La Réunion, île volcanique isolée dans l’Océan Indien, à quelque 750 kilomètres à l’est de Madagascar, est un endroit merveilleux. Tropicale, basaltique, elle culmine à plus de 3000 mètres, coupée de profondes entailles creusées par les torrents. Déserte à l’origine, elle s’est peuplée de personnes habituellement paisibles et réservées, venant d’origines très diverses et qui ont conservé de leur histoire un humour très concret et l’habitude de côtoyer la variété des cultures et des religions locales avec familiarité.
Malheureusement, cette situation est très gravement menacée, et quatre grands sujets d’inquiétude sont immédiatement palpables :
La propriété et l’utilisation des sols
Les déplacements
Les déchets
L’énergie
Pour moi, ces menaces résultent directement de l’insularité et de la surpopulation, et du fait qu’il n’existe pas de modèle économique autonome adapté à une économie insulaire si peuplée. Elles conduisent à l’aggravation des inégalités, ferment connu des désordres de la société.
Ajoutons-y un facteur plus général, dont La Réunion ne peut s’exonérer : le dogme économique de la croissance, épine dorsale du modèle capitaliste néolibéral, couplé avec le système politique inadapté, interdisent de concevoir des alternatives pour la population de l’île.
Enfin les grandes décisions qui ont orienté le développement de l’île ces 80 dernières années ont été prises sans outillage pour corriger en cours de route leurs effets potentiellement délétères, même lointains1. J’en veux pour exemple le « choix » du tout automobile pour les déplacements.
La propriété et l’utilisation des sols
Le sentiment de sécurité nécessaire à l’exercice d’un contrat social apaisé est encore dépendant de la propriété de son domicile et/ou de son local professionnel. Mais la surface disponible ne permet pas de faire cohabiter l’habitat, les entreprises et administrations et les surfaces agricoles nécessaires à l’économie et à la subsistance des citoyens.
Les déplacements
Les décisions prises dans les années 50-60 ont conduit à la suppression du chemin de fer – sans développement de transports publics suffisants - et à l’importation massive de voitures individuelles. Ce phénomène a été aggravé par l’élévation artificielle du pouvoir d’achat, obtenu sur la base d’un écart de coût de la vie surévalué par rapport à la Métropole. Les voies de circulation sont saturées, l’urbanisme n’a pas anticipé ce risque d’embolie, à la fois dans les centres-villes et sur les trajets interurbains, avec notamment ses répercussions sur les livraisons des marchandises et l’accès aux soins. Sans parler des coûts des équipements rendus nécessaires par l’incivilité des conducteurs (dos-d’ânes, potelets et plots, balises et barrières anti-stationnement, appropriation de l’espace public etc.)
Les déchets
La croissance de la population et du pouvoir d’achat conduisent à une très forte croissance des importations emballées et des consommations. La question de la gestion des déchets n’apparaît dans l’espace public que lorsque les décharges, les centres de traitement sont saturées. Il est alors trop tard.
L’énergie
L’île doit importer la plus grande partie de l’énergie demandée par la population, croissante en nombre et en intensité des besoins. Créer des entreprises et des emplois, climatiser de plus en plus, se déplacer fabriquer les logements en nombre suffisant, exige une consommation croissante de carburants importés. Si pendant quelques années l’hydroélectricité a pu sembler une solution partielle pour la production d’électricité, la croissance des besoins l’a rapidement ramenée à la dimension d’accessoire.
La population
Ces menaces résultent et sont aggravées par l’augmentation de la population. En 1953, il y avait 253 750 habitants à La Réunion. La population en janvier 2020 est passée à 860 000 habitants, et elle est de 885 700 en janvier 20242. Soit une multiplication par plus de 3 en 70 ans.
Et en plus, une part importante de cette population fait preuve d’un constante incivilité (voitures sur les trottoirs, déchets dans la rue ou dans la nature et sur les bords des routes).
Bref, La Réunion est sur une mauvaise pente. Alors si vous pouvez, émigrez rapidement. Ou alors ? Agissons, pour ne pas rester complices !
1Voire stopper le projet à temps pour en éviter l’aggravation des conséquences négatives.
2 Elle était prévue à plus de 918 000 fin 2023, mais depuis la natalité a sensiblement baissé.