Le vote à l’assemblée par les députés socialistes du pacte de stabilité est présenté comme un succès pour le gouvernement et la France.
Outre le fait qu’il marque tout de même, sur le plan politique, une défection d’une quarantaine de députés socialistes, faisant passer la majorité approuvant le gouvernement sous la barre fatidique de la majorité absolue au parlement, il dénote incontestablement, au niveau économique, l’échec de la politique économique engagée depuis la dernière élection présidentielle.
Souvenons-nous, l’arrivée d’une nouvelle majorité pour gouverner la France devait se traduire par un regain de croissance, sans laquelle « rien ne sera possible ». Le gouvernement français, pour y parvenir, voulait renégocier le fameux TSCG avec l’Allemagne, mais n’a obtenu aucune modification significative. Nonobstant cet échec, la croyance magique dans le retour d’une croissance mondiale, qui entrainerait celle de la France et permettrait le retournement de la courbe du chômage, a servi de cadre aux mesures de politique économique : hausse de la fiscalité pour maîtriser les déficits et revenir dans les limites imposées par l’Europe, tout en laissant les dépenses publiques continuer sur leurs lancées. Bref, la martingale : prendre aux riches pour combler les déficits, sans peser sur la consommation des ménages.
A l’arrivée, c'est-à-dire deux ans après, les résultats sont plus que décevants : les déficits dérapent toujours, malgré la forte augmentation des prélèvements, le chômage n’en finit plus d’augmenter et la substance économique de la France s’évapore en raison d’un manque de profitabilité, symptôme de notre manque de compétitivité : les grandes entreprises délocalisent leurs sièges sociaux, les jeunes diplômés prometteurs partent à l’étranger et ceux qui restent sont à la peine, quand ils ne déclarent pas faillite.
Dans un tel contexte le pacte de responsabilité et le pacte de stabilité montrent une réelle inflexion de la politique économique du gouvernement, marquée par l’arrivée de Manuel Valls à la tête de l’exécutif : celle de respecter les engagements européens de la France en redonnant la priorité à la rentabilité des entreprises et en cherchant des marges de manœuvres par la baisse de la dépense publique et non plus par la hausse des prélèvements.
On ne peut que saluer ce changement salutaire dans la direction de la politique économique de la France. La question en suspens est : n’est ce pas trop peu et n’est-il pas trop tard ? Trente milliards d’allègement des charges patronales d’ici 2017, alors que les prélèvements sociaux n’incombant pas aux entreprises s’élèvent entre 100 à 120 milliards chaque année, ne renversera pas significativement le déficit de compétitivité des entreprises françaises.
En l’absence de croissance il est très difficile de mener une politique de l’offre, parce que les revenus sont quasi constants et tout prélèvement pratiqué à un endroit, c’est un manque de dépense ailleurs. Autrement dit, la baisse des prestations sociales ou de la rémunération des fonctionnaires, c’est autant de moins qui sera dépensé dans l’achat des produits et services fournis par nos entreprises. Il ne sert à rien de baisser les charges des entreprises si cette baisse est alimentée par une ponction sur le budget des ménages. C’est pourquoi la mise en place d’une politique de l’offre, qui consiste, rappelons le, à ce que les ménages subventionnent la rentabilité des entreprises, ne donne des résultats positifs que si les prélèvements opérés sont contrebalancés par une politique monétaire plus expansionniste qui redonne sous forme monétaire le pouvoir d’achat perdu du fait des restrictions budgétaires. Le gouvernement l’a bien compris, puisqu’il souhaiterait renégocier l’orientation de la politique monétaire de la BCE pour accompagner la mise en place du pacte de stabilité.
Il faut espérer, que contrairement au TSCG, il y parvienne, car la politique économique du gouvernement est dans une nasse : la France a épuisé ses marges de manœuvre, et ne peut plus se redresser seule. Sans un apport extérieur qui viendrait insuffler un vent nouveau, l’économie française va continuer sa lente descente aux enfers.