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Billet de blog 12 février 2014

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La France se trompe-t-elle encore de politique ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le pacte de responsabilité est présenté par les commentateurs comme la marque d’une inflexion de la politique économique française qui s’orienterait, enfin, vers une stratégie de l’offre, dont la caractéristique essentielle est de donner la première place à l’entreprise, l’idée étant que des entreprises prospères et florissantes sont les seules à pouvoir faire baisser durablement le chômage.

Si l’on ne peut que se féliciter de voir le gouvernement mette au centre de ses préoccupations la santé des entreprises, la question se pose de savoir si ce tournant n’intervient pas trop tard.

En résumé, et pour caricaturer, la politique de l’offre consiste à alléger les charges des entreprises pour les rendre profitable afin que se constitue un cycle vertueux où, pour se développer, les entreprises investissent et embauchent afin de satisfaire la demande croissante que leurs clients leur adresse, en raison du développement de nouveaux produits que l’investissement a fait naître.

C’est bien ainsi que cela s’est passé en Allemagne. Mais alors qu’une telle politique aurait été envisageable au début du quinquennat, l’est-elle encore aujourd’hui ? En effet si au début du quinquennat les dépenses publiques avaient été immédiatement tenues, les hausses d’impôts qui ont été décidées depuis auraient pu être consacrées à restaurer les marges des entreprises.

Mais aujourd’hui comment mettre en œuvre une telle politique ?

Il faut tout d’abord rappeler que les entreprises n’embauchent pas parce que leurs marges s’améliorent. Elles embauchent si la demande qui leur est adressée ne peut plus être satisfaite avec le personnel en place. Autrement dit, au niveau micro-économique, ce n’est pas la rentabilité qui déclenche l’embauche mais le supplément de demande.

Or, tout allègement des contributions payées par les entreprises se traduira soit par un prélèvement accru sur les ménages, soit par un arrêt des prestations versées. Dans tous les cas cela entrainera une baisse du pouvoir d’achat, donc une diminution de la demande adressée aux entreprises.

Le principe du donnant-donnant du pacte de responsabilité, fondé sur un engagement d’embauche contre l’octroi d’une baisse des charges, n’a pas de sens d’un point de vue économique, car ce n’est pas ainsi que cela fonctionne au niveau de l’entreprise. Si un restaurant de pizza n’a besoin que d’un pizzaiolo  pour confectionner les pizzas consommées par sa clientèle il n’en embauchera un deuxième que si le nombre de client augmente de telle façon qu’un seul pizzaiolo ne parvient plus à fournir tous les clients. Sinon une amélioration de la rentabilité ira renforcer la trésorerie de l’entreprise qui s’en servira pour se désendetter ou améliorer les rémunérations du personnel en place.

Toute politique consistant à restreindre le pouvoir d’achat n’a de chance de réussir que si cette perte de revenus est compensée, au niveau macro-économique, par d’autres mesures, comme un déficit  budgétaire accru ou un assouplissement monétaire, instruments dont le gouvernement ne dispose plus, les déficits ayant, semble-t-il, atteints leurs limites, et l’euro étant gérée de façon restrictive.

En résumé, le débat actuel autour des contreparties demandées aux entreprises, est un débat qui tourne à vide. Il s’agit d’un piège intellectuel, puisque ce n’est pas ainsi que les choses fonctionnent.

Il n’en demeure pas moins qu’il reste crucial d’améliorer les marges des entreprises françaises, car elles sont tellement basses qu’elles pèsent sur l’investissement privé, les capacités de production ne se renouvelant pas, obérant la capacité de l’économie française à assurer un avenir économique à sa population et un avenir à la France.

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