Jean-Claude ICHAI

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Billet de blog 3 septembre 2023

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L’interdit est humain, monstrueusement

Ayant suivi avec intérêt l'agitation consécutive à la récente ponte d’un ponte, sous forme de circulaire textilo-stigmatisante, je livre ici quelques mots de ce qu'elle m'inspire aujourd’hui. À discuter, éventuellement...

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L'erreur n'est pas humaine, elle est l'humanité toute entière.

Quand on a dit ça on est bien avancé, pourrait-on railler.

Oui, quand on voit ça, on a avancé. Considérablement.

La compulsion à produire indéfiniment, comme une mise en abîme, de l'interdit, traduit toute l'étendue, et de la stupidité, et de la folie, qui forge l'homme.

L'exercice de l'interdit, comme de n'importe quelle forme d'autorité, nie à la seconde ou il est émis, l'intelligence. Et c'est en tournant ainsi le dos à l'intelligence qu'on entend résoudre les problèmes du monde.

L'interdit pré-voit, interdisant par conséquent, de voir. Il oriente l'esprit vers le temporel, le focalise sur la menace du temps, dans sa passion compulsive de la conservation, qui est un culte voué, non à la vie, mais à ce qui a été, autrement dit à ce qui n'est déjà plus, autrement dit à ce qui est mort. Alors que l'intelligence, la vie réelle, s'en fout complètement, elle est déjà ailleurs.

Interdire c'est zombifier, c’est crucifier l'élan, le désir qui caractérise l'a-temporalité du vivant.

L'amour est dans la relation. J'ai regardé récemment, pour la seconde fois, à 43 ans d'intervalle, le film "Elephant Man" de David Lynch, visionnaire et tellement profond dans sa progression vers sa conclusion, vers l'accomplissement entièrement lié au fait de se savoir aimé, de connaître ne serait-ce qu'un instant, c'est-à-dire pour l'éternité, la joie de la vie en partage et en fraternité, en l'égalité ultime, réelle, qui jamais ne meure, que la mort ne concerne pas.

La vie, et non son maintien, offre cette éternité. En vouloir davantage, vouloir d'elle, c'est l'affadir, la corseter, l'abîmer.

Vouloir la paix, c'est l'ignorer délibérément. Ce constat, fondamental, n'est pas fait, à ce stade de l'évolution, la préférence va pour le plus grand malheur de tous, à promulguer lois et interdits, à élaborer projets de paix tous plus intrinsèquement absurdes les uns que les autres, à glorifier des mérites débilitants. À cloisonner, encadrer, isoler, à exister pour soi-même. Durer est le maître-mot, et ton maître tout court. Le malheur, c'est durer.

Aujourd'hui, au nom de la menace de grand remplacement, on interdit tout et n'importe quoi, parce qu'on veut rester comme avant, contre toute vérité du monde réel, du monde vivant. Rester comme avant, voilà l'authentique pulsion de mort.

L'erreur n'est pas humaine, elle est l'humanité toute entière, elle la définit, dans l'aberration de l'existence individuelle.

Être aimé ne peut jamais être recherché, c’est un savoir, indépendant de la pénibilité inévitable et des épreuves traversées, et non une quête. Vouloir vivre ou être aimé est la négation de la vie, de l’amour.

Deux savoirs, dès lors, me semblent fondamentaux :

ON n’aime pas.
ON est aimé.

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