jcg (avatar)

jcg

Enseignant

Abonné·e de Mediapart

39 Billets

1 Éditions

Billet de blog 20 octobre 2012

jcg (avatar)

jcg

Enseignant

Abonné·e de Mediapart

Médias publics, la Refondation ? Après une lettre à Mme Aurélie Filipetti et une lettre à des élus de l'AN, du Sénat et au CSA

jcg (avatar)

jcg

Enseignant

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Des médias publics : la Refondation, c'est pour quand ?

Quelques semaines après que les résultats des élections de mai et juin 2012, l'élection présidentielle et les législatives, aient changé les personnes et les orientations politiques, j'ai adressé cette «Lettre» publique à l'attention de Madame Aurélie Filipetti, Ministre de la Culture et de la Communication. Dans cette lettre, comme tant d'autres, j'ai fait le constat que des médias de masse, privés mais aussi et surtout «publics», donc relevant des financements publics, connaissaient des fortes dérives vers des propagandes, en lieu et place de «l'information». 3 mois plus tard, face à l'absence de réponse de la Ministre et/ou de ses services, j'ai donc décidé de m'adresser à des élus : un élu de l'Assemblée Nationale, un élu du Sénat, et un service du CSA. Vous trouvez ci-dessous cette lettre. Entre temps, ces mêmes médias ont été l'objet d'une offensive, elle très médiatisée, d'une «Droite forte» et de l'extrême-droite qui réclame eux, d'une manière extrêmement partiale et inacceptable, que des médias très fortement marqués par des journalistes et des éditorialistes de droite, connus de tous comme tels, soient encore plus marqués à droite, au motif qu'il y aurait dans les médias des «journalistes de gauche» et que cette «droite forte» ne parviendrait pas à se faire entendre. Suite à la défaite de l'ex majorité présidentielle (mais même avant la fin de la campagne, lorsque des journalistes d'une chaîne pourtant très compréhensive avec cette droite politique, BFM TV, avaient été pris à partie lors d'un meeting et place du Trocadéro par des militants UMP), certains membres et sympathisants de ce camp ont estimé qu'elle s'expliquait par une propagande anti-leur candidat. Car, en effet, une certaine presse (citons l'exemple de Marianne) se faisait l'écho des décisions, de leurs conséquences, des comportements, des principaux dirigeants de cette ex majorité, et qu'elle donnait ainsi des échos, avec images et textes, aux sentiments négatifs d'une partie importante des citoyens, hostiles à ceux-ci.

Mais, POUR LE RESTE, les médias privés (comme BFM TV, mais aussi les radios), ET AUSSI les principaux médis publics, ou faisaient silence à des affaires, des enquêtes (les «révélations» de Médiapart ont été ignorées à plus de 50%), ou parlaient en terme élogieux des principaux élus de cette ex majorité, qui trustaient les antennes, les émissions, pour une raison ou pour une autre, pour un prétexte ou pour un autre. Sans qu'il y ait eu besoin d'engager le pays dans la voie aussi radicale de la Hongrie de M. Orban (des médias entièrement contrôlés et muselés qui interdisent l'expression de l'opposition), ces médias ont été aux ordres, que ce soit explicitement ou non, clairement ou non. Des émissions ont proposé des caricatures d'information, que ce soit la célèbre «C dans l'air » dont certains éditorialistes ont leur strapontin à vie, ou encore «L'ombre d'un doute» dans laquelle son principal animateur a repris les antiennes de l'extrême-droite contre la République, à propos de la Vendée et de Robespierre. Ce ne sont que des exemples, noyés dans tant d'autres, qu'il suffit d'un hasard pour subir un nouveau haut-le-cœur. En 1981, M. Elkabbach, bien connu des citoyens-téléspectateurs parce qu'il s'était fait le chantre d'un giscardisme réputé «génial et flamboyant» a trouvé refuge dans une rédaction privée après que les nouveaux élus aient fait comprendre qu'il ne lui était pas possible de rester après tant de services rendus. Quelques mois après l'élection présidentielle et les élections législatives, aucun principal responsable de médias qui ont orchestré pendant des mois, et à travers un ensemble de moyens, une propagande à la fois pour des hommes, des «idées», sociales, politiques, économiques, n'a été prié de changer d'air, ou de faire autre chose, et du coup, tout continue comme avant.

