Sous le titre prometteur de « Cinquante ans de crises financières », Jacques de La Rosière, Gouverneur de la Banque de France de 1987 à 1993, après avoir été Directeur du Trésor puis Directeur général du FMI, vient de publier ses mémoires. Ce sont sans conteste celle d’un grand commis de l’Etat intègre et pénétré de sa mission. Le fil conducteur en est simple, voire simpliste : c’est la déshérence du système monétaire international, après la fin de Bretton-Woods, qui est la mère de tous les maux. Mais on y cherche en vain le moindre élément de théorie économique justifiant son action, que ce soit au FMI ou à la Banque de France. A peine une demi-page pour évoquer et bien sûr rejeter les critiques du « consensus de Washington » et les programmes d’ajustement imposés aux pays en voie de développement surendettés ; les fameuses « réformes structurelles », toujours invoquées jamais détaillées, encore moins justifiées ; aucune remise en question ni même explication de l’adhésion au franc fort et de ce que ça a coûté à l’économie française dans les années 90, ce qu’il admet d’ailleurs ; juste un demi-mot sur le « hasard moral » et un regret que le « too big to fail » nuise au modèle de banque universelle qui réussit si bien à l’Europe !!!
On finit de plus par ressentir un malaise certain devant la floraison d’éloges pour ses homologues étrangers et l'évocation des innombrables relations d’amitiés nouées dans les cercles les plus influents de la planète. On aurait aimé que ces éloges soient mises en face de la timide critique de la dérégulation, seul élément réellement en rapport avec le titre de l’ouvrage, dont certains parmi les plus haut placés desdits-homologues et amis ont été les ardents promoteurs. Bref tout va mal, le monde est en crise financière depuis cinquante ans mais aucun des grands responsables que Jacques de la Rosière a côtoyés dans sa prestigieuse carrière n’est responsable…En fait personne n’est responsable et surtout pas le système néo-libéral qui régit le monde depuis…cinquante ans !