ROLANDCASTRO,vieux pote, qui dit tout devoir à Lacan, et c’est vrai, s’est lié d’amitié avecOnfray, qui, lui, ne mange pas de ce pain-là : il se soigne tout seul àjaspiner, comme il s’astiquait frénétiquement dans sa jeunesse (communicationpersonnelle de l’intéressé, devant les caméras de Philosophie magazine). C’est dans le dernier Marianne.
« J’ai rencontré Roland Castro, on a fini par parlerpsychanalyse et politique ». Cela devait être joli, ça ! Celui quicroyait en Lacan, et celui qui n’y croyait pas. Castro en sortira-t-il onfrayïen, onfrayeur ? Ou Onfray lacanien ? - ce qu’à Dieu neplaise : ce serait couler le lacanisme à jamais.
Rosanvallon est le prince des « sociomanes » (Sollers),Onfray, le roi des Indignés. Hessel n’en est que le hérault, et il a trouvé sonbonheur auprès du dalaï-lama. Onfray a éprouvé le besoin de décrire par le menu,dans son blog, notre rencontre à l’initiative de Philosophie magazine, alors que j’ignorais qu’il avait pondu unlivre sur Freud, et quel livre ! On s’était bien gardé de me dire quellemarchandise j’aidais à vendre.
Il donne de cette rencontre une description désopilante, où un lionsuperbe et généreux (lui) considère avec sérénité un « vieux liondépoilu » (moi). Son intuition lui fait voir ce vieux « laborieusementcrispé des heures sur son stylo pour accoucher d’un bon mot publié un mois plustard par les amis du réseau parisien dans la presse ». Criant de vérité.Il faudrait tout citer de ce morceau d’anthologie (http://onfray.over-blog.com/article-hecatombe-sur-le-divan-48697192.html).
Il était spécialement intrigué par « une longue créature tout denoire vêtue, bottes et jupe courte » : c’était Clotilde Leguil,agrégée de philosophie, qui m’avait dit, la pauvre, son intérêt pour Onfray, etvoulait le voir de près. Elle a vu. De lui, je n’avais lu qu’un petit essai unpeu niais, et de troisième main, sur les cyniques, et un « CharlotteCorday » bravement favorable à l’idole royaliste, sous prétexte quec’était sa payse, et qu’elle en avait mis un coup à ce salopard de Marat. Ehbien, Marat valait mieux que la crapule contre-révolutionnaire. Clotilde n’en apas cru ses oreilles quand elle a entendu le penseur d’Argentan se recommanderdu Livre noir. Bon vent,Roland ! je te paye un canon si tu arrives à quelque chose avec cegaillard. Grand hâbleur, orateur de talent, mais nul de chez nul.
Gérald Andrieu, dans Mariannetoujours, le présente en « dompteur de fauves », « qui a réussi à faire tomber Freud de sonpiédestal.» Oh ! vous savez, Onfray ne dompte que les lions décatis commemoi, et assez confiants, ou assez cons, pour le recevoir chez eux, parce queMonsieur ne rencontre personne le soir, car il ne peut passer la nuit à Paris,m’a écrit l’excellent Alexandre Lacroix, et il lui faut retourner dare-darepioncer dans sa chez-soi, sinon il s’angoisse. Très Jean-Jacques, en somme.« Tu lui fais trop d’honneur », me dit Judith, qui lit par dessus-monépaule. Et son piédestal, Freud le lui a mis au c…
Pour lui, toujours dans Marianne,les normaliens sont lisses, et ne répondent pas aux questions. Oui, et lesNormands, eux, sont rugueux, et bien connus pour parler droit, n’est-cepas ? Onfray se vante d’avoir les pieds dans la glaise depuis cinq siècles,encore chez moi ce matin-là, et par quelle association d’idées en était-il venuà m’expliquer longuement pourquoi il ne fallait pas être antisémite ?
Je les connais, moi, les gars qui, au XXIe siècle, s’exhibent lessabots aux pieds depuis cinq siècles. Je n’ai aucune confiance dans cetteengeance. Ils finissent tous, tôt ou tard, par chanter le terroir, et parcracher la peur et le dégoût que leur inspirent les déracinés, les Parisiens,et les cosmopolites.
On se comprend très bien, Onfray et moi. Lui,« ultra-médiatique » (Mariannedixit), moi l’homme invisible des médias, qui va l’être un peu moins.Avant-hier, Onfray était pour Besancenot. Hier, pour Mélenchon. Aujourd’hui pour Montebourg, qui lui rend lapareille en célébrant « la force de l’analyse » du « philosophenormand ». Non, M. Andrieu, le philosophe normand, c’était Alain, né àMortagne-au-Perche, et il ne la ramenait pas tout les jours avec la Normandie.Est-ce que je la ramène, moi, avec le ghetto de Varsovie, où sont nés mon pèreet ma mère, et leurs parents depuis cinq siècles ? - et où l’esprit a tout de même soufflé avec uneautre puissance qu’à Mortagne-au-Perche et à Argentan - même si je ne veuxaucunement offenser les travailleurs normands qui ne demandent qu’à s’indigner sousla voix puissante d’Onfray, le révolté officiel de la République, si subversifqu’on l’entend tous les jours, me disait Carole, éructer sur les ondes.
C’est du toc. C’est unmaître à penser en toc et en fer blanc.