L’eau est un sujet d’actualité. Nous prendrons le sujet sur un mode pragmatique, puis sur un mode historique. Pour une fois, je parlerai du haut de mon diplôme d’ingénieur hydraulicien, durement acquis en 1976… Pendant que Trump redonne toute leur puissance aux douches américaines, au-delà de 9.5 l/mn, soit 95 l pour une douche de 10 mn, et que flambe la Californie,
les hydrologues s’inquiètent des effets de la sécheresse et des moyens de les amoindrir.
L’agriculture est mise en péril, et doit au moins envisager des changements importants. Nous y reviendrons. Mais l’industrie aussi est menacée, ce qui laisse à penser que même le capitalisme va bientôt se sentir concerné,
même si les morts de soif, 2.6 millions par an, selon l’article ci-dessous, ne l’émeuvent guère :
Toutes les solutions ne sont pas bonnes à prendre : les retenues en surface, qui plaisent à la FNSEA, comme celle de Sivens, sont une stupidité : on y laisse évaporer la moitié ou plus de la ressource.
« C’est donc une hérésie totale de faire passer les ressources en eau souterraines en surface au profit de seulement 6 % des terres équipées pour être irriguées ».selon les auteurs.
Ce qui va se présenter de plus en plus, c’est peut-être une diminution globale de la pluviométrie, mais ce seront surtout des irrégularités, avec des pluies torrentielles, suivies de périodes de sécheresse :
A cet égard, entreprendre de conserver l’eau, cette denrée plus précieuse que l’or, est une tâche urgente. Notre consommation domestique personnelle d’eau : 146 l/personne, est excessive. Nous l’analyserons précisément pour savoir comment la réduire.
Si l’on s’inspire des citernes individuelles mises en place au Rajahstan, dans le Barefoot College conçu par Bunker Roy (nous y reviendrons pour plus de précisions à l’heure d’aborder les questions de pédagogie),on pourrait imaginer des citernes domestiques. https://www.barefootcollege.org/solution/water/
Un bref calcul : soit une maison carrée de 100 m2, avec 4 occupants, et un toit largement débordant, de 160 m2. La construction des 4 murs d’enceinte, en terre, a nécessité 4 x 3 x 0.8 x 10 = 96 m3 de terre, prélevés dans un trou, faisant citerne, proche de la maison, sinon en son centre suivant l’exemple des trullis d’Alberobello. (voir plus bas) Les pluies fournissent 600l /m2/ an, sur 160 m2, soit 160x600 = 96000 l : la citerne est pleine : le monde est bien fait !Ce qui donne 96000 litres d’eau fraîche, saine, car à l’abri de la lumière, soit 96 000 / 4 x 365 = 65 litres d’eau par personne et par jour, ce qui devrait suffire, sauf quand Trump vient prendre sa douche….
Sur les « trulli », on peut lire ceci :
http://www.studioarchitetturabp.it/it/page/26-i-trulli-e-l-architettura-bioclimatica.html
http://www.studioarchitetturabp.it/it/page/24-i-trulli--elementi-costruttivi-.html
Comme on le voit, les « trulli », à maints égards, sont des modèles vernaculaires pour une architecture bio-climatique. Les réserves d’eau , sous le sol des maisons, participent très clairement à établir, dans les étés chauds des Pouilles, à l’extrême sud de l’Italie, une forme de climatisation naturelle, tout en servant de citerne : suivant le site ci-dessus : « Le « trullo » naît de l’attitude naturelle de l’homme de créer des habitations adaptées au contexte climatique avec les matériaux disponibles sur place, garantissant le meilleur confort possible. Ce sont des habitations fonctionnelles, auto-construites avec les pierres, qui sont le matériau le plus courant et aussi le plus résistant que le territoire de la Murgia, région comprenant Alberobello, Martina Franca, Fasano Selva , puisse offrir. C’est un calcaire très compact avec d’excellentes caractéristiques mécaniques. Depuis le quinzième siècle se construisent ces habitations, pérennes ou provisoires, dans la Murgia des « trulli », qui constituent des témoignages de l’agriculture apulienne./…/ La citerne : les pierres pour la construction des trulli sont extraites de l’excavation créée par la citerne, servant à la récolte de l’eau de pluie, en lieu et place de la cave.
