Ci-dessous un « billet » intitulé « Mains invisibles » (II) mis en ligne par « I-Cube », le 6 janvier 2014 :
http://infreequentable.over-blog.com/article-mains-invisibles-3-121872333.html
Extraits…
La conversation se poursuit.
C’est comme ça et pas autrement, que l’affaire « Kakazucack » a démarré entre la poire et le fromage sur un bout de table de chez « Maxim’s »…
Avec tous les effets connus durant l’année 2013 et les suivantes, notamment la démission de l’intéressé, l’enquête parlementaire qui échouera à mettre en cause l’Élysée et la tête du gouvernement, la mise en place d’un dispositif de transparence de la vie publique qui obligera 8.000 élus et hauts-fonctionnaires (à peu près les mêmes parmi les survivants encore en exercice, et leurs successeurs, que les listes de Paul sortiront plus tard), dès le courant 2014, à remettre à une haute-autorité une déclaration de patrimoine et la foirade sur la réforme des institutions et du « non-cumul » des mandats.
Le tout avec des effets bien trop tardifs à prévoir pour ne pas appliquer la première idée de Paul et de son affaire de virus dans les ordinateurs de son inspecteur pour faire tomber son propre redressement fiscal d’un montant « historique »…
Et, en pluie fine, les catastrophiques effets pour le lanceur d’alerte qu’aura été le journal internétique, qui se mangera un redressement fiscal « à la hache » entre les dents, plus quelques retombées idoines qui suivront…
« On digresse. Vous vouliez me parler de quoi ? » reprend l’amiral.
Paul est un peu perdu après tout ce qu’il vient d’entendre sur les comptes japonais et autres d’une autre époque. D’autant que ça cadre assez bien avec ce qu’il commence à deviner des fichiers de Gabrielle.
« Ah oui… Bon voilà comment les choses se présentent. La fameuse cellule de liquidation des actifs fonciers de Bercy est un peu perdue et me demande de l’aide. En fait, c’est moi qui la lui ai bêtement promise, croyant que ce serait simple. Or, c’est affreusement compliqué, puisqu’il s’agit de croiser un fichier de plusieurs milliers de vraisemblablement de faux-noms avec un autre fichier de plusieurs dizaines de milliards de lignes d’écritures comptables par an, portant sur des dizaines de millions de vrais comptes. »
Une aiguille dans une botte de foin, c’est ça…
Pas qu’un peu, oui !
« Et ça mènerait à quoi ? »
Eh bien à plusieurs choses, dont les fameux milliards manquants…
« Je vous explique. Il s’agit de retracer les mouvements de fonds depuis l’origine du trust originel et de suivre les paiements et remboursements d’investissements, vous savez, le stock récupéré, mais plus finement, jusqu’à aller retrouver les lignes de paiements des coupons.
On aura les dates, les adresses, on peut retrouver les montants, mais il s’agit de repérer les comptes d’arrivée et qui se cachent derrière. »
Et ensuite ?
Et ensuite quoi, se demande Paul.
« – Ensuite, on frappe à la porte des gens, on leur laisse le choix Corse…
– C’est quoi, ça, le choix Corse ? La valise ou le cercueil ?
– Non ! Canal-habituel ou Canal-Historique, à moins qu’ils ne remboursent ! »
Gros éclat de rire de l’amiral qui se laisse surprendre par la réplique…
« C’est la vraie raison qui m’ont fait vous inviter jusqu’ici. Il y a des fonds-manquants qui m’oblige à vous dire que vous aviez raison. Sur les 35 milliards ramenés, il en manque autour de 15 milliards, versés à des tiers-minoritaires depuis fort longtemps. Sous forme de dividendes. Et quand vous faites le total, même à la louche, il y en a pour le montant que vous m’indiquiez cet été. Peut-être plus ! »
Gustave Morthe-de-l’Argentière se laisse aller sur le dossier de son fauteuil… Et en écluse lentement et avec gourmandise une gorgée de cuvée d’hospices de Beaune servie avec la bavette et son fondu d’échalote-maison, après avoir émis un petit sifflement.
« En quoi puis-je vous être utile ? »
Il voulait des locaux pour créer son « second-bureau ».
« Vous les avez si vous me chapeautez ce travail. Moi, je n’en aurai pas les moyens matériels. »
Avec du monde à lui ?
« Avec qui vous voulez. Mais vous me rendrez compte, à moi et seulement à moi, et de l’intégralité au fil du temps, pour une fois, amiral ! »
Et pourquoi donc seulement à lui ?
« Parce qu’il s’agira ensuite, et selon la situation exacte des recoupements, de bâtir une stratégie de récupération discrète au profit du Trésor. Faudra inventer un « mécanisme » encore plus discret que le premier pour ne pas se laisser piéger par le premier IC venu. »
L’amiral fait semblant d’hésiter, mais il savoure ce moment de grâce du « bonheur d’avoir eu raison ».
