'hui en faillite – et le gouvernement algérien. Pour cette coquette somme, le conglomérat émirati devait initialement être chargé de la gestion du port d'Alger, rien de moins.

En Jordanie, la panique est de rigueur, au vu de l'étroitesse des liens entre le petit royaume et l'émirat déficitaire. Dans son édition du 1er décembre, le quotidien Al-arab al-ioumne cachait pas les probables conséquences désastreuses de cette faillite sur l'économie jordanienne. D'abord, parce que des projets d'investissements massifs étaient en cours, et ensuite parce que 200.000 jordaniens travaillent à Dubaï. Or, on voit très bien ce qu'une faillite à l'échelle nationale peut avoir comme genre de conséquence sur la politique de licenciement d'un pays, notamment vis-à-vis des travailleurs étrangers.

Le Liban, comme toujours, se distingue par la pluralité de ses voix : dans un article qu'il titre « Le Liban bien armé face à la crise du Golfe », L'Orient le jour réussit à annoncer « un ralentissement des flux financiers (libanais) » et à redouter un « effet domino ». Pour brouiller plus encore les pistes, le journaliste a choisi d'interviewer un spécialiste en économie qui ne voit dans cette crise de Dubaï qu'une « crise

Il reste une question, pourtant, qui me taraude : et si le suivant n'était ni une île de pêcheurs perdue en haute mer ni un petit émirat de rien du tout (qui de toute façon ne faisait qu'ennuyer l'Occident avec ses projets architecturaux délirants qu'on peut voir depuis la Lune et la nouvelle maison de Brad Pitt) ? Quand s'arrête la partie de Monopoly géante et quand commence l'inflation ?

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