Décidément la France s’appauvrit à tous les niveaux et le débat politique et économique n’est pas en reste. Il est ainsi des sujets qu’il n’est plus possible d’aborder sereinement et rationnellement, car l’espace public et médiatique est constitué de tabous et de totems qui sont devenus incontournables et qui représentent aujourd’hui l’horizon indépassable de la bien-pensance française.
Ainsi a-t-il suffit au président du MEDEF de proposer en public la suppression de l’ISF pour s’attirer les foudres du pouvoir en place, du Ministre de l’Economie, pour qui il s’agit d’une « provocation », à la députée et porte-parole du Parti socialiste, qui dénonce les «coups de menton» et le «sabotage» du président du MEDEF.
Ces réactions démontrent, s’il en était besoin, le contresens de la politique actuelle du gouvernement, ou à tout le moins sa schizophrénie. Le gouvernement souhaite favoriser les entreprises mais ne semble pas vouloir que l’entrepreneur, lui, réussisse. Les commentateurs rappellent la réponse de Christophe de Margerie, le PDG de Total, décédé le mois dernier : « L'ISF, ce n'est pas un problème Medef, c'est un problème personnel ».
Certes, mais a-t-on jamais vu une économie fonctionner sans personne ? Autrement dit le pouvoir en place souhaiterait que les entrepreneurs soient suffisamment intelligents pour créer les produits et les activités de demain et soient simultanément totalement aveugles pour ne pas voir que l’Etat français à terme leur aura repris la majorité du capital qu’ils auront eu tant de mal à créer. Et à cet égard l’ISF n’est que la goutte d’eau qui fait déborder le vase des prélèvements sur le capital, mais quelle goutte d’eau !
Il est évident que la motivation des entrepreneurs est de s’enrichir et de se constituer un capital. Empêcher par des lois fiscales inadaptées l’accumulation de ce capital revient à détruire la croissance future, l’économie de demain et la création des emplois qui seraient, eux, réellement d’avenir.
Quel aveuglement, sinon quel contresens, que de vouloir une France prospère sans riches, ou un capitalisme sans capital !
Sauf à privilégier un capitalisme apatride, extérieur et lointain, en un mot anonyme, alors que le riche français est lui de proximité, il est donc identifiable et peut en conséquence porter la marque d’infamie de ceux qui n’aiment pas les riches, sauf à ne pas dépasser 4.000 € par mois de revenus.
Pourtant, différentes études ont montré que ce qu’il est convenu d’appeler le « capitalisme familial » avait des vertus particulières, dont la première est d’être ancrée à son territoire.
C’est la raison pour laquelle il serait judicieux d’écouter ce que dit le patron du MEDEF quand il déclare « Il y a un moment il faut dire L'ISF c'est dramatique pour le pays, ça détruit de l'emploi, ça détruit de la croissance » ou quand il remarque que « En 2014 je n'ai plus aucun concurrent patrimonial en France et j'ai toujours 40 concurrents patrimoniaux allemands qui vont très bien, qui se développent fantastiquement dans le domaine des connecteurs ».
Mais il est vrai, comme le disent les Ecritures : « Si un royaume est divisé contre lui-même, ce royaume ne peut subsister », et nous français il semblerait que nous n’ayons toujours pas refermé la division de 1789.