Sur les trulli encore, on peut trouver ceci : https://www.pierreseche.com/trulli.htm
Et retrouver ainsi, en suivant une recherche sur l’eau, le thème des textes précédents sur la propriété, ou encore les bastides : «Selon certains érudits de la première moitié du XXe siècle, c'est le comte de Conversano, Giangirolamo II Acquaviva d'Aragon, qui fit bâtir en 1635, à côté de cette chapelle, la villa seigneuriale autour de laquelle vinrent peu à peu s'agglutiner des maisons à trulli. Voulant créer un fief indépendant de la Cour du Royaume de Naples sans l'autorisation du Roi, il concéda à un groupe de colons le droit de cultiver la terre (en zone franche) et de se construire des habitations, à condition que celles-ci soient réalisées sans l’emploi de mortier de chaux pour être démolies facilement puis remontées. Les trulli n’étaient pas recensés comme habitations « légales » et les paysans qui les habitaient émargeaient comme habitants du village de Noci voisin, garantissant aux feudataires des avantages tributaires et une occupation plus vaste du territoire . » Giuseppe Notarnicola, I trulli di Alberobello dalla preistoria al presente, Unione Editoriale d'Italia,1940
« Dans la carte géographique dessinée par Giovanni Antonio Rizzi Zannoni en 1808, apparaît très distinctement la selva d'Alberobello et, situé dans une clairière, un habitat de maisons éparses qui présente de nombreuses ressemblances avec l'actuel centre habité (21). » ) Angelo Ambrosi, Raffaele Panella, Giuseppe Radicchio, a cura di Enrico Degano, Storia e Destino dei Trulli di Alberobello - Prontuario per il restauro, Schena Editore, 1997
Le même système de réserve d’eau peut être aussi collectif, toujours en s’inspirant du Rajahstan, pays où les périodes sans pluie peuvent être de deux ans.
https://fr.wikipedia.org/wiki/B%C3%A2oli
https://generationvoyage.fr/rani-ki-vav-puits-degres-reine-inde/
Ce sont les bâoli, bâodi, bâori, ou wav. Le Rani-ki-vav de Patan retient au minimum, dans le fond, 9.5x9.5x23 = 2076 m3, soit 2.076.000 l, ce qui suffirait pour 85 personnes, à 65 l par jour. Au maximum, son volume est de 64 x20x27 = 34560 m3, ce qui suffirait pour 1456 personnes, ce qui paraît peu pour l’effort fourni : décidément, une échelle domestique est préférable : « small is beautiful. » Mais bien sûr, les choix sont à apprécier :
Les modèles domestiques fonctionnent uniquement à l’eau de pluie, ce qui, même en tenant compte d’adaptations possibles du droit, sont plus facilement accessibles qu’une source, ou un cours d’eau, qui sont les sources d’approvisionnement des bâoli. La meilleure source d’eau reste bien sûr une nappe souterraine, à condition qu’elle ait la possibilité de se recharger durant les pluies d’automne ou d’hiver.
A cet égard, le type de couverture du sol est déterminant : tout ce qui va favoriser l’écoulement rapide des eaux, le durcissement du sol, et son absence de perméabilité, la pluie venue, est à proscrire.
Cela sera traité dans les textes relatifs à l’agriculture.
Mais il en va également du type d’urbanisation retenu : Ceci, par exemple, est éloquent : https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/IF%20Eco-construction%20EAU03%20Part%20Fr#:~:text=Pour%20qu'une%20infiltration%20soit,la%20p%C3%A9n%C3%A9tration%20de%20l'eau.
Nous explorerons une ville, et ses fontaines dans le prochain texte : ce sera Sienne…