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Billet de blog 15 octobre 2016

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Présidentielles : "Pour gagner, il ne faut pas jouer perdant."

"Pas étonnant que la gauche, la vraie (cré nom de dieu) ne gagne jamais une élection." (Au sortir de son conciliabule avec Maurice, Raymond insiste. Quel joueur !)

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"Il est de notoriété publique à gauche que la Vème république est bananière.
Clientélisme et démagogie à tous les étages, des institutions vérolées par un bonapartisme génétique qui s'est insinué dans tous les appareils politiques, le culte du chef règne en maître sur notre démocratie monarchique. Collectivités locales, départements, régions, rien n'est épargné jusqu'au sommet, nous sommes tous (ou à peu près) d'accord.
Mais ne voilà-t-il pas qu'à l'approche de la grand messe des présidentielles, tout d'un coup, fini le recul réflexif, fini l'analyse critique habituellement poussée jusqu'au sarcasme, tout le monde plonge et s'apprête dans la plus parfaite insouciance à venir jouer les enfants de choeur pour un service liturgique toujours plus ostentatoire, jusqu'à l'apotéose de la communion nationale dans l'ultime combat du second tour.
(C'est vrai que ça sent le bon gaulois ce combat des chefs. Finalement Sarko...)
Bon, revenons à nos moutons.
Donc au moment où cette Vème République n'en fini plus de pourrir sur pied, de tomber dans le ridicule mais tragique reniement des grands principes et du si glorieux héritage auxquels elle prétend se référer en préambule de son "livre", ne voilà-t-il pas qu'en foule tous viennent renouveler leur hommage, et prenant l'affaire au sérieux qu'elle ne mérite pas, réveiller le cadavre.
Dès la nouvelle entrée désormais codifiée des "primaires", les thuriféraires de tous poils s'accordent pour venir de concert nous secouer l'encensoir sous le nez, à l'occasion de l'office liminaire dit, pour l'occasion et par le hasard d'anticipations stratégiques de longue date cyniquement assumées, "des primaires de la droite et du centre".
(N'était l'aversion naturelle de Félix pour le graveleux n'aurait-il pas d'ailleurs été plus juste de dire "préliminaire" ?)
Les uns, paradoxalement en refusant au nom de la morale de se compromettre en y participant.
Les autres, tout aussi sérieux en se précipitant pour nous la jouer sérieuse.
Comme s'ils voulaient manifester leur foi après avoir, tous autant qu'ils sont, tant de fois déclaré qu'il fallait en finir une bonne foi pour toute, et juré qu'hormi une hypothétique VIème république point de salut.
Le plus étonnant étant qu'ainsi les uns et les autres s'engagent sans moufter, à perdre une fois de plus le combat qu'en dépit de leurs grandes déclarations, souvent fracassantes et parfois même vociférantes, ils refusent.
Plus étonnant encore pour le prix d'un, ils vont perdre cette fois-ci deux combats d'un coup.
Oui, puisqu'il est question à les croire :
1 soit d'aller aux primaires de la droite voter Juppé pour éliminer Sarkozy.
2 soit, de ne surtout pas se compromettre en participant à cette mascarade.
(Revoir le fil de discussion étonnant -plus de 1000 commentaires- de l'article non moins étonnant de Stéphane Alliès. Où l'on voit par exemple plus de 135 personnes souscrire au premier commentaire signé par le camarade Axel J. Et on est encore plus étonné de découvrir dans la "boîte noire" de l'article que : "Une large part de l'équipe de Mediapart (journalistes, mais aussi  non-journalistes) a apporté sa pierre à l'édifice de cet article, lors de discussions ou par mail." Ce n'est plus une "boîte noire", c'est une lessiveuse, et au sortir, en guise d'édifice, on ne voit qu'une eau de vidange douteuse répandre les nuances de bien pâles couleurs.)
Qu'il s'agisse d'une mascarade ne fait aucun doute.
Comment pourrait-il en être autrement puisqu'il ne s'agit que du premier temps du prélude à la prochaine mascarade suprême ?
Qu'on imagine y participer pour contribuer à l'élimination de Sarkozy en jouant Juppé est en revanche proprement stupéfiant.
Car en effet, c'est :
1- d'une part prendre au sérieux et cautionner la mascarade,
2- et d'autre part contribuer à placer le candidat de droite d'ores et déjà soutenu par la majorité de son propre camp, sur une imparable trajectoire gagnante de l'ultime duel face à la blonde ; autrement dit s'interdire à soi-même toute hypothèse de participation heureuse à la mascarade que l'on vient pourtant de cautionner.
Il y a sans doute beaucoup mieux à faire.
Puisqu'il s'agit d'une mascarade.
Puisqu'il s'agit d'une mascarade il y a abord lieu de ne s'embarraser d'aucun grand principe moral. D'autant plus qu'il est question d'aller jouer au milieu de margoulins plus ou moins repris de justice ou en instance de l'être, qui eux passent de toute façon leur temps sans se gêner le moins du monde à piétiner la morale et ne vénèrent que le gagnant à n'importe quel prix.
Puisqu'il s'agit d'une mascarade il ne peut donc qu'être question de jouer.
Et puisqu'il est question de jouer, autant jouer pour se faire plaisir.
Et pourquoi pas tenter la cerise sur le gâteau d'un coup gagnant.
Il faut partir du réel.
Quelles sont les chances de la vraie gauche aux présidentielles ?
Nulles. Comme d'hab.
Le seul qui part avec un potentiel de figurant honorable c'est Mélenchon.
[Certains vont tirer la gueule, "ouais... Mélenchon c'est pas la vraie gauche, Mitterand... patati, patata...".
Stop les gars. Raymond vous arrête tout de suite.]
On vient à l'instant de dire que c'est un jeu. Donc pas la peine de ramener des considérations théorico-historico-philosophico-politico sérieuses, voire argumentées.
On s'en fout, on n'est pas là pour se prendre le chou. Juste pour voir comment tirer au mieux notre épingle du jeu... qui est un jeu pourri. Il semblerait qu'il faille sans cesse vous le rappeler. Ça devient pénible, c'est la base. Faut suivre.
Donc, poursuivons, si l'on n'a aucune chance de gagner le pompom, qu'est-ce qu'on pourrait bien avoir à perdre ?
C'est une bonne question...
...Finalement rien, strictement rien.
Allons-y donc gaiement.
La qualification de Juppé semble aller de soi.

