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Billet de blog 10 septembre 2011

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Mais où est donc passé Ben Laden

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Mais où est donc passé Ben Laden .

Oratorio tragi-comique

Par jean Baumgarten

Prologue

La scène est vide.Elle est légèrement éclairée. Un personnage habillé en noir entre. (Un homme ou une femme).

Voix du personnage :

Mesdames et Messieurs, nous venons d’apprendre une nouvelle extrêmement grave. A 9h15 aujourd’hui, c’est à dire il y a cinq minutes exactement, 10 minutes après qu’un avion civil ait percuté une des tours du World Trade Center, un deuxième avion à son tour, déjouant la vigilance de l’US Air Force, est entré brusquement dans l’autre tour, provoquant une catastrophe incroyable… Nous étions à nouveau, 60 ans après, à Pearl Harbour ! Il y a des milliers de victimes, des dizaines de milliers peut-être ! Du côté de la Présidence de la République c’est l’affolement. Nous sommes sans nouvelles du Président G.W.Bush. Que se passe-t-il donc ? Où sont passés nos valeureux pionniers ?

( Quelqu’un lui apporte un nouveau message : il le déplie et le lit.)

Les Etats-Unis d’Amérique sont en passe de devenir le pays le plus fragile du monde : on m’annonce qu’il y a quelques instants ( notre chaîne est la plus rapide et vous livre des informations quasi-instantanées) un troisième avion survolant la capitale fédérale Washington, s’est écrasé sur le Pentagone ! On ne connaît pas encore le nombre des victimes, mais il doit être considérable ! (Un nouveau papier est apporté au commentateur) :

Je vous livre une nouvelle information qui vient de tomber à l’instant même. Un quatrième avion vient de s ‘écraser dans la campagne près de Pittsburgh ! On suppose qu’une lutte extrêmement sauvage a opposé le personnel de bord au commando agressif , et pour la première fois, au prix de leur mort, les passagers de l’avion ont opposé une résistance efficace aux agresseurs.

N’oubliez pas Mesdames, Mesdemoiselles et Messieurs que la lessive Bahamas lave beaucoup, je dirais même lave beaucoup, très beaucoup ( voilà que je bafouille ) plus blanc que l’ensemble des autres lessives. Enfin il faut signaler également que le tabac au grain très fin, le Nevada, au meilleur goût, à la qualité excellente et au prix le plus attractif est en vente dans tous les bureaux de tabac de l’Union, dans toutes les drogueries, sans aucunes restrictions.

Je reviens maintenant sur les informations capitales que je vous ai déjà livrées. (Il reprend le papier de sa poche, mais ce n’est pas le bon, il marmonne, recherche dans une autre poche et retrouve le papier en question.) :

D’après un spécialiste du terrorisme que je ne nommerai pas ( vous comprenez bien pourquoi ), il s’agit d’une opération très puissante, ciblée, calculée depuis des mois ou des années, dans laquelle sont investis plusieurs centaines d’hommes, voire des milliers. Un premier nom revient à l’esprit : celui de Ben Laden, ce richissime Saoudien dont on est sans nouvelles depuis quatre ans et qui semble être actuellement en Afghanistan… Le gouvernement est extrêmement concentré sur ce qu’il convient de faire, et il nous assure de sa ferme détermination…. (il recommence à bafouiller) et … Comme disait le général Grant à un contradicteur, il ne faut pas cesser d’entreprendre tant qu’on a la force de le faire, et si on ne l’a pas il suffit de manger une boîte d’épinards « OK », car les épinards OK sont les plus frais, les plus raffinés,et conviennent parfaitement à la soupe, aux raviolis ainsi qu’au poisson fumé. ( Peu importe la marque du poisson fumé.)

( Le personnage s’apprête à continuer ce numéro, mais entre à l’autre bout de la scène un autre personnage, peut-être habillé de blanc, qui tient un autre langage, plus accusateur, moins simpliste) :

2ème personnage :

N’écoutez pas tous les mensonges proférés par cette personne ridicule… Ce sont en tout quinze à vingt cinq individus au maximum qui sont responsables des attentats terribles que nous venons de subir. Le gouvernement de G.W.Bush a intérêt à grossir démesurément la situation pour imposer des mesures elles-mêmes terroristes ! Il n’y pas tant de morts et de blessés qu’on le raconte ! A l’échelle d’un pays comme la Palestine cela ne fait qu’une trentaine de morts et aucun blessé ! Arrêtons de bêtifier et de prendre tous les Américains pour des crétins uniquement préoccupés par les petits problèmes de la vie quotidienne ! Restons calmes et comprenons ce qui se passe. Un petit groupe de gens apparemment sensés décident de sacrifier leur vie et celle de milliers d’innocents !

( Noir. Du fond de la scène apparaît une chanteuse. Elle chante.)

1ère chanson : introduction à Oussama Ben Laden…

1 -

Une fois dans un pays lointain

Dévasté par les guerres, la faim

On vit des religieux malins

Imposer leur loi aux humains

C’est ici qu’Oussama intervint

Il s’ennuyait en Arabie

Entre ses parents wahabites

Et les clients que l’on débite.

2 –

Ben Laden fut connu en fait

Vers l’année quatre vingt dix sept

En Somalie ce fut la fête

On mit des bombes au Consulat

Des Etats-Unis, ah quel ami !

Ben Laden est le plus grand frère

De tous les peuples désunis

D’Islamabad à Karachi

3 -

Des jeunes paumés de tous côtés

Sont venus en Afghanistan

Vivre la vie du combattant

Ah que c’est beau et très grisant

De mourir tout en se délectant

Entreles versets du Coran

Ah qu’il est doux etrassurant

De prendre le thé en priant.

4 –

En Palestine l’Intifada

Reprend et le p’tit Arafat

Dénoncé par Bush t^te de rat

Sharon s’en donne à cœur joie

On massacre on tue on décapite

les Israéliens contreça

Ne peuvent pas ne veulent pas

S’opposer aux massacres ici –bas.

5 – Refrain :

Dans la Palestine occupée A bas l’ennui des riches et des puissants

Par les colons israéliensIl faut sauver le monde tant pis pour les dépends

Le 11 septembre de New-York Rejoignons le combat des Talibans

A mis en joie tous ceux qui sont en loque Des Talis, des Talis, des Talis, des Talibans / Bis

Dans leurs réduits, tous ceux qui claquent

Dans leurs réduits, dans leurs cloaques

Tous ceux qui n’ont plus que leurs loques.

1er Acte :

La scène représente l’antichambre du Paradis ( ou quelque chose d’approchant).Personnages :

-La gardienne du lieu, Mme Locandiera qui n’a qu’un seul intérêt dans la vie : les pourcentages qu’elle reçoit pour chaque « locataire ».

-Un responsable de l’attentat du 11 septembre qui se demande dans quel endroit il est.

-Une sous-lieutenante des pompiers new-yorkais.

-Un jeune kamikaze palestinien.

Mme L. : ( Elle trie des papiers, griffonne, rature et rouspète mentalement.)

Nous sommes le 11 septembre, et il n’est pas encore 9H.15, et la direction m’informe que je vais recevoir plein de monde ! Toutes les sections locales sont averties : ce sera partout la même chose. D’un côté je ne suis pas mécontente : ça met du beurre dans les épinards, ce qui est très bon. Mais d’un autre côté ça fait du travail supplémentaire ; ils s’embêtent pas là haut, ils pourraient embaucher, au moins des supplétifs, ou bien des CDD. Ils sont vraiment rapiats, ou alors c’est leur cerveau qui est un peu fêlé ! Tiens voilà une première personne qui arrive… Et puis une seconde, une troisième … Approchez-vous, je ne vais pas vous manger ! Je ne suis pas Cerbère ! On m’appelle « Madame la Locandiera » ( je ne sais pas du tout pourquoi)… Mettez-vous en file indienne. Voilà, très bien. Comment vous vous appelez ? Non pas tous ensemble, chacun à son tour. ( Elle regarde la jeune femme aux yeux hagards qui s’approche,et qui se met à chanter) :

2ème chanson : une pompier new-yorkaise.

1 –

La vie allait comme elle allait

J’aimais ce métier, sa dureté

J’étais pompier dans la ville choc

Celle que l’on nomme New-York.

Et brusquement sans rien comprendre

Ni savoir je me suis retrouvée

Parmi les morts loin de mon homme

Loin de mes deux gamines.

2 –

Ah que la vie parfois si belle

Avait l’odeur douce du printemps

Et quand nous allions sur la plage

Nous tremper dans la mer

Jouer avec nos chersenfants

Et goûter le long des blanches grèves

Le chocolat de ma grand mère

Fabriqué au Missouri.

3 –

A mon âge sans savoir pourquoi

Ce n’est pas juste de se voir mourir

Pour une cause absolument

Ni choisie nivoulue

Dans cette enceinte de la mort

Jene vois aucune raison vraie

Pour m’en aller et me sacrifier

Ah c’est abominable !

Refrain :

J’étais pompier de ville, paim-pon paim pon ) Bis

J’étais pompier de ville.

Les nouveaux arrivants écoutent cette chanson et battent la mesure en se dodelinant. Le Kamikaze

Palestinien s’avance et dit :

Le kamikaze :

Je regrette profondément ce qui vous est arrivé. Croyez, Madame, à mes sentiments attristés.

3ème chanson : Chanson du kamikaze palestinien.

