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Billet de blog 20 avril 2013

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La politique budgétaire française : entre mise sous tutelle et mensonge public ?

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Il n’a été relevé par aucun média que les prochains projets de budget de la France sont, pour la première fois depuis la libération, soumis à appréciation préalable de la Commission européenne, c'est-à-dire une entité étrangère à notre territoire national.

Certes, cette règle s’applique à tous les membres de l’Union européenne, mais sa signification prend tout son sens à la lecture du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l'union économique et monétaire, plus connu sous l’expression de la « règle d’or » qui stipule dans son article 3 : « Les parties contractantes appliquent les règles énoncées au présent paragraphe:  a) la situation budgétaire des administrations publiques d'une partie contractante est en équilibre ou en excédent. »

Les choses ne peuvent être dites plus clairement et la France ayant ratifié le traité s’engage à s’y tenir.

Certes le paragraphe b stipule quant à lui : « La règle énoncée au point a) est considérée comme respectée si le solde structurel annuel des administrations publiques correspond à l'objectif à moyen terme spécifique à chaque pays, tel que défini dans le pacte de stabilité et de croissance révisé, avec une limite inférieure de déficit structurel de 0,5 % du produit intérieur brut aux prix du marché. »

Passons sur la signification exacte de ce paragraphe qui agite les experts, quant à la définition précise des termes employés, pour retenir l’idée que le déficit affiché doit être séparé entre déficit structurel, qui peut atteindre 0,5% et le déficit conjoncturel qui représente la différence. Ainsi concernant le déficit français de 3,7% si le gouvernement français parvient à démonter que 3,2% du déficit correspond à un déficit conjoncturel, il ne sera pas sanctionné par la Commission européenne.

L’objectif du gouvernement, à travers la présentation de son programme de stabilité, document qui doit être transmis chaque année au mois d’avril à la Commission européenne, consiste à convaincre cette dernière que la stratégie et la trajectoire à moyen terme des finances publiques françaises « correspond à l'objectif à moyen terme » de notre pays, tel qu’il a été fixé par notre Président, à savoir le retour à l’équilibre des finances publiques à la fin de sa mandature.

Comment y parvenir ? La première solution a consisté, pour amadouer Bruxelles, à retenir les prévisions de croissance de la Commission, à savoir pour 2013, 0,1% de croissance, bien loin des 0,8% retenus par Paris pour l’élaboration de son budget. Certes ces chiffres, quelque part, sont minuscules et se trouvent sans doute dans la marge d’erreur propre à toutes les statistiques. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une division par huit des hypothèses ! Autrement dit quelqu’un se trompe forcément, ou trompe autrui.

Evidemment comme 0,1% est particulièrement faible le gouvernement table sur 1,2% de croissance en 2014 et sur 2% pour les années suivantes, ces progressions permettant de démontrer que la France, sur la durée, respectera ses engagements. La question est : faut-il y croire et ces chiffres sont-ils sincères ? Cette question est d’autant plus légitime que depuis que la gauche est au pouvoir, soit maintenant environ 10 mois et demi, le gouvernement n’a cessé de revoir ses prévisions de croissance et de déficit.

Or, les conseils d’entreprises qui sont en prise directe avec les TPE et les PME constatent un effondrement de l’activité. Comment peut-on encore tabler sur des chiffres en croissance ?

Le Haut Conseil des finances publiques, créé dans le respect des dispositions du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire (la règle d’or), et dont on avait pu craindre, compte tenu de son organisation, puisque ses membres ne sont pas rémunérés, qu’il ne dispose d’un outils statistique propre, et que ses délibérations sont tenues secrètes, qu’il puisse ne pas avoir l’autonomie que lui accordait le traité, ne s’y est pas trompé. Il juge erroné les prévisions économiques. Notamment il ne croit pas à la prévision de 0,1% mais table plutôt sur une récession en 2013.

A un moment où le mensonge en politique fait débat il faut rappeler ce que Cahuzac a dit au Canard enchaîné : « On me dit que j'ai menti sur ma situation personnelle. Cela veut dire quoi? Qu'il y aurait des mensonges indignes et d'autres qui seraient dignes? Quand on ment sur ordre, et pour des raisons politiques, à l'Assemblée, est-ce digne? A ce compte-là, j'ai menti devant l'Assemblée sur la possibilité de réaliser 3% de déficit en 2013 ».

Les prévisions de Bercy sont-elles mensongères ? Evidemment il ne s’agit que de prévisions qui par définition peuvent être infirmées par les faits. Mais le plus grave n’est-il pas que le gouvernement s’illusionne sur ses propres prévisions contribuant ainsi à masquer au peuple l’ampleur des problèmes qui se posent ?

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