
Agrandissement : Illustration 1

En 2019 Rachel Riley, une présentatrice de télévision britannique a posté une photo d’elle sur Twitter portant un t-shirt avec l’inscription « Jeremy Corbyn is a racist endeavour » (Jeremy Corbyn est une entreprise raciste) d’après le slogan utilisé sur les affiches de « publicité subversive » des opposants de la politique d’ « apartheid » en Israël à Londres en 2018 (« Israël is a racist endeavour »). Le texte a été superposé sur une photo de Corbyn en train d’être arrêté par la police pendant une manifestation anti-apartheid à Londres en 1984. Le message d’origine était « Défendez le droit de manifester contre l’apartheid. Rejoignez ce piquet ». Riley est l’équivalent de Bertrand Renard dans le jeu « Countdown » (Des chiffres et des lettres en France) et elle s’identifie comme juive athée. À l’époque elle était aussi ambassadrice pour le Centre contre la haine (et la désinformation) en ligne CCDH (Center for countering digital hate). Son directeur Imran Ahmed est réputé proche de l’aile droite du parti travailliste.
Elle dit avoir voulu critiquer Corbyn pour sa « bienveillance » envers les membres antisémites du parti travailliste (Labour Party).1 En tant que secrétaire général de son parti de l’époque Corbyn avait été vivement critiqué pour son « inaction » contre l’ « antisémitisme profond » du Labour Party.2 En 2019 il était « candidat » au poste de premier ministre aux élections générales qui ont vu Boris Johnson (qui n’a jamais été gêné par son penchant pour les remarques sexistes, racistes et islamophobes) élu avec une majorité de 80 sièges. Les ami.e.s politiques de Corbyn considèrent que ces allégations sont « un tissu de mensonges » et « la pointe d’une campagne de la droite blairiste, des conservateurs, des sionistes et des médias pour éliminer toute trace de sentiments de gauche au Parti travailliste. »3 En fin de compte, le coup de publicité de Riley (qu’elle considère comme une blague) s’est (un peu) retourné contre elle mais on peut toujours trouver « son » t-shirt en vente (en ligne - prix entre $13,50 et $20).4
Jeremy Corbyn, par contre, n’est plus le premier secrétaire du parti travailliste et n’avait plus le droit d’être candidat au mandat de député pour son parti lors des élections générales en 2024. Une victoire de plus pour les ennemis de la haine et la désinformation en ligne ! Au festival de musique de Glastonbury 2023, le film sur l’affaire « Oh Jeremy Corbyn - The big lie » (Oh Jeremy Corbyn - Le grand mensonge) a été retiré du programme de la « scène cinéma » du festival le « Pilton Palais » sous prétexte que : « Même si (le Pilton Palais a) réservé ce film en toute sincérité, dans l’espérance de provoquer un débat politique, il nous paraît clair maintenant qu’il n’est pas approprié de projeter le film. Glastonbury est un festival qui promeut l’unité pas la division, et nous nous opposons à toute forme de discrimination . » 5 Comme pour tout, l’ « unité » est un concept relatif. Le prix du billet pour « Glastonbury » (avec placement de camping libre et accès aux toilettes répugnantes) en 2023 était £345 (€415).
