Lordon ne tremble pas quand il écrit:
Nous ne revendiquons rien. (...) C'est que revendiquer n'a de sens que dans un certain cadre qu'on reconnaît (...) comme hors du champ de la revendication elle-même. (...) Or, vient fatalement le moment où (...) l'impensé du cadre revient à la pensée. Non plus comme objet de "revendication" mais comme objet de renversement. (Blogs du Diplo, 29 mars 2016)
Lordon ne tremble pas. Serait-il comme possédé du daïmôn Achille, le fameux Fort de l'Iliade?
Notre histoire épique aura pourtant commencé comme ça: par une revendication qui n'en était pas une. Car jamais mênis (premier mot et thème de notre première épopée) n'aura signifié "colère", sinon dans les cendres de nos traditions philologiques. Une lecture post-dumézilienne de l'Iliade (oublions les références) pourrait montrer à la Muse ce qu'elle doit chanter: non pas la colère mais "la revendication" d'Achille. Revendication très spéciale: une demande en justice qui met l'ordre héroïque en péril - et qui se fait entendre. Cependant, si l'ordre héroïque est gros d'un ordre nouveau et non d'un désordre honni, la vie est courte: Achille devra mourir pour laisser place au conducteur-de-peuple Diomède, le "démagogue" de l'ordre nouveau. Notre premier récit nous aura donc sortis du cadre.
Lordon ne tremble pas. Nuit debout est ce hors-cadre où des demandes populaires s'équivalent et s'enchaînent peu à peu, elles-mêmes et d'elles-mêmes, pour devenir (si l'histoire est épique) non plus "des revendications" mais un cadre nouveau... Faut-il encore ne pas oublier cette vérité, ou plutôt cette condition de possibilité: la rencontre de Nuit debout et d'un Populiste.
Lordon ne tremble pas: c'est un Mélenchon qui arrive.