« C’est ok. Je vous organise ça, vous dirigez l’opération, parce que vous êtes plus compétent que moi dans ce domaine et vous embauchez ma soldate. Uniquement celle-là mais à 3.000 plus les tickets-restaurants ! »
Paul s’étouffe… Qu’est-ce qu’ils ont tous avec leurs tickets-restaurants ?
« Vous croyez qu’ils les prennent ici ? »
Gros éclat de rire partagé…
« Comment avez-vous fait, la première fois ? »
Paul hésite… Se souvient-il, au juste ? Et puis il se décide à cracher le morceau, puisqu’il embauche la maîtresse de l’amiral, placée sous son autorité personnelle, à s’en faire tous les trois complices de tout le reste.
« Vous êtes bien conscient que désormais votre vie, celle de votre protégée et la mienne ne tiennent que par nos propres silences et capacités à garder un secret… secret ? »
Oui.
« Le trust de droit anglais, ça n’existait pas en droit continental, sauf chez les néerlandais, mais sans le secret bancaire de la City. Et celui créé pour Thiersmirant avait pour objet social exclusif de recueillir les fonds, de les gérer et administrer en vue de les restituer en 2016 à l’État français, ou à l’un de ses démembrements constitués sous forme de fondation.
C’est là que manifestement tous les fonds ont d’abord été consignés après quelques passages par divers banques et instituts financiers en Suisse et au Luxembourg pour brouiller les pistes. On a recoupé tout ça à l’époque, grâce aux extraits de fichiers Promis qu’Almont, justement, m’avait fait remettre. Nous avons donc pu retracer ces mouvements originels à coup de millions de dollars, jusqu’au trust anglais.
Je vous rappelle au passage que de fondation, il y en a une qui attend et qui est justement l’héritière de la mémoire du Président Thiersmirant, gérée par quelques fidèles, anciens ministres, dont celui de la culture, la fille adultérine, etc. »
Oui, bé elle attendra…
« Mais pourquoi 2016 ? »
Les 100 ans de Thiersmirant et son complot contre la Vème République qu’il détestait.
« Une excellente façon de montrer post-mortem qu’il avait bien raison, puisqu’elle permet à n’importe quel ministre, qui plus est quand il s’agit d’un Président, de voler l’État sans que personne ne le sache, dès lors que les frontières ne sont pas franchies par cet argent ! »
Une belle réussite…
« Or, en 2008, sans le savoir, Krasoski crée avec sa LME ce qu’on appelle les FDD, les fonds de dotation, qui fonctionnent comme une fondation, mais sans apport en fonds-propres, qu’ils peuvent récupérer et collecter par la suite pour financer leurs activités, et selon une procédure simplifiée de déclaration. Leur objet légal est donc aussi de recevoir des fonds à gérer, mais en vue d’un objet social ou d’intérêt général. On a donc « calqué » l’objet social d’un FDD à créer sur celui du trust, mais en oubliant l’échéance. »
Et ça a marché ? Les anglais ont accepté comme ça, sans tiquer ?
« Oui et pour plusieurs raisons. La première c’est que la date prévue devait correspondre à une élection présidentielle majeure. 2016 en comptant en septennat. Or, on est passé au quinquennat et en 2016, il n’y aura pas d’élections, sauf dissolution de l’Assemblée ou décès ou démission de l’actuel Président… »
La seconde tenait aux pressions américaines.
« En 2007, l’américain républicain finissant son second mandat fait pression sur le nouveau français dès le début de son quinquennat pour que cette affaire soit réglée rapidement, avant l’élection du démocrate en 2008 pour ne pas laisser de trace, mais surtout parce qu’il sait que la crise des subprimes est déjà enclenchée et que le dollar va souffrir. Mais ça traîne. La CIA ne sait plus comment faire jusqu’à l’épisode des balles de 9mm. Or, je suis déjà en piste ! Même si je patauge grave.
Mais ils veulent surtout et absolument récupérer leur pognon secret…
Enfin, la troisième raison, c’est que les britanniques, qui soufflent le chaud et le froid sur l’Euro et l’Europe comme à leur habitude, font également pression sur le gestionnaire du trust pour régler ça rapidement, au moment même où Krasoski leur fait prendre des cheveux blancs avec sa « moralisation de la finance mondiale » au sommet de Londres fin 2008.
J’imagine qu’ils ont dû en avoir des ulcères en même temps qu’ils ont dû se tourner plus de 7 fois la langue dans la bouche entre deux tasses de thé pour ne pas lui cracher le morceau à la face du monde… »
L’image fait sourire l’amiral.