A la tête de France Télévisions, M. Pfimlin a bâti une grille qui prolonge la précédente, et s'est même permis le luxe de virer Mme Pulvar, au motif qu'elle est la compagne de M. Montebourg, quand cela ne l'a jamais gêné de confier à l'épouse d'un ex Ministre de droite, Mme Béatrice Schönberg, une émission, y compris en pleine période de campagne électorale (non officielle, mais 12 mois avant de telles élections, un pays est en campagne électorale). Avec cette rentrée, les provocations se sont accumulées, notamment avec les promotions de M. Bern, porte-parole de la noblesse européenne, qui prétend faire des émissions d'Histoire alors qu'il s'agit d'hagiographies indécentes typiques des voix de la «Cour» - du Roi, comme si la République n'avait pas supplanté et fait disparaître la royauté. Au cours des émissions du vendredi soir 19 octobre 2012, des membres de la rédaction de Médiapart et du syndicat SPIIL ont indiqué que, ce même jour, alors qu'ils faisaient connaître leur «Manifeste pour un nouvel écosystème de la presse numérique», aucun représentant du Ministre de la Culture et de la Communication, mais plus largement, aucun représentant du gouvernement, n'est venu, malgré les invitations envoyées et reçues. Il faut donc constater que, dans ce domaine comme dans d'autres, la consultation réellement démocratique n'est pas de mise. Mais les nouveaux élus choisissent, consciemment ou non, de protéger un système médiatique et ses principaux animateurs-bénéficiaires qui, pourtant, utilisent celui-ci pour les mettre en cause avec parfois une véhémence sidérante. Les différents Ministres entendent-ils la manière dont tel ou tel «journaliste-star» se permet de caricaturer leurs décisions et leurs actions, ou pire encore, se permet de mentir en simplifiant parfois à l'extrême ? L'indépendance des médias n'existe pas, mais son motif ne doit pas être utilisé pour permettre que cette négation perdure, et s'incarne, d'une manière paradoxale et scandaleuse, dans l'expression de quelques journalistes qui entendent se servir de leur place pour mener leur propre politique contre celles et ceux qui ont été élus et ne leur conviennent pas. Mais si le système est si verrouillé, c'est que derrière ces médias et ces journalistes «connus» qui trustent, par le cumul, tant de places, il y a une Bourgeoisie parisienne qui ne veut pas permettre que ces médias ne soient pas à son seul service exclusif, parce qu'elle sait que l'ouverture médiatique se fera à son désavantage. LA ENCORE, comme dans tant d'autres domaines, les élus «socialistes» ont un choix, historique et décisif à faire. Ils ne doivent pas ignorer que leurs opposants, adversaires, ennemis comme à ceux de l'ensemble des citoyens entendent les renvoyer chez eux et imposer aux citoyens une politique à la Orban.

L'inaction d'un ou d'une responsable qui peut et doit influer sur les situations actuelles reviendra à de la collaboration, passive ou active, avec ce qui pourrait suivre et qui pourrait être dramatique. Avant de décider et de décréter, il faut y travailler. C'est ce que le Ministre de l’Éducation a estimé nécessaire, même si le travail sur la «refondation» a été trop rapide. La Ministre de la Culture et de la Communication n'a pas fait connaître qu'elle souhaitait engager un tel travail, pourtant essentiel à un secteur aussi déterminant pour le présent et l'avenir d'une nation. Si elle devait trop tarder à engager ce travail, il faut souhaiter que des forces démocratiques importantes s'y engageront ensemble (le SPIIL, les Indignés du PAF, Acrimed, Arrêt sur Images, etc). Ils y sont appelés ici aussi, même s'il s'agit d'un appel individuel. Et si ce nouveau texte, comme la première lettre et la seconde ne proposent pas un ensemble de réformes et d'innovations «clés en main», c'est que précisément cet ensemble doit provenir de ce que seront ces échanges, ces dialogues.