1 –

J’ai vingt cinq ans vis à Gaza

Je n’avais pas du tout d’espoir

Pas de travail

Rien pour ma gloire

Un vague diplôme de technicien

(J’ai décidé comme ça ma vie.) Bis

Refrain :

Allons enfants c’est le moment, de mourir grand, de mourir grand

Ma vie ne vaut pas tant d’êt’ parmi les vivants.

2 –

Dans ma famille qu’on dit nombreuse

Il y a neuf enfants dont moi

Je suis vraiment le plus âgé

Et j’ai donc tout seul décidé,

De sacrifier comme ça mon corps ) bis

3 –

Je me suis mis en habits blancs

J’ai enlacé tous mes cheveux

Je m’suis engagé en priant

A mourir en gardant mon sang

(Que dieu me prenne en pitié ) Bis

4 –

Je m’ suis alors fait sauter

Au pays qui est vis à vis

Dans une belle cérémonie

Où l’on ne m’attendait pardi !

(Inch’ Allah tout est bien fini ) Bis

Mme Locandiera :

Ca n’est pas drôle tout ça, mais maintenant que vous êtes là tout est fini que diable !

Le terroriste :

Vous avez dit « que diable » ?

Mme Locandiera :

C’est une manière de parler, que voulez-vous ! Bon, maintenant il faut vous dépêcher et remplir l’imprimé que je vous donne.

( Elle distribue à chacun un imprimé. A ce moment un terroriste sort du groupe et chante.)

4ème chanson : Oussama où ça ?

( La chanson est reprise en chœur par le groupe de mourants).

1 –

OussaOussa Oussama ( Bis)

Qui a abattu les tours

Oussama.

Qui a trafiqué un jour

Oussa,Oussa,Oussama

Quatre avions téléguidés

Oussa, Oussa,Oussama

Ont tenté l’infâmie

Oussa Oussa Oussama

Ont osé défier la patrie

Oussa oussa Oussama

Oussa Oussa, où ça ?

2 -

Oussa… etc.

C’est un cri qui hante encore

Oussama

A travers l’immeuble en ruine

Oussa … etc.

Le deuil oppresse le deuil mine

Oussa… etc.

On dit qu’un général

Oussa…etc.

Est mort ou se sent mal en point

Oussa… etc.

3 –

Oussa … etc.

D’où viennent donc ces sales tyrans

Oussa … etc.

Si nippés si élégants

Oussa…

Ils savent bien parler

Oussa…

Ou sont passées les tours jumelles ?

Oussa…etc.

4 –

Oussa … etc.

Ce nom fou revient sans cesse

Oussa etc.

Où sont les morts enterrés ?

Oussa…

La folie nous prend nous mène

Oussa..

Le spectre nous enmène

Oussa…

Toute la folie du monde nous entraîne

Oussa… etc.

Mme Locandiera :

Je ne voudrais pas me mêler de ce qui ne me regarde pas, mais qui est donc cet … Oussama ?

La sous - lieutenante des pompiers :

C’est un individu exécrable, un tueur de civils, un homme qui n’a aucune morale…

Le kamikaze palestinien :

C’est bien vrai tout ça !

Mme Locandiera :

Dépêchez -vous de remplir vos papiers, je ne suis pas à votre disposition !

La sous-lieutenante :

Je ne me souviens plus comment on écrit « explosion » : c’est avec un s ou un z ?

Tous :

Ca n’a aucune importance ! ( Ils se regardent et se mettent à rire. Le téléphone sonne : Mme Locandiera répond :)

Mme Locandiera :

Entendu Monsieur, bien sûr Monsieur, je vous en prie Monsieur, au revoir Monsieur…

( S’adressant au groupe : ) On m’annonce que pour le moment, le paradis est complet. Un peu de patience s’il vous plait !

Noir. Tous les personnages se tiennent par la main et chantent la chanson des morts pour rien :

5ème chanson : chanson des morts pour rien…

1 –

Ils ont au début annoncé

Six mille morts en vérité

Puis le chiffre a bientôt été

A cinq mille ramené

Enfin quinze jours après

on en a vraiment trouvé

Deux mille neuf cents à peu près

Refrain :

Où sont passés crénom de dieu

Tous ces avions qui sont en feu

Où sont passés tous ces baveux

C’est tout à fait, tout à fait honteux !

2 –

Les profiteurs de tous métiers

Ont de vraies larmes pleurées

Mais quand Sharon a jeté

Ses tanks et ses avions tueurs

Ils n’ont pas du toutété

Emus ni étonnés

De voir femmes, etenfants, tomber.

3 –

Deux mille neuf cents ils nous font chier

Y’a pas de quoi fouetter un chat

Ni d’rameuter l’humanité

A l’échelle d’la Galilée

Il faudra diviser par cent

ce chiffre damné

Arrêtez de bêtifier !

4 –

Oui les deux tours sont bien rasées

Le World Tradedégommé

Viendra toujours icinous rappeler

Que quand on est décédé

c’estpour l’éternité

Ah jeun’s cons disant «ave»

Vos viesvalaient bienautant ?

5 –

Un jeune presque unenfant

Dans un p’tit coin américain

Etait vraiment si allumé

Qu’il adécidé sans personne

D’enfoncer sonavion

Dans une tour de sa cité

C’est bien plus fort qu’au ciné !

Il a vite décollé…

.Fin de l’acte1er

2ème acte .

La scène est éclairée faiblement. On devine les trois femmes de Ben Laden dans un coin de la scène, assises par terre et cousant. De l’autre côté de la scène une voix s’exprime :

La voix :

Quel est donc ce nouveau monstre, ce nouveau Léviathan qui erre sur la terre ? Quel est ce nouveau spectre qui hante le monde ? Est-ce donc encore le spectre du communisme ? Est-ce donc celui du Nazisme, du fascisme ?Est-ce la surpopulation vertigineuse qui pousse le monde à la catastrophe ? Est-ce la conscience générale de la mortelle poussée des dioxydes de carbone se transformant en en spectre invisible, qui pousse l’humanité vers le néant ? Non, non, et non !… Le nouveau spectre qui se profile et qui va tenter de dominer le monde a un nom… C’est un nom terrifiant, apocalyptique, un nom que l’on n’ose même pas prononcer car il emplit la bouche d’une terreur infinie et se transforme en gouttes de larmes qui vont se transformer parmétamorphoses successives en gouttes de sang ! Ce nom qui est sur toutes les lèvres, ce nom que l’on entend dans toutes les villes, à la campagne, au bord de la mer, dans tous les champs et les chansons, ce nom qui n’est plus mystérieux, ce nom que vous êtes prêts à prononcer, je le dis ici avec terreur et respect : Ben Laden, Ben Laden le fier, le valeureux, l’homme recherché en vain par toutes les polices, par toutes les armées, Ben Laden le fier, l’indomptable, le courageux. Oui j’ai prononcé enfin ce mot terrible : Ben Laden, Ben laden, Ben Laden.

( Comme en écho la voix s’éloigne et disparaît. La lumière s’accroît un peu du côté des trois femmes de Ben Laden qui cousent jusque là en silence .)

Première femme :

Il y a bien longtemps que je n’ai plus de nouvelles… J’espère qu’il ne lui est rien arrivé. (Court silence.)

Deuxième femme :

Tu y crois toi à ces histoires d’attentats ?

Première femme :

C’est un peu son genre. Il ferait n’importe quoi pour qu’on parle enfin un peu (beaucoup), de lui !

( Court silence).

Troisième femme :

Je n’y crois pas du tout à ces histoires. C’est totalement inventé. Les Américains sont devenus complètement fous ! Il suffit d’un attentat un peu plus fort que d’habitude et ils s’énervent comme des fourmis piétinées dans leur travail !

Deuxième femme :

Il est encore en train de courir le guilledou sous des prétextes fallacieux comme d’habitude ! C’est un homme… Vous comprenez ce que je veux dire ?

( Elle se met à chanter : au fur et à mesure , toutes se mettent à chanter. La fin de la chanson est reprise en chœur.)

6ème Chanson :

1 –

Où es-tu amour parfumé

Perle de mon cœur embaumé

Parfum des landes déboisées

Fumet de lièvre apprivoisé

Où es-tu amour dépravé

Encore en train de t’amuser

Avec des minett’s délurées

Ou des puceaux endimanchés ?

2 –

Où es-tu donc mon cœur aimé

Ma vie, mon corps, par toi baisé

Le doux charmeur de mes quinze ans

Amour qui m’a donné autant ?

Où es-tu donc infâm’ salaud

Vers quoi cours-tu seul au galop

A travers plaines , vallées et monts

Puant et suant le chardon ?

3 –

Où es-tu amour de mon cœur

Toi qui jurais tout mon bonheur

Toi qui me contait en chantant

Le roman d’un perdreau errant ?

Où es-tu donc mon gros salaud

Ivrogn’ puant, chacal lampant

Où vas-tu triste et alcoolique

Par débits vides etaldéhyques ?

4 –

Ah le bel amour de ma vie

Le joli cœur, jolie perdrix,

Docteur qui savait de ton vit

Me ramonerle clitoris

Reviens démon, reviens à moi

Fais-moi encore tout entrevoir

Châteaux de verre châteaux d’ivoire

Reviens-vit’ calmer mon émoi !

( A la fin de la chanson ; noir. Les jeunes femmes s’esquivent. De l’autre côté de la scène la lumière se rallume : deux jeunes hommes discutent.)

