- Un rejet du « fond » du projet de Loi Travail:
Atomisation des règles qui gèrent depuis 1936 et 1945 le rapport Capital-Travail : le patron « libre » - une fois les pseudo-contraintes « imposées » aux employeurs levées - de licencier se trouvant face à l’ouvrier « libre » d’accepter ou de s’en aller – une fois que ses collègues, la mort dans l’âme (traites de la maison à rembourser, études des enfants à financer, etc.., auront voté à 50% le DIKTAT du patron- En bref, « la liberté du renard libre dans le poulailler libre » (pour citer un affreux révolutionnaire)….
- Un rejet de la « forme » de conception de ce projet :
- Refus d’une véritable négociation avec l’ensemble des syndicats, remplacée par le débauchage d’une centrale syndicale (CFDT).
- Passage en force sans élaboration de cette loi par les élus du peuple (le 49/3 est rejeté par 70% des Français).
- Refus d’un référendum sur cette question qui pourtant concerne la majorité de la population.
Et pourtant…67% des français ont une mauvaise opinion du secrétaire général de la CGT…Pourquoi ?
- On ne peut, bien évidemment, exclure le nauséabond…les neuf milliardaires qui contrôlent l’essentiel des médias y sont pour beaucoup. Il suffit d’ouvrir les journaux écrits, parlés, télévisés.
- Le nauséabond est-il la seule explication ? Je ne le crois pas.
La pédagogie du renoncement à l’idée qu’un autre monde est possible, que lutter sert à quelque chose vient de loin :
- Crédibilisation par le communisme français d’une gauche de « gauche plurielle » dès les années soixante avec la bataille pour le programme commun de gouvernement avec les socialistes au moment où n’allait pas tarder à se tarir les bases objectives de ce que les communistes appelaient à l’époque « les compromis de classe »,en bref le keynésianisme des Trente Glorieuses ; dès les années 70 ,la contre-révolution néolibérale se déployait(voir Samuel Huntington pour le corpus idéologique, les années Reagan et Thatcher pour leur mise en œuvre..les années 80 …) en attendant le mitterrandisme (années 80) le blairisme (années 90), le jospinisme (années 90 et 2000)…et pour finir le hollandisme (années 2010)….c’est à dire la participation active de la sociale-démocratie européenne à cette contre-révolution néolibérale.
- Effondrement de la mythologie d’un « Grand Arrière » - le « camp socialiste » mondial pour faire court aussi faisandé ou criminel fut-il. Il est difficile pour tout peuple de vivre sans mythe.
- Brusque accélération de la financiarisation du capitalisme concomitante à sa mondialisation avec pour conséquences la marginalisation croissante d’une part de plus en plus importante des populations les plus fragilisées par ce double phénomène. Marginalisation politique avec l’effondrement du soutien populaire aux PC (qui avaient lié leur identité à l’imposture soviétique), marginalisation économique (mise en concurrence des travailleurs entre eux), sociale (chômage de masse), culturelle (avec le corollaire lié à la mondialisation, l’ethnicisation de la vision des rapports sociaux d’où la montée de l’extrême-droite partout).
Désormais les politiques de centre-gauche et de centre-droit, fortes du vide politique créé par l’intériorisation des trois points mentionnés ci-dessus, ont pu se déployer …en étant de moins en moins centristes et de plus en plus de droite (qu’elles soient UMP ou PS en France, CDU ou PSD en Allemagne, ou autres pays…).L’objectif politique étant de créer une France, une Allemagne, une Autriche ,une Grande-Bretagne où le « dissociai » - les « protégés » contre les « exposés » - ,l’ethnique aura remplacé le consensus social issu du keynésianisme. Force est de constater que la contre-révolution néolibérale a marqué des points.
Le projet de loi travail est le révélateur aux yeux de la majorité de notre peuple du caractère implacable des logiques néolibérales …
D’où l’acharnement à décrédibiliser la CGT et plus généralement l'action syndicale qui symbolise la résistance à la segmentation sociale et à travers lui tous ceux qui refusent qu’on fasse passer l’humain après…
Par delà cette manœuvre - qui échouera- ne perdons pas de vue l’essentiel :
- Le soutien de l’opinion.
- La possibilité pour les frondeurs PS de faire preuve de courage - c'est très loin d'être gagné...Cambadélis veille…- en renversant Valls et sa loi.
- La nécessité absolue de conserver au mouvement son caractère démocratique (vote obligatoire pour la continuation des mouvements sociaux ce qui est le cas jusqu’à présent et qui doit le rester) en se gardant de tout comportement qui relève de la logique gauchiste des minorités agissantes. Le peuple français rejettera toujours - et à juste titre - cette logique là car il a vu les résultats abominables que cette logique a donnés dans le monde au XXe s.
Les bases existent pour un recul qui reste à imposer au gouvernement, recul qui n’est pas encore gagné pour toutes les raisons évoquées.