JALIL BERRADA

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Billet de blog 10 janvier 2025

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KETAMA, L’ÉTERNELLE

Après un modeste rappel historique, la question de la culture du cannabis dépasse les frontières marocaines pour intéresser de nombreuses démocraties. Les effets du Canabidiol (CBD) en pleine expansion dans le domaine médical tout particulièrement sont considérés par certains auteurs comme semblables à la découverte des antibiotiques.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le septième siècle, en concomitance avec l’arrivée des ‘’arabes’’ avait vu les premières cultures de cannabis au Maroc.

Au dix-septième siècle, les heddawa en extase consommaient cette substance lors de leurs rituels mystiques.

Au dix-neuvième siècle, la consommation du cannabis se banalisa notamment en milieu rural.

Afin d’avoir la paix et calmer la fougue de bastions réputés dissidents, le sultan Alaouite Hassan ben Mohammed (1873-1894) autorisa la culture du kif dans la région de Ketama, Beni Seddate et Beni Khaled dans le pays Sanhadja pionnier de blad ‘’siba’’.

Mieux encore, l’article 73 de la conférence d’Algesiras offre un cadre juridique relatif à la culture du chanvre en permettant à la France de  créer en 1906 la régie marocaine des kifs et tabac, qui contrôla la culture et le commerce du kif.

Dans le cadre de l’accord international sur les stupéfiants en 1932, la culture du cannabis devint illégale sur toute la zone occupée par le protectorat français malgré le maintien de l’autorisation à la vente d’un mélange de tabac et de haschich.

En 1954, une nouvelle loi avait vu le jour pour prohiber définitivement la culture du cannabis, mais sur le terrain, cette dernière poursuivit son essor et avait fait de Ketama, la capitale mondiale des jeunes adeptes de fumette atteignant même certaines catégories d’artistes et d’écrivains du monde entier.

À mon époque, pour plus de discrétion et à l’instar de tous les jeunes qui donnaient un surnom à cette substance, le notre fut ‘’LAHBABI’’.

Le RIF du Maroc connut ensuite une instabilité dans les années cinquante et l’état marocain pesa de tout son poids pour dissuader les agriculteurs de ne plus semer les graines de cannabis.

C’est l’effet inverse qui se produisît avec une expansion très significative de la taille des champs dépassant les 130000 hectares, produisant annuellement plus de 3000 tonnes de haschich et générant un revenu de 200 millions de dollars pour les paysans, 70 fois moins que celui des trafiquants de tout genre.

D’où la complexité des réseaux d’acheminement incluant notamment le Maroc, l’Espagne et certains pays africains ouvrant ainsi la brèche à la cocaine en provenance de Colombie essentiellement de s’y greffer.

Enfin, après six décennies, la 63 ème session de la commission des stupéfiants des nations unies se déroulant à Vienne le 02 décembre 2020 a été marquée par la décision de retirer le cannabis de la liste des drogues dangereuses, et ce, à la lumière des recommandations de 2019 signées par l’Organisation Mondiale de la Santé.

Après ce modeste rappel historique qu’on retrouve dans tous les supports dédiés, la question de la culture du cannabis dépasse les frontières marocaines pour intéresser de nombreuses démocraties.

À l’état actuel et en cohérence avec la réalité du terrain, nous assistons à la légalisation du cannabis sous toutes ses formes aux USA, en Union Européenne, en Amérique latine, au Canada..., une légalisation qui prends de vitesse autant les responsables politiques que sociaux de tout ce beau monde.

Du jour au lendemain, la consommation du cannabis (ou chanvre) est devenue légale, selon des conditions bien précises de toute évidence !! 

Il est noté en outre que l’usage légalisé de cette substance naturelle, ne se limite point au domaine récréatif  mais englobe également le secteur médical.

Par conséquent, s’est accrue le contrôle de la qualité et du dosage du canabis à base de Tetra-Hydro-Cannabinol (THC) et de Canabidiol (CBD) parmi les centaines de cannabinoïdes que contient notre plante nationale.

Cette activité agricole qui donne le tournis à toute une pléiade de responsables occupe  3% environ des terres cultivables au Maroc dont la majorité se situe dans son nord (55000 ha cultivés en 2019)...

Faut-il rappeler que la fibre de chanvre, très résistante, est utilisée depuis plusieurs millénaires dans le textile, le papier et le cordage ?

Ses graines ont été allouées à l’alimentation des animaux d’élevage.

Mais c’est grâce à sa propriété psychotrope avec un effet relaxant et euphorisant que le cannabis s’est imposé comme étant, de l’avis des experts, la drogue illégale la plus consommée dans le monde.

Sa consommation donne droit à l’euphorie, l’insouciance, accroît la 

sociabilité et les perceptions sensorielles tout en se sentant créatif et joyeux avec une envie de rire souvent incontrôlable.

Aujourd’hui, son implication dans le domaine médical est reconnue grâce à son effet orexigène stimulant l’appétit des malades dénutris atteints de cancers notamment.

Les effets du Canabidiol (CBD) en pleine expansion dans le domaine médical tout particulièrement sont considérés par certains auteurs comme semblables à la découverte des antibiotiques.

Le champ d’action s’élargit de jour en jour comme aurait été tenté de dire le dramaturge allemand Bertolt Brecht.

La liste s’allonge de jour en jour et englobe d’ores et déjà et en vrac, la lutte contre 

certaines maladies cardiovasculaires, une multitude de douleurs et inflammations, la fibromyalgie, la sclérose en plaque, le Parkinson, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin dont essentiellement la maladie de Crohn, l’épilepsie, l’anxiété, le diabète, le cancer, l’alcoolisme, les nausées, l’arthrose rhumatoïde, l’angoisse, la dépression, le glaucome, l’Alzheimer... 

Sachant que le Maroc a voté favorablement pour une telle mutation réglementaire à Vienne, ne serait-il pas temps de légaliser cette substance dans notre pays et mettre à sa disposition les technologies les plus avancées ?

Une telle industrialisation transformerait une épine du pied dont souffre le Maroc en une opportunité historique pour son développement.

Pour cela, il suffit de mettre les cartes sur tables et de repousser définitivement l’hypocrisie sociale et intellectuelle qui abrutit, et pour de bon, l’ensemble de la population marocaine, toutes strates confondues.

En dépit de la politisation à outrance qui mine notre pays, le tabou a été enfin brisé le 11 mars 2021 date à laquelle le gouvernement marocain a approuvé un projet de loi visant la légalisation de l’usage médical et industriel du canabis.

N.B.:

L’excès de consommation du canabis entraînera inéluctablement des effets sur les fonctions cognitives en altérant la mémoire, l’attention, la concentration et la capacité de jugement tout en ralentissant le temps de réaction.

À consommer avec modération, serais-je tenter de dire.

Mais là, c’est toute une autre histoire...

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