Premier jeune homme :

Ecoute-moi espèce d’idiot. C’est extrêmement simple. Ce qu’il faut c’est simplement une suffisante quantité d’explosifs, une mèche lente et un détonateur. La longueur de la mèche lente dépend essentiellement du temps qu’il faudra pour faire exploser la bombe. C’est simple comme bonjour : 1 minute par mètre . Si tu comptes 3 minutes tu auras besoin de trois mètres de mèche lente, plus évidemment le détonateur. As-tu compris ?

Deuxième jeune homme :

Oui j’ai compris . Mais tu me fourniras l’explosif, la mèche lente, et le détonateur comme convenu ?

Premier jeune homme :

Evidemment. Il faut tout de même que tu sois prudent : tu ne dis pas un mot à personne ? Même pas à ta mère ou ta grand-mère ?

Deuxième jeune homme :

Pour qui me prends-tu ? Je ne suis pas aussi idiot que tu le crois !

Premier jeune homme :

Bon. Alors je te rappelle les consignes : au moment où le soleil se couchera sur les Appalaches, du côté de la colline du sergent Gray, à l’intersection du croisement des deux chemins communaux, là où passent régulièrement les buffles, tu poseras la bombe, et au moment propice tu allumeras la mèche lente ! Salut.

Deuxième jeune homme :

Salut !

7ème chanson :

1 –

Que puis-je pour bordéliser le monde

Vais-je mettre le feu à ma maison

Ce serait simple, illusoire,

Et absolument sans raison

Vais-je me jeter du haut du balcon

Ce serait bête et vraiment sans raison.

Refrain :

Je vais mettr’ une bombe au passage

Du troupeau de buffles pas sages

Je vais faire sauter ces bêtes idiotes

A bas la rime, vive la litote !

2 –

Où donc trouver le kilo d’explosifs ?

Où trouver la mèche à allumer ?

C’est vraiment très simple

C’est tout à fait et absolument lascif

Allumer, exploser, tout va sauter

Aux cieux vont aller les buffles adorés !

3 -

A mon ami Pierre qui a fait l’armée

Je demanderai : as-tu de quoi faire sauter

Un troupeau , un grand troupeau

De mammifères pacifiques

J’ai plein d’pognon, j’ai d’quoi payer

Gardes la monnaie, j’ai plein d’biff’tons

4 –

Ainsi dans l’Arizona une fois

Se passera une histoire énorme

Que l’on se dira

Que de générationsen générations

On se dira en s’donnant des frissons

L’histoire d’un gars et d’ses bufflons.

( Noir)

La lumière se rallume . Un homme est là tout seul. Il est assis. Il se relève doucement et se met soudain à chanter une tyrolienne :

8ème chanson :

1 –

La haut la haut dans la montagne

Il y a un soldat un aigle des hauteurs

Qui soudain chante

Et son chant dévale les collines

Et s’étale en gonflant sur la plaine insolite

Où se meurent les muses sereines

Et les reines d’antan.

Refrain :

Yo la la itou yo la la itou (ter)

Yo la la itou di hé !

C’est moi qui suis Ben Laden, (parlé)

Ben Laden, Ben Laden.

2 –

La haut la haut dans la montagne

Il y a je crois Ben Laden agenouillé

Et ses prièresvraiment vont droit au cœur

D’une belle qui au bord d’un étang

Les cheveux se délasse,

En pensant au beau mec qu’elle voit

Et qui chante si bien !

3 –

La haut la hautoù l’aigle se mire

Il y aura sans doute

Une union illicite d’une bergère

Et d’un monstre si froid etsans cœur

Ah laissez-moi penser aux histoires d’autrefois

D’Artagnan sera toujours très beau

Prends garde on nous entend !

Noir.

Puis à un autre bout de la scène la lumière se rallume : nous sommes chez la famille Ben Laden.

Le père :

Je me demande où ce petit con a bien pu passer. Personne n’est au courant. Il va falloir faire quelque chose.

La mère :

Ne parle pas comme ça d’Oussama. Tu sais bien qu’au fond c’est un gentil garçon !

La première femme :

J’ai toujours dit qu’il finirait mal. Vous l’avez pourri, dorloté, il n’a jamais connu de limites et maintenant c’est le bouquet !

Une autre femme ( un peu plus jeune.) :

Moi je l’aime comme il est. Je sais bien qu’il est un peu fantasque, mais il est encore bien jeune !

La première femme :

Tu exagères ! Il a quarante trois ans ! Ce n’est plus un gamin !

Le père :

Vous trouvez bien entendu toujours des excuses ! Je pense que je vais prendre la décision de le déshériter. Au moins partiellement. Il a cinquante frères et sœurs : il se débrouillera bien dans la vie…. Et qu’il continue donc à vivre comme un truand !

( La mère sort sans rien dire. Le père prend le journal et le lit. Les deux femmes retournent à leurs occupations.) Noir.

La lumière se rallume : la famille Ben Laden a disparu. Un homme déguisé en mendiant entre en scène. Puis il se met à parler :

Mollah Omar :

Je suis le Mollah Omar, vous savez bien : celui que Bush surnomme « le deuxième bandit d’Afghanistan » ! Et pourtant je suis un homme simple. Je ne bois pas, je suis fidèle à mes cinq épouses ( Dieu protège leur âme), je n’ai pas de vices cachés. Au fond je suis un homme comme vous … et moi ! ( Il rit en disant cela..)

Les meilleures troupes du monde, les plus entraînées, celles qui disposent du matériel le plus sophistiqué sont à ma recherche depuis des mois et des mois : elles sont incapables de me débusquer ! Je suis tout simplement dans un pays développé (que je ne nommerai pas), hébergé par des amis de notre cause sainte et juste. Que le seigneur soit avec vous ! Allah akhbar ! ( Ilse retire.)

Noir.

La scène représente un café. Deux tables de consommateurs : trois et deux. Le garçon passe et repasse. A une des tables un homme chuchote, dont on ne comprend pas les paroles, est pris par le garçon et les consommateurs de l’autre table pour Ben Laden . Une mêlée a lieu : l’homme arrive à montrer ses papiers d’identité : ce n’est pas Ben Laden mais un agent de la sécurité… Aucune parole sauf « Ben Laden » n’est échangée.)

Noir.

Une voix : ( Dans le noir.)

Ben Laden est partout, à la campagne, dans toutes les villes, dans toutes les montagnes. Et bien sûr notamment aux Etats-Unis. Des primes énormes sont proposées pour sa capture. On l’a arrêté dix, vingt, trente fois : mais ce n’était jamais lui. Il semble qu’il y ait des milliers de Ben laden qui circulent à travers le monde. Il est absolument impossible de découvrir le vrai, l’unique, le Ben Laden en or ou en diamant ! Figurez-vous que Georges W. Bush s’est mis en tête qu’il pourrait le débusquer en Irak ! La guerre d’Irak a eu lieu , et en trois ou quatre semaines, au prix de dizaines de milliers de victimes, pas de Ben Laden, pas d’armes de destruction massives, rien à se mettre sous la dent, sauf du pétrole bien entendu !

La voix s’arrête. La lumière revient. Un chanteur ou une chanteuse entre en scène et chante :

9ème chanson : « l’opinion publique des pays développés s’inquiète de ne pas avoir de nouvelles de Ben Laden. »

1 –

Il est absolument nécessaire

Que dans un délai très rapide

Nous retrouvions ce triste sire

Ce Ben Laden si putride

Ce grand forban insaisissable

Est-il mort ? disparu ? vivant ?

C’est une personne énigmatique,

Intelligente, vite trouvons la !

2-

Nous bombardons le sud etle nord

De ce pays fantomatique

Le jour la nuit nous déversons

Partout des tonnes de bombes

Là rien ne vient tout disparaît

Il n’est nulle part ou bien partout

C’est un fantôme monstre mythique

Où est passé cet homme unique ?

3 –

Un spectre nous hante, Ben Laden

Sa face de monstre fait gerber

Tout l’univers, le monde entier

Tant que l’être abominable,

Sera n’importe où, quelque part,

Il faut vivre là où il est,

Le débusquer et satisfaire

A notre ego et à nos lois.

4 –

Nous irons tous en Irakpour voir

Si le vrai loup n’est pas là bas

Ben Laden tu nous en fais voir

Larguons les bombes en avant

N’oublions pas ceux qui sont tombés

Redoublons vraiment nos efforts

On te retrouvera sans peine,

Vite allons tuer ce ben Laden.

Entre un autre( ou une autre) chanteur(se) : ils se regardent en chiens de faïence.

10ème chanson : les pays sous-développés s’amusent de la traque de Ben Laden.

1 – 4

Dans les campagnes et dans les villesDans les rues le soir une foule joyeuse

De Tombouctou à KatmandouSe marre, rit et déambule

Du Nigeria au Cap MajeurEn pensant aux si bons G.Is

De Brasilia à Kinshasa Morts en martyrs du genre humain

La foule repense tendrement Par quatre avions arraisonnée

Prenant pitié, s’attendrissantLa grande puissance du monde

A ces évènements de septembre Tremble, frémit, est ridicule

Où deux tours se sont effondrées. (Bis) Par vingt hommes elle est bien vaincue. (Bis)

2 –

Ah qu’elle estextraordinaire

La vision d’une cité plongée

Dans la terreur et la folie

Ces fabuleuses images blanches

Empreintes de laideur enclenchent

L’étonnement, le sentiment

D’un ciel qui s’abat sur la ville

Riche de la misère du monde. (Bis)

3 –

Ce furent aussi moins médiatiques

Les images du Pentagone gris

Tel un très grand château de cartes

Généraux, colonels aussi

Officiers morts ensevelis

Dans les décombres d’un bureau

Du bureau de la mort qui vient

Sans rien dire, sans frapper, sans bruits. (Bis)

Noir.

