Dans une interview accordée à Politis par Yves Cochet, euro député EELV et "acteur historique du mouvement" (n° 1289 du 8 au 12 février 2014) je relève une perle et deux aveux. La perle d'abord, qui en même temps temps est révélatrice d'une conception très Vème république de la vie politique (je n'ose dire la démocratie) : "Si Daniel Cohn Bendit avait pris le pouvoir (en 1968) nous serions peut-être à 40% dans les sondages". D'abord c'est une bêtise, on ne (re)fait pas l'histoire avec des si. C'est aussi une curieuse amnésie de ce que fut 68 pour beaucoup de ses acteurs, ceux notamment qui, comme le dit Y. Cochet étaient "sur les barricades", à deux pas du Palais Bourbon qu'ils ont toujours ignoré avec superbe. Car la prise du pouvoir n'a été, en 68, ni de près, ni de loin, l'objectif des étudiants*, avec ou sans Cohn Bendit. Mais il y a pire : regretter que Cohn Bendit n'eût pas pris le pouvoir, comme il le dit, montre de façon subliminale qu'Yves Cochet n'est pas l'ennemi, quand il croit que ça l'arrange, de l'homme providentiel, ce qui est passablement étonnant dans la bouche du représentant d'un parti politique qui a toujours prétendu qu'il voulait faire de la politique autrement. Voilà pour le premier aveu. Quand au second, il est sans doute tout aussi involontaire :" Je redoute, nous dit Yves Cochet, que l'avènement de nos solutions ne suppose le passage à une épreuve du feu - une catastrophe financière, une crise climatique, une révolte sociale (...)". On a bien lu : Yves Cochet redoute une révolte sociale. Il fallait que cela fût dit.
* Pas plus que ce n'était l'objectif du PC et de la CGT, mais pour de toutes autres raisons : ils ne voyaient la prise du pouvoir que dans le cadre d'une union de la gauche qui était encore dans les limbes.