Je viens de lire sur Politis (19/02) l’article de Michel Soudais : « La crise prend de l’ampleur », dans lequel il diagnostique, « … la crise sociale prend une tournure politique » <!--break-->(je ne le cite lui, qu’à titre d’exemple).
Voici des mois maintenant que les économistes nous ont expliqué que la crise était financière, la faute aux banquiers. Puis que les universitaires et penseurs en sciences sociales sont venus rectifier, elle devenait économique, le capitalisme : un système qui marche sur la tête. Enfin les politiques ont convenu qu’elle était désormais sociale, trop d’injustice et d’inégalité. Et nous voici enfin arrivé au moment où nos organes de presse découvrent une crise politique, absence d’alternative.
De quoi nous parle-t-on ?
Tout se passe en réalité comme si de proche en proche, en un remarquable effet de dominos, cette crise avalait un à un tous les corps mobilisés (comme en 14), montant au front les uns après les autres pour lui faire face, discrédités un après l’autre, chacun par le suivant aux yeux desquels il n’a pas su répondre aux attentes, opinion prise à témoin.
Les économistes ayant doctement posé leur diagnostic se sont trouvés en effet bien en peine pour rédiger une ordonnance, nos chercheurs incapables à leur tour de définir un modèle alternatif, les politiques en panne de charisme et de projet, c’est le moins qu’on puisse dire, comment la crise va-t-elle maintenant manger les journalistes, dernier rempart devant le citoyen en quête de lumières ?
Curieuse illusion d’optique ai-je envie de dire, et bien curieuse amnésie collective, ou l’art de confondre causes et conséquences.
Car enfin si les banques américaines ont eu recours aux « subprimes », c’est bien parce que l’économie américaine marchait sur la tête (et par extension l’économie mondiale toute entière), et non l’inverse.
Si cette économie marche sur la tête, c’est bien parce qu’elle est foncièrement anti-redistributive et exclusivement adossée à la cupidité sans limite d’une extrême minorité, et non l’inverse.
Enfin le libre cours donnée à cette cupidité procède bien de la perversion politique de nos démocraties, et non l’inverse.
Cette crise n’est rien d’autre qu’une crise profondément politique, ancienne il est vrai, mais qui aujourd’hui ne peut plus se masquer, enfin espérons le.
La vraie difficulté c’est que le cadre de sa résolution en tant que ce qu’elle est, nous fait défaut.
S’avançant masquée derrières les artefacts de l’économie, puis de la finance, elle s’est en effet internationalisée sans pour autant que l’exercice politique en fasse autant dans le même temps. Si bien que nous voici désemparés, désarmés, prêts à succomber à toutes les démagogies pour un grand bon en arrière.
Alors oui cette crise est éminemment et d’abord politique au sens où elle procède d’un impensé des valeurs fondatrices de la cité et de la démocratie modernes.
Et d’une hypertrophie de la pensée techno-socio-économiste qui en tient lieu depuis des lustres.
Bien sûr et à juste titre faut-il accuser les premiers idéologues libéraux (au sens français) de nous avoir engagés dans cette dramatique impasse en dévoyant l’humanisme des lumières.
Mais il faut aussi en finir avec les prescriptions politiques du marxisme qui nous enferment encore dans ce cul de sac matérialiste depuis près de 200 ans.
Mais il faut surtout, d’urgence, reprendre le chemin de la promesse humaniste.