Une voix :

Et maintenant une annonce exceptionnelle : en direct sur notre T.V. Georges W. Bush notre très grand Président va s’adresser à l’ensemble de nos compatriotes ! Dans une minute vous allez assister à un événement extraordinaire. Attention : cinq, quatre, trois , deux, un ! Je vous invite à écouter en direct G.W.Bush !

Lumière. Un homme déguisé en cow-boy entre en scène. On sent qu’il est un peu maladroit, mais extrêmement en colère ! Il trépigne sur place ; il met dans sa bouche un bout de bretzel, puis avale sans coup férir deux verres de whisky, puis enfin, la gorge dégagée il se met à chanter :

11ème chanson : Georges. W. Bush dans son cabinet se plaint de ne pas avoir enfin Ben Laden sous la main!

1 –

Il commence à me faire chier

Ben Laden ce trou du cul

Il commence à me faire chier

Je suis sûr que j’ai trop bu !

Il commence à me faire chier,

Ce crétin ce gros salop

Il commence à me faire chier

Ce putain d’enfant d’salaud

Refrain :

Ohé ohé dites-moi là bas

Où se trouve donc Oussama

Oussama Oussama ?

Mais où est passé ben Laden ?

2-

Nom de dieu mais il se rend

Ce fis d’Apache ce négro

Où j’envoie vite en Irak

Mes poulets mes gros chéris

Nom de dieu mais il se rend

Ce putain d’enfant d’salaud !

3 –

Il commence à me faire chier

Ben Laden l’enfant de pute

Il commence à me faire chier

Larguez vos bombes sur leurs huttes

Il commence à me faire chier

Ce Mahométan de merde

Il commence à me faire chier

Brûlez-les tous sans en perdre !

Noir.

Acte III :

( 4 personnages. 2 femmes, 2 hommes, sont sur scène. Ils parlent successivement au public. La lumière s’allume sur chacun, chacune, quand ils prennent la parole.)

Première femme :

Tout ne va pas très bien en Grande Bretagne. Ainsi hier en fin d’après-midiun terrible drame s’est produit dans le métro à la station Waterloo. Vous savez bien où se trouve cette station . C’est vraiment dans le cœur de la capitale. Eh bien une femme jeune, normale sous tous les rapports s’est jetée sur la voie au moment où entrait le métro. Elle a été déchiquetée sur le coup. On dit que c’est à cause d’une histoire d’amour qui aurait mal tournée. Allez savoir ! Peut-être avait-elle perdu sont travail, ou bien était sans le sou.. ;

Premier homme :

C’est comme cette malheureuse histoire qui vient de se produire en Italie. Au sud de Rome, dans un petit village il y avait une fête. Une belle fête quoi ; une fête comme nous en rêvons tous : des stands, des jolis costumes, des chansons et des danses. Et puis de bons petits plats bienmitonnés. Une vraie fête. Au cours d’un concours de dégustation de spaghettis, le vainqueur, qui avait déjà dégluti trois kilos de ces succulentes nouilles, s’est brusquement écroulé sur scène, frappé de syncope ! C’est vraiment malheureux d’en arriver là , n’est-ce pas ?

Deuxième femme :

Une histoire un peu similaire vient de se produire en France : un homme bizarre au cours d’une fête de jeunes, s’est brusquement mis en colère et a sorti un couteau ( genre opinel) et s’est précipité sur un groupe de jeunes qui étaient à son niveau et s’est mis à tailler là dedans comme de la viande ; deux types membres du service d’ordre se sont alors rués sur lui , ont réussi à le mettre à terre et a l’immobiliser !

Deuxième homme :

Vous ne trouvez pas que toutes ces histoires bizarres sentent un peu trop le Ben Laden ? ce Ben Laden qui hante le monde, se trouve dans tous les mauvais coups, dans toutes les tueries ! J’espère que la police mondiale mène une enquête sérieuse sur tous ces incidents !

Première femme :

Vous ne savez pas ce qui vient de se passer aux Etats-Unis ? On apprend qu’un gamin de quinze ans qui prenait des cours de pilotage s’est, au cours d’une leçon, approprié un petit appareil, il a mis les gaz et hop ! En avant toutes sur la petite ville qui était à cinq minutes de l’aéroport ! Il est rentré à fond la caisse dans une petite tour de vingt étages occupée par des sociétés… Il était seul, c’était un samedi après-midi. Il a été la seule victime : vous vous rendez compte ? Il y a vraiment beaucoup de dingues aux states !

Premier homme :

Ne croyez pas qu’en Russie ça aille mieux : la situation économique depuis plus de 10 ans est catastrophique pour plus de 50 % de la population. En plus il y a la guerre terrible de Tchétchénie qui n’arrange pas les choses. Jamais la détresse d’un peuple n’a été aussi grande. Il faut dire que les Russes sont fatalistes jusqu’au bout des ongles ! L’hiver qui vient de s’écouler, on a assisté à la mort de plus de 999 personnes qui étaient dehors ( d’après des statistiques officielles qui ont tendance à être minorées) . Soit elles n’avaient pas d’abri pour se protéger, soit elles ont bu une vodka de très mauvaise qualité qui les a terrassés, soit peu être pour la combinaison de ces deux facteurs !

Deuxième femme :

Moi je voudrais vous parler d’un tas d’autres pays où tout va mal ; pas de boulot, l’immigration vers les bidonvilles des villes surpeuplées, pas de nourriture, des soldats qui s’entretuent pour quelques pennies, des femmes et des enfants qui se prostituent à tout va, pas d’avenir, pas de vie digne d’être vécue, les prisons pleines de rats et de prisonniers ; les gardes-chiourmes sans aucune pitié : voulez-vous que je vous cite les pays où tout cela a lieu ? En Asie, en Afrique, en Amérique latine, en Amérique du Nord et à Guantanamo… Au fait savez-vous où se trouve Guantanamo ?

Deuxième homme :

Je vous le dis bien fort, toute cette misère, tous ces ennuis proviennent d’une seule et même cause : Ben Laden ! Tant que les racines de ce mal n’auront pas été extirpées le mal planera endémique, sournois, prêt à fondre sur chacun, en tous lieux ! Nous sommes engagés dans un processus inaltérable où tout se perd, tout se fond, tout se remplace, sauf la possibilité d’accéder au paradis, le seul le vrai, celui de dieu, l’unique, l’inaliénable ! Celui pour lequel l’humanité a aspiré du plus profond de son être, depuis des millénaires et des millénaires !

Première femme :

Ce sont des fadaises et des fadaises ! On cherche à nous faire croire à un danger soit-disant islamique, à un personnage extraordinaire qui aurait tout décidé et réalisé de lui-même : c’est un mensonge éhonté ! Ne croyez pas à ces balivernes ! Ben Laden n’existe que dans la tête des Américains qui l’ont entièrement inventé ! Il n’est pour rien dans les attentats du 11 septembre. Dans quelques années (combien ?) nous saurons exactement qui a fait le coup : ce sont vraisemblablement des éléments de l’extrême - droite américaine, des spécialistes des coups tordus, des psychopathes névrosés qui ont la haine au ventre pour des raisons obscures. Souvenez vous de l’assassinat du Président Kennedy en 1963 : on avait pendant des dizaines d’années prétendu que c’était Oswald, le pro-communiste qui était l’assassin ! Le dénommé Ruby, malade au dernier degré d’un cancer, l’a assassiné froidement à l’intérieur d’un commissariat. Nouscommençons maintenant seulement à connaître la vérité sur cet assassinat ! Bush et ses valets, le peuple américain à 75 % croit aujourd’hui à ces inepties. Le gouvernement réactionnaire américain a manifestement besoin de lancer ces énormes bobards qui sont pris pour argent comptant par les gouvernements alliés des Etats-Unis ! Assez de baratin ! Taisez-vous ! Ne prenez pas les gens pour des imbéciles !

Noir . (La lumière s’abaisse et se rallume au centre de la scène où apparaît une chanteuse.)

12ème chanson : Des évènements dramatiques traversent le monde.

1 –

Du haut d’une falaise

Un être désespéré

Signe un grand papier

Puis se jette dans la mer

Dans la ville de Goma

C’est une coulée de lave

Qui a enseveli

La moitié de la ville

En Palestine c’est Arafat

Condamné par Sharon

Et qui attend son sort.

2 –

Une prison d’Amérique

Un pauvre gars prisonnier

Depuis plus de vingt ans

Espère la révision

de son procès truqué

Hélasl’espoir fait vivre…

Dans une prison pourrie

d’Arabie Séoudite

Uncondamné à mort

Attend l’exécution

Qu’il est doux le violon…

3 –

En Russie les combats

Se poursuivent en Tchétchénie

Les Russes meurent de froid

Neuf-cents dit-on sans fard

Dans les rues sans personnes

L’hiver n’en finit pas

Ohé ohé Monsieur

Un rouble n’as-tu pas ?