Mais pour que ce texte ne paraisse pas seulement faire des constats, négatifs et critiques, il faut donc évoquer des pistes de solutions pour ces médias publics. Il y a plusieurs domaines différents : les programmes, les moyens et les heures de diffusion, les condition de travail des salariés. Pour les programmes, les médias publics devraient avoir une obligation d'équilibre entre les programmes de divertissement (quel que soit le programme) et les programmes de connaissances, mais aussi de débats ouverts. Une émission en direct au minimum hebdomadaire et d'une durée suffisante pour que les échanges aient un sens (entre 3 et 4 heures) devrait être diffusée, avec des invités multiples, différents et notamment «inconnus» (celles et ceux qui jusqu'ici ne sont jamais passés sur une chaîne de télévision, sur une radio, etc). Les émissions de connaissances à tendance polémique (une période historique) devraient avoir l'obligation d'être élaborées et réalisées avec une pluralité d'intervenants, de différents statuts, savants, élus, citoyens. Les radios publiques devraient avoir l'obligation de diffuser un quota à déterminer de jeunes et de nouveaux artistes que les autres radios ne diffusent pas. En effet, il n'est pas normal que celles et ceux qui vendent le plus, d'albums, de titres, soient les plus diffusés sur les radios et que dans le même temps certains ne bénéficient d'aucune diffusion. Les rédactions qui élaborent et diffusent des JT devraient rassemblés des journalistes avec des profils différents, avec des expériences dans des médias eux-mêmes différents (et les nouveaux médias d'Internet, Médiapart, Rue89, devraient en faire partie). Contrairement à ce qui peut être dit par des «théoriciens» et «historiens» des médias, l'âge d'or des médias n'est pas derrière nous (il ne faut pas confondre France-Soir avec «les médias » !), mais devant nous si les médias fonctionnent sur des croisements, de moyens, de personnes, à l'instar de ce qu'Internet fait déjà. Croisement, telle devrait être l'une des principales notions de l'interprétation et de la production de ces nouveaux médias, à l'instar de ce qui, dans les enquêtes judiciaires, permet d'obtenir des preuves. Quant aux conditions d'emploi sur France Télévisions ou Radio France, une limitation du cumul des activités/revenus devrait être obligatoire, histoire de ne pas permettre que des «cadres» des médias privés viennent recevoir des émoluments conséquents et supplémentaires sur les médias publics. Enfin, les salaires de ces médias publics devraient être disponibles sur les sites de ces médias.

Jean-Christophe Grellety – L'Action Littéraire –

http://jeanchristophegrellety.typepad.com

Cet appel est publié le sameid 20 Octobre 2012 sur le site de Médiapart, le Dimanche 21 Octobre sur le blog de l'Action Littéraire. 

-----------------------------------------------------------------------------------

La lettre envoyée fin juin 2012 : 

A l'attention de Madame Aurélie Filipetti,

Ministre de la Culture,

3 rue de Valois - 75033 Paris Cedex 01

Madame La Ministre,

Dans un monde où il faut toujours justifier de plus que son existence lorsque nous nous adressons à une personne titrée, c'est en tant que citoyen, auteur, intellectuel, que je me permets de vous écrire, quelques jours après la confirmation de votre désignation à la tête du Ministère de la Culture et de la Communication. Pour une partie des problèmes (les droits d'auteur des livres publiés), j'ai écrit une seule fois au précédent Ministre de la Culture, sans jamais recevoir la moindre réponse, mais nous sommes nombreux à avoir compris que le précédent gouvernement et la précédente majorité étaient peu à l'écoute des constats, des analyses et des propositions des citoyens. On nous dit, parce que ce fut un slogan de campagne, parce que c'est une affirmation répétée publiquement, que «les choses changent», et c'est aussi ce que j'entends savoir, mais aussi vous proposer. Faire changer les choses, c'est, nécessairement, agir sur la ou les structures fondamentales, et non agir aux marges. C'est bien pourquoi de prétendues «réformes» du gouvernement et de la majorité de 2007 à 2012 n'en étaient pas, puisqu'elles ne modifiaient en rien les structures fondamentales des différentes parties du système économique, comme la loi sur les retraites en est le symbole hélas parfait et dramatique. La centralisation française des forces politiques et économiques à Paris est notamment celle des «médias». Parmi ceux-ci, les chaînes de télévision occupent encore une place très importante. Publiques et privées, elles ont des obligations, communes et différentes, dans des cahiers des charges, mais aussi via la déontologie journalistique, et elles perçoivent des financements publics ou des moyens pour mener leurs activités. Dans leur «diffusion», ce qu'elles appellent «l'information» occupe une place quotidienne importante : journaux télévisés (JT), émissions de reportages, de commentaires de l'actualité, etc. L'élaboration et la nature de cette «information» s'inscrivent dans ce que beaucoup appelle le «pluralisme ». Parce qu'il y a des différences de statuts et de droits, je ne vais pas mélanger indistinctement les chaînes et radios publiques et privées, et donc je vais écarter de ma réflexion celles qui échappent à l'influence de la puissance publique. Les chaînes télévisuelles du service public sont, elles, censées incarner et faire progresser et ce «pluralisme», et les connaissances.

