Depuis le 23 avril au soir, et l'annonce des résultats alors probables, les tirs en direction de Jean-Luc Mélenchon et des Insoumis est incessant.
Politique du "ni-ni", "soutient implicite au FN" et autres "extrémiste" fusent au détriment d'une analyse posée, que nous aurions été en droit d'attendre des spécialistes de la politique.
Ces derniers n'ont pas daigné analyser la teneur du programme "l'Avenir en Commun" et les raisons de son succès populaire. Pourtant, les suites du déroulement de l'élection, au regard des insoumis, s'y trouvaient.
Certains ont objectivement constaté, derrière la forte hausse de son nombre d'électeurs, que la campagne l'Avenir en Commun était parvenu à ramener dans le giron républicain, et en l'espèce démocratique, des personnes qui jusqu'alors, s'en étaient éloignés ou votaient pour le Front National.
Quelle analyse ce fait leur a t il permis ? aucune pour la plus part.
On peut espérer que ces électeurs aient été intéressé par la planification écologique ou par le développement des économies locales, mais nul doute que c’est le volet démocratique qui a le plus souvent guidé leur choix.
Depuis le temps qu’éditorialistes et observateurs de la vie politique constate la montée du FN et tentent d’en décrypter les raisons, aucun n’a véritablement mis en exergue le point commun de toutes les frustrations : la sensation, sans doute réelle, de privation du droit de parole.
La notion de « sans voix » utilisée ici et là en est la meilleure illustration.
Pourquoi les peuples se retournent ils contre l’UE, quand, dans le même temps, la plupart sont attachés à cette identité ou à l’euro ?
Pourquoi fuient-ils les urnes alors que les discussions politiques fleurissent sans saisons aux machines à café ?
Non la France n’est pas fasciste, non la France n’est pas adepte du Front National, la France veut juste s’exprimer et que son avis soit pris en compte !
De par la campagne menée et la volonté, notamment par une constituante, de rendre le pouvoir de décision au peuple, la France Insoumise a su attirer bon nombre d’anciens abstentionnistes ou d’électeur du Front National.
Le scrutin du 1er tour a donné les résultats que l’on sait : La France Insoumise a eu une progression spectaculaire, mais pas encore suffisante. Certains y verront une volonté médiatique, politique, etc. peu importe. La campagne ne s’est pas articulée autour d’un vote utile comme argument anti-Hamon. Pour être pérennes, nos idées doivent convaincre et non contraindre.
C’est la même logique qui nous fait demander aujourd’hui aux impétrants de créer l’adhésion et non un rejet de l’adversaire qui ne fait qu’alimenter l’inutilité du vote par son aspect automatique.
Depuis l’utilisation forcenée du vote utile au second tour, puis dès le premier, jusqu’à aujourd’hui l’évoquer dans les primaires, le FN n’a cessé de monter. Le barrage devant être de plus en plus haut au fur et à mesure que les automatismes du NON d’un bord, ne compensent plus les SI de l’autre.
Il n’est en réalité plus ici question de sauver ou non la République, affaiblie par ailleurs au quotidien par les moralisateurs champignonnant au moment des élections (cumul de mandat, justice à plusieurs vitesses, etc.) ; mais bel et bien de sauver la Démocratie.
Que vaut un vote, s’il est contraint par la police de la pensée, pour de surcroit, permettre à un individu de gouverner en monarque une fois élu ?
Pour redonner aux citoyens l’envie de voter contre ce qui menace notre mode de vie, encore faut-il leur donner envie de voter pour ce mode de vie.
La France Insoumise présentait un programme, reconnu comme étant complet, qui se déployait parallèlement à une réécriture des règles démocratique, afin de permettre à tous de s’en emparer. Voilà les raisons de son succès.
Il était donc parfaitement logique, que dans le contexte que nous vivons aujourd’hui, la France Insoumise, de par son porte-parole Jean-Luc Mélenchon, ne revienne pas sur ses promesses démocratiques en guidant de quelque façon que ce soit, le choix de ceux qui lui avaient fait confiance.
A l’inverse, toutes les pressions exercées sur elle, via Jean-Luc Mélenchon notamment, renvoient à la sensation d’inutilité du vote, et de permanence d’une oligarchie.
Le chemin d’Emmanuel Macron pour convaincre objectivement ces électeurs, futurs abstentionnistes ou FN, n’était certes pas facile, mais se cantonner au rôle de défenseur de la République sans gestes permettant au moins à ses détracteurs de sauver la face, est la plus grande irresponsabilité de cet entre-deux tours.
A contrario, le FN, même connu pour sa démagogie, n’a cessé d’élargir sa campagne pour accroitre son électorat. La déferlante médiatique présentant comme quasi-fasciste l’abstention ou le simple silence, contribue de surcroit à dédiaboliser un FN en appauvrissant ce terme, ou pire, en l’inversant.
Pour un électeur, nouveau ou renouveau, persuadé qu’Emmanuel Macron n’est que le dernier packaging de l’éternelle oligarchie, la volonté d’expression démocratique n’est plus représentée, dans le meilleur des cas.
Chacun l’aura compris, la campagne qui se déroule sous nos yeux n’est d’ores et déjà plus celle de la présidentielle, mais des législatives. Macron, présenté comme le meilleur rempart au FN se retrouve in fine face à lui ; la pression du vote barrage est à son comble et la force d’opposition de gauche rabrouée pour dérouler le tapis rouge « En Marche » aux législatives.
Mais avant de mettre la machine en route, peut être vaudrait-il mieux en comprendre les mécanismes, car un jour, que je n’espère pas prochain, elle s’enrayera.