Un rouble un pauvre rouble

Pour boire cette vodka

Qu’elle réchauffe mes bras…

Refrain :

Comme il va mal le monde

Où nous vivons

Depuis longtemps,

Comme il va mal le monde

Dont nous voyons

Tous les tourments

Je deviens fou, je deviens fou,

Laissez-moi vivre, je deviens fou

Je deviens fou, peut-être suis-je saoul !

Fin de la chanson. Noir.

La lumière se rallume : quatre hommes en vêtements oranges, des boulets aux pieds tournent en rond en silence. Brusquement la musique éclate : ils chantent.

13ème chanson : sur la base de Guantanamo, les condamnés sans procès se révoltent et chantent.

1 –

Al Quaeda) Ter

Nous sommes les condamnés à mort

Nous vivons comme des animaux

Sans espoir de survie sans lien de vie

Al Quaeda ) Ter

Que l’enfer soit promis

A tous ceux qui nous gardent

Du plus grand au plus petit.

2 –

Al Quaeda ) Ter

On nous a conduit sans scrupules

Dans cet endroit sans majuscule

Al quaeda al Quaeda

Ce cri qui monte Amérique sois maudite

Par ceux qui à Guantanamo souffrent

Prisons très noires, prisons

Sans vraiment aucun espoir

3 –

AlQuaeda) Ter

Allah saura châtier à fond

Ceux qui violent les édits divins

Ceux qui prétendent punir ceux d’Al Quaeda

Croupissant, vomissant, insultant

Tous ces soldats pourris

Qui nous torturent ici

Allah saura les punir !

Al Quaeda ) Ter

C’est là qu’nous croupissons

Comme des voleurs de poules

Voyez venir la houle !

4 –

Al Quaeda ) Ter

Au paradis du grand Allah

Nous frapp’rons ces soldats maudits

Nous les punirons par l’enfer à mort

Comme ils nous ont traité maintenant

Al Quaeda ) Ter

Nous crierons Inch’Allah , oui Inch’Allah !

Noir.

Les personnages disparaissent. La lumière revient : retour de la chanteuse.

La Chanteuse :

Ce monde dans lequel nous vivons n’est pas d’un drôle extrême !( S’adressant aux spectateurs) Qu’en pensez-vous vous autres ? Ce n’est vraiment pas folichon d’habiter au Pakistan dans un bidonville, en Afrique à 10 ans d’être enrôlé dans une armée de mercenaires , aux Etats-Unis de croupir à 16 ans dans une prison en attendant la mort, et en Europe de vivre dans des banlieues sordides sans espoir d’un travail sérieux ou d’une rente….

( Elle commence sa chanson ) :

14ème chanson : tout devient fou dans le monde et moi je ne me sens plus très bien !

1 –

Sur cette terre je circule,

Personne ne s’occupe de moi

Ni me sonne

Sur cette terre je suis seul et aphone

Et l’angoisse qui monte

Me ramone.

Refrain :

Au secours je deviens fou

Plus rien ne va et tout s’écroule

Ce monde est fou, ce monde est fou

Et moi je n’sais quel vin me saoule.

2 –

Je ne sais pas où je m’en vais

D’où jepars, mes pasconduisent là

Où la mort

Un beau jour viendra me dire

Oui il est temps, il est absolument temps

Oui mon gars

3

Ce monde est fou, complèt’ment fou

La misère domine ce monde cinglé

Seuls gagnent

Les puissants

Ou bien qui savent,

Ceux qui savent, oui ceux qui savent

Dominer.

4 –

Adieu la vie adieu l’amour

Adieu les beaux rêves éveillés

Adieu toutes

les poupées gonflées

Fermons les yeux

dormons,

Fermons les yeux dormons

Toujours dormons

Noir.

Fin du troisième acte.

Epilogue

Devant le proscenium une femme fatale argentine s’adresse au public :

La femme :

Il existe un pays dont on ne parle qu’épisodiquement dans la presse officielle ( celle qui vous gave l’estomac et les sens), ce pays s’appelle l’Argentine. Vous avez certainement entendu parler du F.M.I de l’O.M.C. , des dettes énormes de l’Argentine ( qui pèsent sur les pauvres Argentins ou les membres de la classe moyenne ), ainsi que du refus du FMI d’accorder de nouveaux prêts. Moi ici je vais vous parler d’une Argentine que vous ne connaissez pas ou très mal. Je vais vous parler de ce qui se passe dans les villes, du nord au sud.

L’Argentine était il y a vingt ans encore le dixième pays du monde en termes de richesse moyenne par habitant. Les Argentins n’étaient pas trop malheureux et ne se posaient aucune question ( pas plus qu’en France) sur leur niveau de vie moyen. Ils ont vécu l’ère démagogique de Péron ( 1ère et 2ème version), ils ont vécu la dictature militaire qui s’est soldée par la défaite militaire des Malouines en 1982, ils ont vécu l’ère du radicalisme – c’est-à-dire de la corruption étalée au grand jour, depuis 1989, ils ont vécu la privatisation de tous les services publics ( qui étaient nombreux) et leur accaparement par les grandes compagnies étrangères à qui les différents gouvernements argentins ont offert cette manne céleste. Les profits par milliards de dollars ont foutu le camp du pays, et la détermination du prix du Peso garanti par rapport au dollar a été une véritable catastrophe ! Si bien qu’aujourd’hui tous les partis gouvernementaux sont vomis par 75 % des Argentins. Ils sont tous corrompus , tous « pourris ». Les Argentins dans les villes grandes et petites s’organisent en assemblées populaires permanentes, par quartiers, avec toutes les coordinations nécessaires. Ces assemblées ont différentes missions : des missions de discussion sur la situation politique, des missions de solidarité effective pour trouver les moyens de venir en aide aux plus démunis et des missions d’autogestion de l’économie et de la société.

Vous autres européens qui vous engagez doucement vers le libéralisme, voilà exactement la situation qui vous attend dans quelques années si vous laissez le processus impitoyable s’installer ! Vous verrez petit à petit tous les services publics foutre le camp. Cela commencera par les retraites : on vous fera travailler jusqu’à 65 puis 70 ans. Vous verrez petit à petit la grande majorité des travailleurs vivre au SMIC et si vous n’y prenez pas garde vous vous retrouverez au niveau de l’Argentine d’aujourd’hui, dans la mouise jusqu’au cou !

Citoyens ! On vous a menti ! L’affaire Ben laden n’a rien d’un épisode nouveau de la lutte terroriste contre les Etats-Unis et leurs alliés ! réveillez-vous ! Regardez en face l’Argentine qui vous montre la voie à suivre !

Elle se dirige vers un côté de la scène. La lumière s’amplifie, et on entend une musique ; c’est un tango.

Deux danseurs entrent alors en scène en dansant le tango argentin. Elle les regarde danser pendant un petit moment( 2 à 3 minute) puis les applaudit. Enfin elle se met à chanter sur le même air :

15èmechanson : en Argentine un couple danse un tango révolutionnaire…

1 –

J’ai trouvé la réponse à une de vos questions

Le tango répond bien aux problèmes de la vie

Notamment, la question de la révolution

Argentine, Argentine, il n’y aura plus de sauveur

Finie la dictature, vive la démocratie

A bas la corruption à bas la corruption

Halte à la misère ! Le pouvoir aux travailleurs !

Le pouvoir aux travailleurs !

2 –

Vous connaîtrez un jour la grande révolution

Si ce n’est donc pas vous ce seront vos enfants

Il faudra bien un jour finir de tout payer

Argentine, Argentine, tu sens le poids de l’oppression

Aujourd’hui sans pudeur il faut renouer le fil

Avec les vieux dictons et réclamer sans peur

Gouver,nement du peuple assurons l’autogestion

Assurons l’autogestion !

La chanson s’arrête. Les danseurs dansent pendant un petit moment puis s’arrêtent. La lumière sur scène est à son maximum. Petit à petit tous les personnages rentrent successivement en scène. Chacun, chacune reprennent le 1erpuis tous les couplets de la chanson . Tous évidemment reprennent en chœur le refrain de L’Internationale et saluent le public le poing levé !

16ème chanson : la chanson de la fin.

1 –

Il est urgent de qualifier

Ce qui vient donc de se passer

La réaction américaine

Aux actes dits de Ben Laden

Est ignoble et sans fondement

Bush est un crétin pontifiant

Luttons pour la libération

Des peuples et pour l’autogestion !

2 –

Ben Laden est un sous-produit

De ce qui est partout induit :

En Palestine on assassine

On exproprie, on déracine

C’est dans ces tristes conditions

Que naît la haine de l’oppression

A tous ces attentats sans nom

Nous opposons l’autogestion !

3 –

Partout la mondialisation

Du capital et des finances

C’est la prolétarisation

Fini le règne de l’abondance

C’est la misère des démunis

La faim, la ruine des petits

Les gros seront toujours plus gros

Une solution l’autogestion !

4 –

En Argentine voilà la voie

Tracée, suivie par les chômeurs

Partout où s’écroule l’emploi

Choisissons la rue du bonheur

Démocratie dans l’entreprise

Le bénéfice n’est plus de mise

Nous travaillons pour nos couleurs

Autogestion, autogestion !

Refrain : C’est la lutte finale, groupons nous et demain, l’Internationale sera le genre humain ! Bis ( sur l’air de l’Internationale).

Fin de : « Mais où est donc passé Ben Laden ».

Mais où est donc passé Ben Laden .

Oratorio tragi-comique

Par jean Baumgarten

Prologue

La scène est vide… Elle est légèrement éclairée. Un personnage habillé en noir entre. (Un homme ou une femme).