Or, que ce soit à l'occasion des JT comme de certaines émissions connues et importantes du service public, le pluralisme et la diffusion de réelles connaissances sont bafoués, ignorés, méprisés, et en lieu et place de «l'information», il y a une propagande. Ces faits, de propagande, ont été établis, dès 2002, par M. William Karel, et de nombreux observatoires et observateurs, comme Acrimed, et d'autres, continuent de les établir. Les élus changent, mais cette propagande ne change pas. Comme si cette «superstructure» médiatique, parisienne, était autonome, indépendante, n'avait de compte à rendre à personne, et pouvait faire ce qu'elle veut. Ferait-elle entièrement des actions parfaites, nous ne pourrions que nous taire et applaudir, mais il n'en est rien. Depuis la disparition de la célèbre émission de Michel Polac, le direct a été banni de la diffusion : une libre parole civique semble faire trop peur à celles et ceux qui entendent que ces médias servent seulement à donner des échos limités à des sujets limités. Certaines émissions diffusées par le service public sont caricaturales : l'émission «C dans l'air» sur France 5 propose de pseudo débats, entre, ou les mêmes interlocuteurs, de semaine en semaine, de mois en mois, ou les mêmes affirmations, politiques, économiques, problématiques et contestables. M. Calvi, animateur de cette émission, incarne là aussi jusqu'à la caricature le cumul des attributions, et je n'en doute pas, des revenus. Or si le cumul politique fait l'objet, grâce à la nouvelle majorité que vous incarnez, d'une limitation nouvelle et essentielle au renouveau démocratique, celui-ci est également dépendant d'une limitation du cumul médiatique, d'autant qu'une telle limitation est également à même de participer à la diminution du chômage. Les récentes élections ont vu, le soir du 6 mai comme les soirs des 10 et 17 juin, la parole démocratique être confisquée par des médiacrates parisiens connus pour leurs obsessions. Il y a quelques années, de telles élections donnaient lieu à la circulation de la parole, avec notamment la participation de citoyens, intellectuels, artistes, qui apportaient leurs sentiments et leurs points de vue, propres et différents. En fait, la parole publique, sociale, est interdite d'antenne, et elle est confisquée au profit des mêmes : qui sont à la tête ou membres de telle ou telle rédaction de la presse écrite, qui sont sur les radios, etc. Hélas, le pire est à craindre, et il existe. Depuis plusieurs semaines, la rédaction de France 2 diffuse des reportages partiels, partiaux et parfois mensongers, sur des faits majeurs de la politique nationale et internationale. Nos pauvres amis Grecs ont ainsi l'objet de multiples courts reportages dont les principes et les conclusions étaient dictés, sont dictés, par la vulgate néo-libérale. Les termes utilisés par celles et ceux qui ont imposé des plans de destruction de l'économie grecque et des droits sociaux ont été repris : les «plans d'aides» se sont succédés, mais ils auraient échoué, parce que les Grecs seraient des fainéants, des tricheurs. Imagine t-on un instant ce que nous penserions si pour expliquer les difficultés de la France, des médias allemands expliquaient que les Français sont pour l'essentiel des gens qui travaillent le moins possible, sous-déclarent le travail, etc ?

