Y aura t-il une nouvelle guerre au printemps ? Un article, puis deux, puis trois lancent la question sur le web libanais (NOW Lebanon, iLoubnan) sans produire d'analyse fouillée pour tenter d'y répondre. Chacun y va de sa lecture de marc de café. Le flou reste donc total. Néanmoins, entre amis, la question revient et commence à imprégner les conversations.
Chose un tantinet inhabituelle, puisqu'au Liban, on y pense beaucoup, mais on n'en parle qu'avec une infinie réticence. D'où viennent ces articles, alors ? Sont-ce les prédictions de journalistes sensationnalistes qui trouvent le climat un peu trop calme à leur goût ? Ou s'agit-il d'inquiétudes fondées ? N'a t-on pas déjà lu de telles prédictions fin 2008, sans que rien « n'arrive » en 2009 ?
Les faits, alors. D'abord, il y a eu les visites du président Michel Sleiman aux Etats-Unis et en France, et celles du premier ministre Saad Hariri en Turquie, où tous les deux auraient été avertis de menaces avérées d'attaque israélienne. L'hypothèse étant qu'Israël pourrait de nouveau bombarder les régions libanaises investies par le Hezbollah, à savoir le sud du pays, et le sud de Beyrouth. En partie pour prendre sa revanche sur la défaite de 2006 (strictement militaire... puisque personne, au Liban, excepté les chantres du Hezbollah, n'ose parler de « victoire ») et en partie pour titiller le voisin iranien.
Vient s'ajouter à cela les conclusions du Tribunal Spécial pour le Liban sur le meurtre de Rafik Hariri qui doivent être délivrées dans les semaines à venir, et pourraient alourdir le climat régional en ravivant la méfiance, jamais très enfouie, entre la Syrie et le Liban (malgré les récents efforts diplomatiques des deux pays). Syrie qui, par ailleurs, d'après une brève du site NOW Lebanon, inquièterait Israël en aidant à financer l'armement du Hezbollah, déjà avancé en termes de missiles.
Enfin, dans une analyse publiée sur le site alliancegéostratégique.org, son auteur Jean-Luc Vannier rapporte les propos du député de la région chiite de Baalbeck Nawwar Sahili, qui aurait déclaré : « Nous ne ferons que riposter ». Signifiant à mots peu couverts que la balle du timing serait dans le camp d'Israel...
Et puis, il y a le courant d'opinion inverse. Ceux qui affirment avec assurance qu'Israel ne peut pas risquer une deuxième « humiliation », celle d'une nouvelle défaite contre le Hezbollah (D'autant que l'armée israélienne semble être la mieux informée des avancées en équipement du « parti de Dieu »). Ceux qui ironisent et prétendent que la seule raison pour laquelle Israel n'attaquera pas, c'est que l'Etat hébreu affectionne les attaques surprises. Et que la possibilité d'une guerre au printemps est déjà trop dans l'air pour que la prophétie se réalise. D'autres avancent que, diplomatiquement, Israel ne peut pas lancer une attaque l'année même où le Liban est membre du Conseil de Sécurité onusien, et, a fortiori, pas pendant sa présidence tournante dudit conseil, en mai prochain.
Ou alors, Israel pourrait bien attaquer, mais seulement deux ou trois jours, et de façon très ciblée, les QG du Hezbollah.
Ou alors, et cette hypothèse semble mettre tous les analystes d'accord, du pilier de bar au chroniqueur chevronné, le conflit poindra du côté de l'Iran. Si elle va au bout du processus nucléaire, la tumultueuse république islamique se verra en position de concurrence directe avec Israel, qui ne laissera très probablement pas le monopole nucléaire de la région lui échapper sans rien faire. Et si les événements internes à l'Iran continuent de prendre de l'ampleur, son gouvernement pourrait bien tenter de faire diversion en déplaçant le conflit du côté du Hezbollah, donc du Liban. Et avec, l'attention de la communauté internationale.