Voix du personnage :

Mesdames et Messieurs, nous venons d’apprendre une nouvelle extrêmement grave. A 9h15 aujourd’hui, c’est à dire il y a cinq minutes exactement, 10 minutes après qu’un avion civil ait percuté une des tours du World Trade Center, un deuxième avion à son tour, déjouant la vigilance de l’US Air Force, est entré brusquement dans l’autre tour, provoquant une catastrophe incroyable… Nous étions à nouveau, 60 ans après, à Pearl Harbour ! Il y a des milliers de victimes, des dizaines de milliers peut-être ! Du côté de la Présidence de la République c’est l’affolement. Nous sommes sans nouvelles du Président G.W.Bush. Que se passe-t-il donc ? Où sont passés nos valeureux pionniers ?

( Quelqu’un lui apporte un nouveau message : il le déplie et le lit.)

Les Etats-Unis d’Amérique sont en passe de devenir le pays le plus fragile du monde : on m’annonce qu’il y a quelques instants ( notre chaîne est la plus rapide et vous livre des informations quasi-instantanées) un troisième avion survolant la capitale fédérale Washington, s’est écrasé sur le Pentagone ! On ne connaît pas encore le nombre des victimes, mais il doit être considérable ! (Un nouveau papier est apporté au commentateur) :

Je vous livre une nouvelle information qui vient de tomber à l’instant même. Un quatrième avion vient de s ‘écraser dans la campagne près de Pittsburgh ! On suppose qu’une lutte extrêmement sauvage a opposé le personnel de bord au commando agressif , et pour la première fois, au prix de leur mort, les passagers de l’avion ont opposé une résistance efficace aux agresseurs.

N’oubliez pas Mesdames, Mesdemoiselles et Messieurs que la lessive Bahamas lave beaucoup, je dirais même lave beaucoup, très beaucoup ( voilà que je bafouille ) plus blanc que l’ensemble des autres lessives. Enfin il faut signaler également que le tabac au grain très fin, le Nevada, au meilleur goût, à la qualité excellente et au prix le plus attractif est en vente dans tous les bureaux de tabac de l’Union, dans toutes les drogueries, sans aucunes restrictions.

Je reviens maintenant sur les informations capitales que je vous ai déjà livrées ; ( il reprend le papier de sa poche, mais ce n’est pas le bon, il marmonne, recherche dans une autre poche et retrouve le papier en question.) :

D’après un spécialiste du terrorisme que je ne nommerai pas ( vous comprenez bien pourquoi ), il s’agit d’une opération très puissante, ciblée, calculée depuis des mois ou des années, dans laquelle sont investis plusieurs centaines d’hommes, voire des milliers. Un premier nom revient à l’esprit : celui de ben Laden, ce richissime saoudien dont on est sans nouvelles depuis quatre ans et qui semble être actuellement en Afghanistan… Le gouvernement est extrêmement concentré sur ce qu’il convient de faire, et il nous assure de sa ferme détermination…. (il recommence à bafouiller) et … Comme disait le général Grant à un contradicteur, il ne faut pas cesser d’entreprendre tant qu’on a la force de le faire, et si on ne l’a pas il suffit de manger une boîte d’épinards « OK », car les épinards OK sont les plus frais, les plus raffinés,et conviennent parfaitement à la soupe, aux raviolis ainsi qu’au poisson fumé. ( Peu importe la marque du poisson fumé.)

( Le personnage s’apprête à continuer ce numéro, mais entre à l’autre bout de la scène un autre personnage , peut-être habillé de blanc, qui tient un autre langage, plus accusateur, moins simpliste) :

2ème personnage :

N’écoutez pas tous les mensonges proférés par cette personne ridicule… Ce sont en tout quinze à vingt cinq individus au maximum qui sont responsables des attentats terribles que nous venons de subir. Le gouvernement de G.W.Bush a intérêt à grossir démesurément la situation pour imposer des mesures elles-mêmes terroristes ! Il n’y pas tant de morts et de blessés qu’on le raconte ! A l’échelle d’un pays comme la Palestine cela ne fait qu’une trentaine de morts et aucun blessé ! Arrêtons de bêtifier et de prendre tous les Américains pour des crétins uniquement préoccupés par les petits problèmes de la vie quotidienne ! Restons calmes et comprenons ce qui se passe pour qu’un petit groupe de gens apparemment sensés décident de sacrifier leur vie et celle de milliers d’innocents !

( Noir. Du fond de la scène apparaît une chanteuse. Elle chante.)

1ère chanson : introduction à Oussama Ben Laden…

1er Acte :

La scène représente l’antichambre du Paradis ( ou quelque chose d’approchant).Personnages :

-La gardienne du lieu, Mme Locandiera qui n’a qu’un seul intérêt dans la vie : les pourcentages qu’elle reçoit pour chaque « locataire ».

-Un responsable de l’attentat du 11 septembre qui se demande dans quel endroit il est.

-Une sous-lieutenante des pompiers new-yorkais.

-Un jeune kamikaze palestinien.

Mme L. : ( Elle trie des papiers, griffonne, rature et rouspète mentalement.)

Nous sommes le 11 septembre, et il n’est pas encore 9H.15, et la direction m’informe que je vais recevoir plein de monde ! Toutes les sections locales sont averties : ce sera partout la même chose. D’un côté je ne suis pas mécontente : ça met du beurre dans les épinards, ce qui est très bon. Mais d’un autre côté ça fait du travail supplémentaire ; ils s’embêtent pas là haut, ils pourraient embaucher, au moins des supplétifs, ou bien des CDD. Ils sont vraiment rapiats, ou alors c’est leur cerveau qui est un peu fêlé ! Tiens voilà une première personne qui arrive… Et puis une seconde, une troisième … Approchez-vous, je ne vais pas vous manger ! Je ne suis pas Cerbère ! On m’appelle « Madame la Locandiera » ( je ne sais pas du tout pourquoi)… Mettez-vous en file indienne. Voilà, très bien. Comment vous vous appelez ? Non pas tous ensemble, chacun à son tour. ( Elle regarde la jeune femme aux yeux hagards qui s’approche,et qui se met à chanter) :

2ème chanson : une pompier new-yorkaise.

Les nouveaux arrivants écoutent cette chanson et battent la mesure en se dodelinant. Le Kamikaze

Palestinien s’avance et dit :

Le kamikaze :

Je regrette profondément ce qui vous est arrivé. Croyez, Madame, à mes sentiments attristés.

3ème chanson : Chanson du kamikaze palestinien.

Mme Locandiera :

Ca n’est pas drôle tout ça, mais maintenant que vous êtes là tout est fini que diable !

Le terroriste :

Vous avez dit « que diable » ?

Mme Locandiera :

C’est une manière de parler, que voulez-vous ! Bon, maintenant il faut vous dépêcher et remplir l’imprimé que je vous donne.

( Elle distribue à chacun un imprimé. A ce moment un terroriste sort du groupe et chante.)

4ème chanson : Oussama où ça ?

( La chanson est reprise en chœur par le groupe de mourants).

Mme Locandiera :

Je ne voudrais pas me mêler de ce qui ne me regarde pas, mais qui est donc cet … Oussama ?

La sous - lieutenante des pompiers :

C’est un individu exécrable, un tueur de civils, un homme qui n’a aucune morale…

Le kamikaze palestinien :

C’est bien vrai tout ça !

Mme Locandiera :

Dépêchez -vous de remplir vos papiers, je ne suis pas à votre disposition !

La sous-lieutenante :

Je ne me souviens plus comment on écrit « explosion » : c’est avec un s ou un z ?

Tous :

Ca n’a aucune importance ! ( Ils se regardent et se mettent à rire. Le téléphone sonne : Mme Locandiera répond)

Mme Locandiera :

Entendu Monsieur, bien sûr Monsieur, je vous en prie Monsieur, au revoir Monsieur…

( S’adressant au groupe : ) On m’annonce que pour le moment le paradis est complet. Un peu de patience s’il vous plait !

Noir. Tous les personnages se tiennent par la main et chantent la chanson des morts pour rien :

5ème chanson : chanson des morts pour rien…

Fin de l’acte1er

2ème acte .

La scène est éclairée faiblement. On devine les trois femmes de Ben Laden dans un coin de la scène, assises par terre et cousant. De l’autre côté de la scène une voix s’exprime :

La voix :

Quel est donc ce nouveau monstre, ce nouveau Léviathan qui erre sur la terre ? Quel est ce nouveau spectre qui hante le monde ? Est-ce donc encore le spectre du communisme ? Est-ce donc celui du Nazisme, du fascisme ?Est-ce la surpopulation vertigineuse qui pousse le monde à la catastrophe ? Est-ce la conscience générale de la mortelle poussée des dioxydes de carbone se transformant en en spectre invisible, qui pousse l’humanité vers le néant ? Non, non, et non !… Le nouveau spectre qui se profile et qui va tenter de dominer le monde a un nom… C’est un nom terrifiant, apocalyptique, un nom que l’on n’ose même pas prononcer car il emplit la bouche d’une terreur infinie et se transforme en gouttes de larmes qui vont se transformer parmétamorphoses successives en gouttes de sang ! Ce nom qui est sur toutes les lèvres, ce nom que l’on entend dans toutes les villes, à la campagne, au bord de la mer, dans tous les champs et les chansons, ce nom qui n’est plus mystérieux, ce nom que vous êtes prêts à prononcer, je le dis ici avec terreur et respect : Ben Laden, Ben Laden le fier, le valeureux, l’homme recherché en vain par toutes les polices, par toutes les armées, Ben Laden le fier, l’indomptable, le courageux. Oui j’ai prononcé enfin ce mot terrible : Ben Laden, Ben laden, Ben Laden.