Notre sentiment répondrait immédiatement, mais au-delà, les faits économiques démontreraient que les travailleurs français travaillent beaucoup et bien (la «productivité»!) et plus que les Allemands, qu'il existe des fraudes, mais heureusement limitées, et que si elles sont encore trop nombreuses, c'est que, par exemple dans le monde du travail, l'Inspection du Travail a des effectifs notoirement trop faibles, le Droit du Travail a été constamment affaibli depuis dix ans. Si encore les affirmations, partielles, partiales, d'une telle rédaction étaient contrebalancées par des interlocuteurs qui pourraient apporter des éléments supplémentaires de réflexion, mais le service public est tellement verrouillé que ces éléments ne sont jamais exprimés et donc audibles. Les chaînes de télévision régionales sont, dans le domaine, pire encore. «L'information» y occupe une place superficielle. Les problèmes économiques sont ou totalement évacués ou seulement évoqués. La parole libre civique est inexistante. Les débats politiques pour les récentes élections ont curieusement écarté à priori des représentants d'une partie de la gauche. La sous-information côtoie la désinformation, et pire, le mensonge. Une émission consacrée à «l'Histoire» par France 3, « L'ombre d'un doute », présentée par Frank Ferrand, n'a pas hésité à mentir sur les Révolutionnaires, Robespierre, en reprenant à son compte les thèses d'historiens royalistes catholiques qui accusent ceux-ci d'avoir, en Vendée, perpétré un «génocide». Toute l'émission était à charge, contre la Révolution, et le plateau des «experts» qui suivait le reportage était à l'unisson de cette propagande. M. Calvi a consacré un «C dans l'air» à l'anniversaire de la chute de l'URSS, avec des interlocuteurs tous anti-communistes ! S'agit-il de vous demander que des émissions sur un tel sujet soient organisées avec des interlocuteurs tous pro-communistes ? ! Non ! Il s'agit que le débat public existe réellement, sérieusement, que le pluralisme soit donc sur les antennes, réel, et pour qu'il le soit, il faut, certes, des hommes et des femmes qui dirigent ces services publics avec ce souci, mais aussi des règles nouvelles. Nous sommes arrivés au point de rupture du décalage entre des médias de masse, y compris du service public, qui pratiquent superficialité et propagande, et Internet, les réseaux sociaux où, sur tel ou tel sujet, se trouvent les seuls documents sérieux, complets. Le système médiatique parisien est gâteux. L'impulsion décisive pour le changement vous appartient. Il en va de même pour le monde littéraire, ses conditions, ses règles, ses financements. La mise en place de la loi et de la structure dite Hadopi prétendait obéir au souci du respect du droit d'auteur. C'est sur ce sujet que j'ai écrit à Monsieur le Ministre de la Culture qui vous a précédé et que je n'ai reçu aucune réponse. C'est que les auteurs des livres publiés perçoivent des droits minorés au regard de ce que les éditeurs leur doivent. Pourquoi ? Les éditeurs sont juge et partie de l'établissement annuel de la part qui revient aux auteurs. Il est donc facile, et c'est ce qui se passe, pour un éditeur, ou de déclarer des ventes nulles, ou insuffisantes (selon le contrat), ou de déclarer des ventes inférieures aux ventes réelles.

Il existe des solutions pour, grâce à l'électronique, avoir des chiffres précis et incontestables, des ventes, dont l'établissement devrait être confié à un organisme gestionnaire indépendant des éditeurs. Enfin, une part non négligeable des très importants bénéfices des éditeurs français réside dans la publication d'ouvrages pour lesquels ils n'ont pas de droits d'auteur à payer. Dans une telle situation, ne peut-on imaginer qu'une taxe spécifique soit prélevée afin de financer la vie des auteurs les moins fortunés ?et des jeunes ? Ces dernières années ont été marquées, dans les deux domaines pour lesquels je vous interpelle, la communication et la littérature, par un immobilisme durable, profond. Le monde parisien concoure à geler les situations, parce qu'il existe beaucoup et trop de rentiers dans ces deux secteurs. Il vous appartient de décider ce que sera, ou pas, votre influence sur ces situations.

Jean-Christophe Grellety

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

 La lettre envoyée début octobre 2012 à des élus : de l'Assemblée Nationale, du Sénat

et à un service du CSA : 

Messieurs, mesdames,

Je vous remercie de trouver ci-joint une copie de la lettre que j'ai adressé cet été à Mme Aurélie Filipetti, Ministre de la Culture et de la Communication, concernant le pluralisme médiatique en France, ainsi que sur les droits d'auteur. Postée fin juin, je n'ai reçu ni accusé de réception de ce courrier ni réponse. Expression personnelle, je sais qu'elle exprime des faits collectifs, des sentiments et des idées partagés par un nombre important de citoyens. En effet, j'interpelle Madame la Ministre sur des faits, des comportements récurrents dans les médias publics où la propagande et le mensonge remplacent trop souvent «l'information» et surtout la connaissance. Il y a quelques jours, la rédaction de France 2 vient de reconnaître qu'elle a, dans des reportages consacrés au Venezuela, énoncé des erreurs grossières.

