On le voit bien lors des conflits sociaux, le combat des salariés devient de plus en plus difficile et inégal. Il convient dès lors de réfléchir à la manière la plus efficace de défendre les intérêts de celles et de ceux qui ont mis tant d'ardeur depuis le début des années 80 à construire et à faire vivre un outil dont ils pensent - à juste titre - qu'une partie leur appartient. Et la question qui vient naturellement à l'esprit est de se demander si toutes les pistes en particulier d'un point de vue juridique ont été explorées. A vrai dire on peut en douter.
Voilà pourquoi je me permets d'en proposer une. Certes, certains jugeront cette proposition peu académique, mais il n'empêche, il faut tenter sa chance en pensant que devant un tribunal l'appréciation en fait et en droit peut évoluer pourvu que l'on s'appuie sur des fondements juridiques incontestables. Ainsi le fondement juridique sur lequel les salariés de Wirlpool pourraient s'appuyer se trouve ... dans le Préambule de la Constitution de 1958 dans son alinéa 8.Que dit cet article - complètement oublié - issu du Conseil National de la Résistance ? Il indique très clairement que « Tout travailleur participe*, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion** des entreprises » ce qui signifie très clairement que - juridiquement parlant - les salariés, en tant que partie prenante de l'entreprise, ont leur mot à dire et doivent prendre part - au-delà des mesures d'ordre social - à toutes décisions économiques qui concernent l'emploi, le développement, la pérennité et la stratégie de l'entreprise. Cet article a valeur constitutionnelle.
A l'évidence les 290 salariés de Wirlpool et leurs représentants ont été mis encore une fois devant le fait accompli en ce qui concerne ce projet de licenciements et de délocalisation. Ils n'ont - contrairement à ce qu'impose la Constitution - aucunement participé à la prise de décision de ce plan, ni aux perspectives de continuité d'activités que le site d’Amiens peut leur offrir. Dans le cadre de la hiérarchie des normes juridiques, l'article 8 du Préambule s'impose aux lois existantes et à venir. Encore faut-il que quelqu’un veuille bien .... s'en prévaloir devant une juridiction ce qui, par extraordinaire, ne semble pas avoir été le cas lors de précédents conflits sociaux !!!
On peut ajouter que cet article est directement « opérationnel » contrairement à d'autres articles constitutionnels qui revêtent un caractère plus général. Au-delà de l'aspect juridique, une action judiciaire sur cette base permettrait aussi de faire reconnaitre les salariés comme une composante essentielle de l'entreprise et d'initier une démarche de reconnaissance juridique de la personnalité morale à l'Entreprise*** comme entité constituée en effet de deux parties égales en droit où le pouvoir de décisions n'appartiendrait plus simplement aux représentants des propriétaires du capital comme d'ailleurs le souhaitaient - au sortir de la guerre - les inspirateurs de la Constitution de 1946 issus du Conseil National de la Résistance.
*** et non plus seulement à la "société" représentante des actionnaires.
* Définition et synonymes de participer : concourir, prendre part à une action et décision, assumer
** Définition et synonymes de " Gérer " dans le dictionnaire " Le Petit Robert": administrer, conduire, régir, diriger, gouverner, organiser ....