Mais, au « Pop up hotel » à côté du festival, les prix du camping version de luxe (avec toilettes propres) allaient de £2 999 (€3 605) à £24 999 (€30 053) (prix pour les réservations à l’avance) ! Après tout, si on a les moyens, un petit peu d’ « apartheid » (séparation en Afrikaans) sociale ne peut jamais faire de mal ! En défiance de l’interdiction, le film a finalement été projeté par des amateur.e.s du festival enervé.e.s. Par conséquence, Platform Films a remercié le festival de Glastonbury car, grâce au boycott, tout le monde voulait voir le film! En avril 2024 Rachel Riley a à nouveau provoqué un scandale, sur X - où elle a comparé une attaque au couteau (sans lien avec le terrorisme) dans un centre commercial à Sydney (qui a fait 6 morts) avec une « intifada mondialisée ». Bien qu’elle ait supprimé le post depuis (à contrecœur), son employeur, la chaîne de télévision « Channel 4 », a finalement rappeler ses obligations à Mme Riley.6 Le Média en ligne (en anglais) The Canary a parlé de l’histoire du t-shirt.7
En février 2025 dans un éditorial dans le « Telegraph » (surnommé le « Torygraph », l’équivalent du « Figaro » en France), l’ex député « blairiste » Tom Harris - qui, depuis, soutient le parti conservateur - a déclaré qu’avec Keir Starmer, la Grande-Bretagne a « le gouvernement le plus à droite depuis une génération ».8 Conseiller Internet du parti travailliste en Écosse, il a été contraint de démissionner en 2012 après avoir posté une vidéo comparant Alex Salmond (premier secrétaire du « SNP » le parti nationaliste en Écosse) à Hitler. En Grande-Bretagne on dit souvent que « ceux (et celles) qui ne peuvent pas tirer les leçons de l'histoire sont condamnés à la répéter. » en citant George Santayana sans savoir vraiment qui c’était - Winston Churchill l’a reformulé dans un discours en 1948. Ce qui se passe en France en 2025 avec Jean-Luc Mélenchon (et de façon plus générale LFI) est tout à fait comparable avec ce qui est arrivé à Jeremy Corbyn en Grande-Bretagne en 2019.
On peut très bien ne pas aimer « Méluche » mais les ennemi.e.s (politiques) de nos ennemi.e.s ne sont pas forcément nos ami.e.s. Ouest-France attribue la citation originale « les ennemis de nos ennemis sont nos amis » à Jean-François Kahn10 mais elle date peut-être du IVe siècle avant Jésus-Christ. Il ne faut pas croire tout ce qu’on lit sur Internet!
Dans un article du 24 avril 2025, le site « Declassified UK » explique comment « Labour Together » un laboratoire à idées sous la direction de Morgan McSweeney s’est secrètement associé à des critiques « indépendants » sous prétexte de faire face aux « fausses informations » et à l’ « extrêmisme politique ».11
Le plan a débuté avec le groupe « Stop Funding Fake News » (Arrêtez de subventionner les fausses informations) qui est devenu le CCDH (Center for countering digital hate). Une de leurs premières cibles en 2017 était le média en ligne « The Canary ». Travaillant étroitement avec le « Jewish Labour Movement » (le Mouvement Juif Travailliste), McSweeney a recruté la présentatrice Rachel Riley en secret pour mener une campagne ciblant « The Canary » et faire croire aux annonceurs que le média était antisémite.
En 2021 l’autorité de régulation indépendante « Impress » a trouvé les allégations sans fondement mais en quelques mois « The Canary » (avec 8,5 millions de visites par mois et 22 employé.e.s) avait tout perdu. « Au revoir petit oiseau!!! » a Tweeté Riley, fière de son coup. L’histoire est racontée dans le livre « Get in: The inside story of Labour under Starmer. »
McSweeney est devenu chef de la stratégie politique après la victoire du Labour aux élections.
1 https://twitter.com/RachelRileyRR/status/1196879890676621312
2 https://www.monde-diplomatique.fr/2019/06/FINN/59943
3 https://www.wsws.org/fr/articles/2023/04/06/ithg-a06.html
5 https://www.glastonburyfestivals.co.uk/areas/pilton-palais-cinema/
6 https://metro.co.uk/2024/04/14/rachel-riley-sorry-misunderstanding-sydney-stabbing-tweet-20645947/
9 https://www.theguardian.com/uk/2012/jan/16/labour-mp-tom-harris-resign
11 https://www.declassifieduk.org/morgan-mcsweeney-plot-without-precedent-in-labour-history/