Mais il y en a souvent, de plus en plus souvent. Les divers tropismes à partir desquels les rédactions des médias publics interrogent des faits collectifs, nationaux, internationaux, majeurs, interrogent, mais aucun garde-fou ne permet de les interroger et de limiter leurs effets. Depuis plusieurs mois, des propagandes terribles et scandaleuses ont remplacé «l'information» : la Grèce est-elle en crise ? C'est la faute des Grecs, peu travailleurs et tricheurs, NOUS DISENT DIFFERENTS REPORTAGES ET LEURS AUTEURS. Les entreprises françaises connaissent des difficultés ? C'est la faute des salaires trop élevés des salariés les plus modestes (!) auxquels il faut s'attaquer d'urgence par un choc de compétitivité (M. Lenglet sur France 2 ne se gêne nullement pour reprendre le discours du Medef sur le sujet). La délinquance en France est systématiquement associée à des citoyens et des jeunes qui ont une autre couleur que celle dominante. Le Front National ne dit pas autre chose. Ce que des médias privés, propriétés de personnes très riches, disent, via des journalistes très orientés (et qui sont désormais très connus comme tels, Messieurs Brunet, Zemmour, Duhamel, etc, puisque la liste est très longue), les médias publics le disent aussi, et c'est parfois pire. Fort heureusement pour moi, les JT, comme les autres émissions d'information, sont archivés, et je suis donc tout à fait disponible pour faire avec d'autres un travail d'écoute, d'étude, d'analyse.

J'entends donc, en tant que citoyen, ulcéré d'assister à un tel déferlement d'approximations, de raccourcis, de mensonges ET de silences (car des faits et des sujets majeurs sont eux ignorés!), vous interpeller sur la situation dramatique de cette machine médiatique essentiellement parisienne qui produit de manière globale une sous-information scandaleuse. Celles et ceux qui ne sont ni compétents ni amoureux des métiers qui permettent d'élaborer ces JT et ces émissions peuvent faire autre chose. Il est de la responsabilité des élus, et notamment de la majorité élue, puisque ces médias publics sont financés par les impôts, de travailler sur les conditions et les perspectives de ce qui sera le premier pluralisme audiovisuel, étant donné qu'il n'a jamais existé jusqu'ici.

Vous le lirez, mais je préfère le dire et le redire ici : je ne demande pas qu'une propagande de gauche remplace une propagande de droite. Je demande, je souhaite, que, étant donné la complexité des faits vitaux, politiques, économiques, les responsables de ces médias ne tentent pas d'imposer des sentiments, des idées, des convictions, mais permettent aux citoyens et aux citoyennes de se faire librement leurs sentiments et leurs conclusions sur les faits qui ont une importance collective. On nous assène assez que nous vivons en démocratie pour que cela devienne, enfin, le cas, dans cette structure aussi décisive pour le présent et l'avenir de notre pays et du monde. Dans cette lettre, j'ai été amené à citer des cas particuliers. Je veux pour conclure ma lettre en extraire un : le cas Robespierre. Les historiens sérieux le disent : Robespierre n'a jamais été le meneur et l'âme damnée de la Terreur. Bien des citoyens et des organisations civiques demandent que sa réhabilitation devienne officielle. Une émission qui voudrait traiter sérieusement de la Révolution devrait les entendre, aussi, et d'autres, alors que l'émission signalée dans cette lettre, de M. Frank Ferrand était dramatiquement univoque. Faudrait-il faire une émission de réhabilitation ? Cette réhabilitation, c'est aux responsables de ces associations et aux élus de l'engager, où et comme ils le veulent, mais un programme de la télévision publique devrait aborder les faits de la Révolution avec l'ampleur nécessaire, avec suffisamment de participants pour qu'il y ait des débats, et pas le matraquage d'une propagande démocratiquement inacceptable.

Quant aux problèmes des droits d'auteur, la partie finale de cette lettre à Madame Aurélie Filipetti est assez claire pour que je n'ai rien à préciser dans cette lettre d'introduction.

J'ai décidé de vous adresser une telle lettre croisée parce que vous êtes, élu à l'Assemblée Nationale, élu au Sénat, professionnel(le) au CSA, concerné directement par le problème majeur que j'expose et pour lequel j'attends que la nouvelle majorité prenne des décisions historiques et fondamentales, parce que je pense que la considération de ces problèmes ne peut être cloisonnée.

En attendant de vous lire ou de vous écouter, je vous prie d'agréer, mesdames, messieurs, l'expression de ma considération la plus respectueuse.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.