L'histoire de tous les grands chantiers draine son lot de part d'ombre : des "fourmis de Dieu" mortes pour la cathédrale de Notre-Dame aux cimetières de Brasilia, gigantesque ville concept érigée en seulement 4 ans, il paraît difficile de faire aboutir des projets architecturaux pharaoniques sans occasionner quelques dégâts collatéraux.
La toute nouvelle et déjà célèbre Burj Dubai n'échappe pas à la règle. Ses 4 piscines, son club de cigares, de gym et ses hôtels de luxe ont vu le jour grâce au travail d'une importante main d'oeuvre étrangère. Originaires d'Inde, du Pakistan, des Philippines ou encore de Chine, les ouvriers employés sur ce chantier démesuré ont été rémunérés 4$ par jour, à raison de 12h de labeur quotidien, 6 jours sur 7, dans une chaleur souvent extrême.
Ca pourrait être une énième histoire d'abus d'ouvriers étrangers, un classique dans les pays du Golfe. Les hommes constituant cette main d'oeuvre ont en effet dû engager des frais allant jusqu'à 1600$, soit plusieurs années de salaire, pour payer une agence de recrutement leur promettant monts et merveilles de l'autre côté de l'océan indien. A l'arrivée, comme pour les domestiques philippines au Liban, l'employeur récupère les passeports... et personne n'a son mot à dire.
Une brèche a pourtant été ouverte, le 22 mars 2006, dans ce système bien huilé de néo-esclavagisme : alors qu'à la fin de leur journée de travail, 2500 ouvriers attendent le bus sensés les ramener au camp de travail où ils logent, les surveillants du chantier s'amusent à les provoquer, à les houspiller. Réplique immédiate des travailleurs qui entraîne la modique somme de 1 million de dollars de dégradations.
Le jour suivant, les ouvriers retournent sur le chantier, mais refusent de travailler, jusqu'à ce que des promesses concrètes leurs soient faites en matière de droit du travail. La rébellion a, quoique deux ans plus tard, porté ses fruits : depuis 2008, une pause en milieu de journée leur a été octroyée, permettant aux travailleurs d'échapper partiellement au pic de chaleur de midi. Et la création de syndicats a été amorcée...