( Comme en écho la voix s’éloigne et disparaît. La lumière s’accroît un peu du côté des trois femmes de Ben Laden qui cousent jusque là en silence .)

Première femme :

Il y a bien longtemps que je n’ai plus de nouvelles… J’espère qu’il ne lui est rien arrivé. (Court silence.)

Deuxième femme :

Tu y crois toi à ces histoires d’attentats ?

Première femme :

C’est un peu son genre. Il ferait n’importe quoi pour qu’on parle enfin un peu (beaucoup), de lui !

( Court silence).

Troisième femme :

Je n’y crois pas du tout à ces histoires. C’est totalement inventé. Les Américains sont devenus complètement fous ! Il suffit d’un attentat un peu plus fort que d’habitude et ils s’énervent comme des fourmis piétinées dans leur travail !

Deuxième femme :

Il est encore en train de courir le guilledou sous des prétextes fallacieux comme d’habitude ! C’est un homme… Vous comprenez ce que je veux dire ?

( Elle se met à chanter : au fur et à mesure , toutes se mettent à chanter. La fin de la chanson est reprise en chœur.)

6ème Chanson : Où es-tu amour parfumé.

( A la fin de la chanson ; noir. Les jeunes femmes s’esquivent. De l’autre côté de la scène la lumière se rallume : deux jeunes hommes discutent.)

Premier jeune homme :

Ecoute-moi espèce d’idiot. C’est extrêmement simple. Ce qu’il faut c’est simplement une suffisante quantité d’explosifs, une mèche lente et un détonateur. La longueur de la mèche lente dépend essentiellement du temps qu’il faudra pour faire exploser la bombe. C’est simple comme bonjour : 1 minute par mètre . Si tu comptes 3 minutes tu auras besoin de trois mètres de mèche lente, plus évidemment le détonateur. As-tu compris ?

Deuxième jeune homme :

Oui j’ai compris . Mais tu me fourniras l’explosif, la mèche lente, et le détonateur comme convenu ?

Premier jeune homme :

Evidemment. Il faut tout de même que tu sois prudent : tu ne dis pas un mot à personne ? Même pas à ta mère ou ta grand-mère ?

Deuxième jeune homme :

Pour qui me prends-tu ? Je ne suis pas aussi idiot que tu le crois !

Premier jeune homme :

Bon. Alors je te rappelle les consignes : au moment où le soleil se couchera sur les Appalaches, du côté de la colline du sergent Gray, à l’intersection du croisement des deux chemins communaux, là où passent régulièrement les buffles, tu poseras la bombe, et au moment propice tu allumeras la mèche lente ! Salut.

Deuxième jeune homme :

Salut !

7ème chanson : Je vais mettre une bombe…

( Noir)

La lumière se rallume . Un homme est là tout seul. Il est assis. Il se relève doucement et se met soudain à chanter une tyrolienne :

8ème chanson : La haut dans la montagne.

Noir.

Puis à un autre bout de la scène la lumière se rallume : nous sommes chez la famille Ben Laden.

Le père :

Je me demande où ce petit con a bien pu passer. Personne n’est au courant. Il va falloir faire quelque chose.

La mère :

Ne parle pas comme ça d’Oussama. Tu sais bien qu’au fond c’est un gentil garçon !

La première femme :

J’ai toujours dit qu’il finirait mal. Vous l’avez pourri, dorloté, il n’a jamais connu de limites et maintenant c’est le bouquet !

Une autre femme ( un peu plus jeune.) :

Moi je l’aime comme il est. Je sais bien qu’il est un peu fantasque, mais il est encore bien jeune !

La première femme :

Tu exagères ! Il a quarante trois ans ! Ce n’est plus un gamin !

Le père :

Vous trouvez bien entendu toujours des excuses ! Je pense que je vais prendre la décision de le déshériter. Au moins partiellement. Il a cinquante frères et sœurs : il se débrouillera bien dans la vie…. Et qu’il continue donc à vivre comme un truand !

( La mère sort sans rien dire. Le père prend le journal et le lit. Les deux femmes retournent à leurs occupations.) Noir.

La lumière se rallume : la famille Ben Laden a disparu. Un homme déguisé en mendiant entre en scène. Puis il se met à parler :

Mollah Omar :

Je suis le Mollah Omar, vous savez bien : celui que Bush surnomme « le deuxième bandit d’Afghanistan » ! Et pourtant je suis un homme simple. Je ne bois pas, je suis fidèle à mes cinq épouses ( Dieu protège leur âme), je n’ai pas de vices cachés. Au fond je suis un homme comme vous … et moi ! ( Il rit en disant cela..)

Les meilleures troupes du monde, les plus entraînées, celles qui disposent du matériel le plus sophistiqué sont à ma recherche depuis des mois et des mois : elles sont incapables de me débusquer ! Je suis tout simplement dans un pays développé (que je ne nommerai pas), hébergé par des amis de notre cause sainte et juste. Que le seigneur soit avec vous ! Allah akhbar ! ( Ilse retire.)

Noir.

La scène représente un café. Deux tables de consommateurs : trois et deux. Le garçon passe et repasse. A une des tables un homme chuchote, dont on ne comprend pas les paroles, est pris par le garçon et les consommateurs de l’autre table pour Ben Laden . Une mêlée a lieu : l’homme arrive à montrer ses papiers d’identité : ce n’est pas Ben Laden mais un agent de la sécurité… Aucune parole sauf « Ben Laden » n’est échangée.)

Noir.

Une voix : ( Dans le noir.)

Ben Laden est partout, à la campagne, dans toutes les villes, dans toutes les montagnes. Et bien sûr notamment aux Etats-Unis. Des primes énormes sont proposées pour sa capture. On l’a arrêté dix, vingt, trente fois : mais ce n’était jamais lui. Il semble qu’il y ait des milliers de Ben laden qui circulent à travers le monde. Il est absolument impossible de découvrir le vrai, l’unique, le Ben Laden en or ou en diamant ! Figurez-vous que Georges W. Bush s’est mis en tête qu’il pourrait le débusquer en Irak ! La guerre d’Irak a eu lieu , et en trois ou quatre semaines, au prix de dizaines de milliers de victimes, pas de Ben Laden, pas d’armes de destruction massives, rien à se mettre sous la dent, sauf du pétrole bien entendu !

La voix s’arrête. La lumière revient. Un chanteur ou une chanteuse entre en scène et chante :

9ème chanson : « l’opinion publique des pays développés s’inquiète de ne pas avoir de nouvelles de Ben Laden. »

Entre un autre( ou une autre) chanteur(se) : ils se regardent en chiens de faïence.

10ème chanson : les pays sous-développés s’amusent de la traque de Ben Laden.

Noir.

Une voix :

Et maintenant une annonce exceptionnelle : en direct sur notre T.V. Georges W. Bush notre très grand Président va s’adresser à l’ensemble de nos compatriotes ! Dans une minute vous allez assister à un événement extraordinaire. Attention : cinq, quatre, trois , deux, un ! Je vous invite à écouter en direct G.W.Bush !

Lumière. Un homme déguisé en cow-boy entre en scène. On sent qu’il est un peu maladroit, mais extrêmement en colère ! Il trépigne sur place ; il met dans sa bouche un bout de bretzel, puis avale sans coup férir deux verres de whisky, puis enfin, la gorge dégagée il se met à chanter :

11ème chanson : Georges. W. Bush dans son cabinet se plaint de ne pas avoir enfin Ben Laden sous la main!

Noir.

Acte III :

( 4 personnages. 2 femmes, 2 hommes, sont sur scène. Ils parlent successivement au public. La lumière s’allume sur chacun, chacune, quand ils prennent la parole.)

Première femme :

Tout ne va pas très bien en Grande Bretagne. Ainsi hier en fin d’après-midiun terrible drame s’est produit dans le métro à la station Waterloo. Vous savez bien où se trouve cette station . C’est vraiment dans le cœur de la capitale. Eh bien une femme jeune, normale sous tous les rapports s’est jetée sur la voie au moment où entrait le métro. Elle a été déchiquetée sur le coup. On dit que c’est à cause d’une histoire d’amour qui aurait mal tournée. Allez savoir ! Peut-être avait-elle perdu sont travail, ou bien était sans le sou.. ;

Premier homme :

C’est comme cette malheureuse histoire qui vient de se produire en Italie. Au sud de Rome, dans un petit village il y avait une fête. Une belle fête quoi ; une fête comme nous en rêvons tous : des stands, des jolis costumes, des chansons et des danses. Et puis de bons petits plats bienmitonnés. Une vraie fête. Au cours d’un concours de dégustation de spaghettis, le vainqueur, qui avait déjà dégluti trois kilos de ces succulentes nouilles, s’est brusquement écroulé sur scène, frappé de syncope ! C’est vraiment malheureux d’en arriver là , n’est-ce pas ?

Deuxième femme :

Une histoire un peu similaire vient de se produire en France : un homme bizarre au cours d’une fête de jeunes, s’est brusquement mis en colère et a sorti un couteau ( genre opinel) et s’est précipité sur un groupe de jeunes qui étaient à son niveau et s’est mis à tailler là dedans comme de la viande ; deux types membres du service d’ordre se sont alors rués sur lui , ont réussi à le mettre à terre et a l’immobiliser !