« Et la quatrième, c’est que le gérant du trust n’attendait qu’une seule des exigences de son objet social, c’est que ce soit un émissaire français, dûment habilité, qui vienne lui en faire la demande personnellement. »
Rien de plus simple quand il a franchi la porte de Lady Joan.
Quoique… Il a fallu qu’il en passe aussi par ses quatre volontés et paye de sa personne en plus.
« Je vois, » lâche l’amiral. « Et ensuite ? »
« Facile ! On crée le FDD qui reçoit les fonds et valeurs. Dans la foulée, on crée trois sociétés civiles de portefeuille à capital variable. Je suis le gérant des quatre structures. Et une fois les fonds recueillis, j’en fais immédiatement la répartition en dotant chacune des structures civiles d’apport équivalent, l’un à la destination des fonds aux USA, en fait à l’Otan, les deux autres en fonction de la nature des avoirs, mais à destination du Trésor public. »
Il aura fait mettre les échéances les plus liquides dans celle destinée aux américains.
« Un gros travail d’arbitrage… Dans la seconde on a mis tout ce qui était à prépondérance immobilière et dans le troisième, tout le reste. »
Ce n’est pas un produit imposable pour ces sociétés ?
« Non, ce sont des apports et sans droit de mutation, puisque l’ensemble des avoirs est dématérialisé. Là où il aurait dû y avoir des droits, c’étaient seulement sur les biens immobiliers certains et réels, mais j’ai laissé le Trésor se démerder avec lui-même pour régler ce problème.
D’autant que pour les SC, j’en suis un des associés et le FDD est l’autre. Dans celle destinée à l’Otan, je leur ai fait souscrire des parts en capital pour 1.000 balles et avec les sous, on s’est remboursé. Hop, réunion de toutes les parts en une seule main, transmission universelle de patrimoine portant sur des titres liquidables et des valeurs en numéraire, ni vu ni connu, c’est passé direct dans leur poche !
Idem pour les deux autres SC, j’en suis ressorti et le FDD aussi pour la valeur faciale de nos apports en capital, et le tout est juridiquement la propriété du Trésor qui en dispose de comme il l’entend. »
Et comme la plupart des avoirs étaient des emprunts du Trésor lui-même, Krasoski a pu déclarer en décembre 2009 qu’il les remboursait avec son « grand emprunt »… Fabuleux !
Pourtant, le patrimoine des sociétés civiles aura augmenté considérablement entre-temps. On ne peut pas ressortir au même prix que celui d’entrée.
« Effectivement, si le gérant avait dû convoquer une assemblée générale fixant une nouvelle valeur de la part, notamment à l’occasion de l’arrêté des comptes de fin d’exercice. Et encore, seulement si le FDD qui fait la donation, toujours sous condition de retour du droit de suite des donations dans ces cas-là, avait survécu aux SC. Mais, on n’a pas eu le temps de clore ne serait-ce qu’un seul exercice de fin d’année.
Les SC et le FDD ont été dissous avant le 31 décembre. Ni vu ni connu, vous dis-je ! »
Sifflement d’admiration de la part de l’amiral.
« Je comprends mieux que vous teniez à passer le délai de prescription. Vous dormirez mieux ensuite. Parce que là, votre Denis d’inspecteur central, il peut encore vous considérer comme gérant de fait à contrôler et réclamer quelques explications, sauf à vous redresser sur les 35 milliards ! » Et réclamer des pénalités de mauvaise foi.
C’est aussi pourquoi Paul n’a pas du tout envie de lâcher le contrôle des 15 milliards à suivre : « J’essayerai un autre schéma qui nous mette à l’abri de ce genre de risque. Là, à l’origine, on avait fait signer un rescrit fiscal qui lave l’opération de toute tentative de redressement. Lespoix ne peut pas me redresser personnellement là-dessus, je suis confiant, même si le vrai danger sera de lui expliquer dans le détail l’opération pour qu’il juge de sa conformité au rescrit, ce qui révélera l’opération à ce connard.
En revanche, je ne me vois pas demander un rescrit équivalent sur les queues au même ministre des finances qui provoque le contrôle de mes boîtes ! Il ne va jamais accepter. »
Raison de plus pour le faire sauter.
« Oui, enfin, on peut aussi pratiquer un chantage : tu signes et tu as le pognon, tu ne signes pas et tu ne le reverras jamais. Mais comme vous me savez honnête, ça me ferait vraiment mal aux couilles de devoir en arriver-là, vous imaginez bien ! »
L’amiral imagine volontiers…
« Pour le ministre, laissez-moi faire. Il sera toujours temps de voir. Parce que là, je ne vois pas trop comment vous allez récupérer 15 milliards versés à la petite semaine pendant 20 ans sur les comptes de milliers d’attributaires minoritaires non-identifiés. »
Là, sur le moment, Paul non plus ne voit pas, à vrai dire.
Premier billet de la micro-série : Cliquez ici !