Alors qu'Israël fait courir le bruit, via les réseaux diplomatiques habituels (France, Turquie, Etats-Unis), d'une attaque prochaine contre le Hezbollah, ses services secrets, dont la réputation a fait fantasmer plus d'un réalisateur et d'un écrivain, ont déjà commencé les festivités.
Un article du Times daté du 13 février 2010 fait remonter le début de cette « nouvelle vague » à décembre 2009, quand un bus dans lequel se trouvaient des responsables iraniens et des membres du Hamas a explosé dans les environs de Damas. Les autorités syriennes expliquèrent, par une habile litote, que l'explosion d'un pneu était en cause. Une vidéo montre pourtant que c'est une explosion antérieure qui a fait éclater les pneus. Logique.
La série continue, à Beyrouth cette fois, quand, quelques semaines plus tard, une attaque d'un meeting du Hamas dans la banlieue sud de la capitale libanaise provoque la mort de plusieurs des présents. Le Hamas condamne Israël, ses ministres démentent.
La dernière mise en scène, plus loufoque cette fois, date du 19 janvier dernier. Un leader du Hamas, Mahmoud el-Mabhouh, est tué à Dubai, dans sa chambre du très chic hôtel Rotana, par une équipe de 11 membres du Mossad, no less. Ils sont armés de faux passeports britanniques, de perruques et de raquettes de tennis. Un article du New York Times daté du 16 février 2010 s'émeut du sort des ressortissants britanniques récemment dépouillés de leurs passeports en Israël : ils doivent aujourd'hui rendre des comptes à la justice des EAU. En revanche, peu d'émotion du côté des dirigeants israéliens. Eli Yishai, ministre del'Intérieur de l'Etat hébreu, a notamment déclaré : « Encore heureux que tous les services de sécurité font tout ce qui est en leur pouvoir pour préserver la sécurité de l'état d'Israël ». Cristallin. Lieberman, le ministre des Affaires Étrangères, n'a cette fois même pas pris la peine de nier l'implication d'Israël, directement mis en cause par le Hamas.
Cette vague d'assassinats n'a évidemment rien de hasardeuse puisqu'elle coïncide avec la coopération croissante entre Gaza – contrôlée par le Hamas, élu en 2006 – et l'Iran. Israël chercherait également à freiner la collaboration entre le Hezbollah et le Hamas, d'où l'explosion dans la banlieue sud de Beyrouth – où se trouvent les quartiers sécuritaires du Hezbollah.
On pourrait même faire remonter cette « tendance » à février 2008, quand un leader important du Hezbollah, Imad Mughniyeh, a été tué dans une explosion de voiture à Damas. Il était depuis des années sur la liste des hommes les plus recherchés par Israël. Cette fois, les autorités israéliennes avaient pris la peine de démentir, alors même que cet assassinat représentait pour Israel la première « victoire » contre le Hezbollah depuis la guerre de l'été 2006 au Liban.
La question qui se pose aujourd'hui est : l'état hébreu se contentera t-il d'éliminer ses ennemis un par un, dans une guerre secrète digne des meilleurs moments de la guerre froide ? Ou faut-il craindre que ses dirigeants ne soient assez irrationnels pour provoquer un conflit dont l'ampleur régionale ne manquerait de résonner rapidement ? Réponse : bientôt. Quand les troupes américaines évacueront l'Irak et que l'Iran dévoilera au monde dans un communiqué très officiel la teneur de son programme nucléaire, par exemple.