Deuxième homme :

Vous ne trouvez pas que toutes ces histoires bizarres sentent un peu trop le Ben Laden ? ce Ben Laden qui hante le monde, se trouve dans tous les mauvais coups, dans toutes les tueries ! J’espère que la police mondiale mène une enquête sérieuse sur tous ces incidents !

Première femme :

Vous ne savez pas ce qui vient de se passer aux Etats-Unis ? On apprend qu’un gamin de quinze ans qui prenait des cours de pilotage s’est, au cours d’une leçon, approprié un petit appareil, il a mis les gaz et hop ! En avant toutes sur la petite ville qui était à cinq minutes de l’aéroport ! Il est rentré à fond la caisse dans une petite tour de vingt étages occupée par des sociétés… Il était seul, c’était un samedi après-midi. Il a été la seule victime : vous vous rendez compte ? Il y a vraiment beaucoup de dingues aux states !

Premier homme :

Ne croyez pas qu’en Russie ça aille mieux : la situation économique depuis plus de 10 ans est catastrophique pour plus de 50 % de la population. En plus il y a la guerre terrible de Tchétchénie qui n’arrange pas les choses. Jamais la détresse d’un peuple n’a été aussi grande. Il faut dire que les Russes sont fatalistes jusqu’au bout des ongles ! L’hiver qui vient de s’écouler, on a assisté à la mort de plus de 999 personnes qui étaient dehors ( d’après des statistiques officielles qui ont tendance à être minorées) . Soit elles n’avaient pas d’abri pour se protéger, soit elles ont bu une vodka de très mauvaise qualité qui les a terrassés, soit peu être pour la combinaison de ces deux facteurs !

Deuxième femme :

Moi je voudrais vous parler d’un tas d’autres pays où tout va mal ; pas de boulot, l’immigration vers les bidonvilles des villes surpeuplées, pas de nourriture, des soldats qui s’entretuent pour quelques pennies, des femmes et des enfants qui se prostituent à tout va, pas d’avenir, pas de vie digne d’être vécue, les prisons pleines de rats et de prisonniers ; les gardes-chiourmes sans aucune pitié : voulez-vous que je vous cite les pays où tout cela a lieu ? En Asie, en Afrique, en Amérique latine, en Amérique du Nord et à Guantanamo… Au fait savez-vous où se trouve Guantanamo ?

Deuxième homme :

Je vous le dis bien fort, toute cette misère, tous ces ennuis proviennent d’une seule et même cause : Ben Laden ! Tant que les racines de ce mal n’auront pas été extirpées le mal planera endémique, sournois, prêt à fondre sur chacun, en tous lieux ! Nous sommes engagés dans un processus inaltérable où tout se perd, tout se fond, tout se remplace, sauf la possibilité d’accéder au paradis, le seul le vrai, celui de dieu, l’unique, l’inaliénable ! Celui pour lequel l’humanité a aspiré du plus profond de son être, depuis des millénaires et des millénaires !

Première femme :

Ce sont des fadaises et des fadaises ! On cherche à nous faire croire à un danger soit-disant islamique, à un personnage extraordinaire qui aurait tout décidé et réalisé de lui-même : c’est un mensonge éhonté ! Ne croyez pas à ces balivernes ! Ben Laden n’existe que dans la tête des Américains qui l’ont entièrement inventé ! Il n’est pour rien dans les attentats du 11 septembre. Dans quelques années (combien ?) nous saurons exactement qui a fait le coup : ce sont vraisemblablement des éléments de l’extrême - droite américaine, des spécialistes des coups tordus, des psychopathes névrosés qui ont la haine au ventre pour des raisons obscures. Souvenez vous de l’assassinat du Président Kennedy en 1963 : on avait pendant des dizaines d’années prétendu que c’était Oswald, le pro-communiste qui était l’assassin ! Le dénommé Ruby, malade au dernier degré d’un cancer, l’a assassiné froidement à l’intérieur d’un commissariat. Nouscommençons maintenant seulement à connaître la vérité sur cet assassinat ! Bush et ses valets, le peuple américain à 75 % croit aujourd’hui à ces inepties. Le gouvernement réactionnaire américain a manifestement besoin de lancer ces énormes bobards qui sont pris pour argent comptant par les gouvernements alliés des Etats-Unis ! Assez de baratin ! Taisez-vous ! Ne prenez pas les gens pour des imbéciles !

( Noir. La lumière s’abaisse et se rallume au centre de la scène où apparaît une chanteuse.)

12ème chanson : Des évènements dramatiques traversent le monde.

Fin de la chanson. Noir.

La lumière se rallume : quatre hommes en vêtements oranges, des boulets aux pieds tournent en rond en silence. Brusquement la musique éclate : ils chantent.

13ème chanson : sur la base de Guantanamo, les condamnés sans procès se révoltent et chantent.

Noir.

Les personnages disparaissent. La lumière revient : retour de la chanteuse.

La Chanteuse :

Ce monde dans lequel nous vivons n’est pas d’un drôle extrême !( S’adressant aux spectateurs) Qu’en pensez-vous vous autres ? Ce n’est vraiment pas folichon d’habiter au Pakistan dans un bidonville, en Afrique à 10 ans d’être enrôlé dans une armée de mercenaires , aux Etats-Unis de croupir à 16 ans dans une prison en attendant la mort, et en Europe de vivre dans des banlieues sordides sans espoir d’un travail sérieux ou d’une rente….

( Elle commence sa chanson ) :

14ème chanson : tout devient fou dans le monde et moi je ne me sens plus très bien !

Noir.

Fin du troisième acte.

Epilogue

Devant le proscenium une femme fatale argentine s’adresse au public :

La femme :

Il existe un pays dont on ne parle qu’épisodiquement dans la presse officielle ( celle qui vous gave l’estomac et les sens), ce pays s’appelle l’Argentine. Vous avez certainement entendu parler du F.M.I de l’O.M.C. , des dettes énormes de l’Argentine ( qui pèsent sur les pauvres Argentins ou les membres de la classe moyenne ), ainsi que du refus du FMI d’accorder de nouveaux prêts. Moi ici je vais vous parler d’une Argentine que vous ne connaissez pas ou très mal. Je vais vous parler de ce qui se passe dans les villes, du nord au sud.

L’Argentine était il y a vingt ans encore le dixième pays du monde en termes de richesse moyenne par habitant. Les Argentins n’étaient pas trop malheureux et ne se posaient aucune question ( pas plus qu’en France) sur leur niveau de vie moyen. Ils ont vécu l’ère démagogique de Péron ( 1ère et 2ème version), ils ont vécu la dictature militaire qui s’est soldée par la défaite militaire des Malouines en 1982, ils ont vécu l’ère du radicalisme – c’est-à-dire de la corruption étalée au grand jour, depuis 1989, ils ont vécu la privatisation de tous les services publics ( qui étaient nombreux) et leur accaparement par les grandes compagnies étrangères à qui les différents gouvernements argentins ont offert cette manne céleste. Les profits par milliards de dollars ont foutu le camp du pays, et la détermination du prix du Peso garanti par rapport au dollar a été une véritable catastrophe ! Si bien qu’aujourd’hui tous les partis gouvernementaux sont vomis par 75 % des Argentins. Ils sont tous corrompus , tous « pourris ». Les Argentins dans les villes grandes et petites s’organisent en assemblées populaires permanentes, par quartiers, avec toutes les coordinations nécessaires. Ces assemblées ont différentes missions : des missions de discussion sur la situation politique, des missions de solidarité effective pour trouver les moyens de venir en aide aux plus démunis et des missions d’autogestion de l’économie et de la société.

Vous autres européens qui vous engagez doucement vers le libéralisme, voilà exactement la situation qui vous attend dans quelques années si vous laissez le processus impitoyable s’installer ! Vous verrez petit à petit tous les services publics foutre le camp. Cela commencera par les retraites : on vous fera travailler jusqu’à 65 puis 70 ans. Vous verrez petit à petit la grande majorité des travailleurs vivre au SMIC et si vous n’y prenez pas garde vous vous retrouverez au niveau de l’Argentine d’aujourd’hui, dans la mouise jusqu’au cou !

Citoyens ! On vous a menti ! L’affaire Ben laden n’a rien d’un épisode nouveau de la lutte terroriste contre les Etats-Unis et leurs alliés ! réveillez-vous ! Regardez en face l’Argentine qui vous montre la voie à suivre !

Elle se dirige vers un côté de la scène. La lumière s’amplifie, et on entend une musique ; c’est un tango.

Deux danseurs entrent alors en scène en dansant le tango argentin. Elle les regarde danser pendant un petit moment( 2 à 3 minute) puis les applaudit. Enfin elle se met à chanter sur le même air :

15èmechanson : en Argentine un couple danse un tango révolutionnaire…

La chanson s’arrête. Les danseurs dansent pendant un petit moment puis s’arrêtent. La lumière sur scène est à son maximum. Petit à petit tous les personnages rentrent successivement en scène. Chacun, chacune reprennent le 1erpuis tous les couplets de la chanson . Tous évidemment reprennent en chœur le refrain de L’Internationale et saluent le public le poing levé !

16ème chanson : la chanson de la fin.

Fin de : « Mais où est donc passé Ben Laden »

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