Déjouons ce pronostic qui en réalité satisfait toute la droite excepté peut être Sarko dans sa quête d'immunité. Tous les autres sont prêts à faire bloc contre lui au deuxième tour de leurs primaires, à lui faire endosser le rôle du paria, du bouc émissaire sur le dos duquel la famille se défausse de ses turpitudes, lave son linge sale et se ressoude derrière Juppé pour garantir sa fortune. 
Ajoutons donc nos voix à celles qui en provenance du FN viendront pour sélectionner Sarko, le plus fragile des deux, avec ses inombrables casseroles et toutes les rancoeurs accumulées contre lui.
Inutile de se déplacer au 1er tour de cette primaire, l'affaire ne se jouera qu'au second le 27 novembre et ne coûtera donc que 2€, le règlement ne stipulant pas qu'il ne sera possible de participer au second tour qu'à la condition d'avoir participé au 1er. 
Cette élimination de Juppé va d'abord créer un effet de surprise général, une inflation de spéculations échevelées dans la presse "main stream" et un profond désarroi à droite avec fractures ouvertes multiples et au minimum candidature dissidente de Bayrou. C'est déjà ça de gagné, et la mascarade jusque là feutrée tournera vite fait au grand-guignol sur la place publique.
Deuxième conséquence, cette élimination va mécaniquement resserrer la fourchette des scores au 1er tour de la présidentielle et abaisser le seuil qualificatif pour le second tour.
Et là, ressurgi Mélenchon.
C'est vrai, nous avons besoin de sa complicité.
S'il veut, il peut, mais le veut-il ?
Tout est là.
La question se pose de la façon suivante : parier sur sa capacité à arriver devant tous les autres challenger de la blonde (puisque tous les sondages nous la donnent gagnante du 1er tour) suppose qu'il veuille bien faire l'effort de ne plus faire peur (et que ses supporters historiques veuillent bien ne pas crier au traitre et le lâcher s'il adouci un peu son propos). Inutile dès ce premier tour d'en faire trop sur les nationalisations tous azimuts, la revanche fiscale sur les riches, le razage gratis à tous les étages et autres pulvérisation de l'UE. Ni même de s'énerver après les journalistes.
Le changement de république avec convocation d'une assemblée constituante, et ouverture d'une large délibération publique pour l'élaboration d'une plateforme de négociation de la réforme de l'UE doivent suffire.
Contribueront à cette première victoire :

  • la débandade tous azimuts des voix de droite, vers Marine, vers Bayrou, vers l'abstention... il ne restera que sa clientèle personnelle autour du détestable et détesté Sarko.
  • l'effondrement du vote socialiste, au profit de l'abstention (c'est ce qu'il faut limiter) et au profit de Méluche (c'est à quoi il faut travailler).
  • la mobilisation d'une partie des abstentionistes exaspérés, réveillés par la perspective d'un changement de régime.


Et enfin nous voici au deuxième tour.

Au temps de la cerise.
La situation est grave. L'heure aussi.
Jean-Luc, rempart de la démocratie.


Déconne pas Méluche c'est du sérieux.
T'occupe pas de la blonde, laisse là se démerder avec les économistes.
La parole à la prochaine constituante et basta !"


- Il est gentil Raymond, il s'est fait un joli film.
- En même temps... quelle alternative ? A gauche. Vu l'état des troupes.
- Macron ?
- Soyons sérieux Maurice !
- Bon alors c'est Juppé... ou la blonde.
- Si on joue perdant... c'est sûr, on peut pas gagner. Quelle merde ! Finalement il ne nous reste qu'une certitude :

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