Lorsqu'en 1944 les Alliés passent l'accord dit "de Bretton Woods", ils ne savent pas dans quelle galère ils s'embarquent. Ces accords, instaurant le Dollar US comme monnaie des échanges internationaux, semblent normaux. L'affaire remonte à la Première Guerre Mondiale: en 1915, Français et Anglais sont financièrement au bout du rouleau et négocient des prêts à Washington auprès de banques US. Prêts qui ne seront que très partiellement remboursés: en 1931 l'Angleterre fit défaut! D'où les fameuses lois "Cash and Carry" des années 30 imposant aux acheteurs de produits US de payer cash...
Lors de la Seconde Guerre Mondiale, c'est dès l'hiver 1940 que Londres se tourna vers Washington. Et, par la force des choses les USA devinrent "l'arsenal des démocraties", à l'inverse de 1917. Lors de leur entrée en guerre en 1917, les USA firent appel aux arsenaux européens pour armer leurs "doughboys". F.D. Roosevelt, craignant une réédition des embrouilles précédentes, et l'étalon-or stricto sensu ayant été abandonné, ce fut le montage de Bretton Woods. Ainsi, le Trésor US pouvait espérer recouvrer sa "mise" en grande partie. Il ne se doutait pas qu'il ouvrait ainsi la Boîte de Pandore.
Il serait vain de se le cacher: le moteur principal de l'apogée industrielle de l'Occident, dès les années 20 fut la propulsion par le moteur à explosion, le Dieu Automobile. TOUTE l'industrie "de pointe" de cette période (jusqu'aux années 80) tourne autour de ce principe. Et l'économie est fondée sur le (relativement) bas prix du carburant: le pétrole. TOUTE les stratégies des années 1920-1980 tournent autour de la maîtrise des régions pétrolifères. C'est souvent une lutte sournoise. C'est sutrout une lutte sans merci.
Le commerce mondial, donc celui du pétrole, est libellé en Dollars. Les USA, plus exactement la Federal Reserve (banque PRIVEE) assurant l'émission de monnaie, ils ont en mains le robinet alimentant le commerce mondial. C'est le jackpot fabuleux qui les entrainera vers leur perte. Parce que ce "réservoir de monnaie" est alimenté directement par le commerce mondial, Lyndon Baynes Johnson se croit autorisé à rêver de la Grand Society, des USA où TOUS seraient très à l'aise financièrement. Et, parce que le crédit est nécessaire aux investissements et au commerce, il fondera sa Grand Society sur une "source inépuisable" de Dollars: le monde entier.
Faux calcul, à l'opposé de la doctrine Roosevelt du "risque calculé" où l'incitation et l'effet de levier du déficit public doivent être maniés avec la plus grande circonspection. Et puis Johnson est un Texan, très lié aux magnats du pétrole. Je soutiens depuis pas mal de temps que la vraie raison de l'intervention des USA au Vietnam a un nom, ou plutôt deux: Spratleys et Paracels, deux archipels de cailloux à moitié submergés de la MEr de Chine Méridionale que se disputent CINQ pays. Et qui sont "prometteurs" en termes pétroliers. Pas question de les laisser tomber aux mains de Communistes Nord-Vietnamiens ou Chinois.
La Guerre du Vietnam "coulera" l'industrie civile US; les bénéfices énormes du complexe militaro-industriel sont des fruits empoisonnés qui réclament LA GUERRE pour être moissonnés. Detroit et la Rust Belt sont la conséquence du Vietnam.... Mais le pire reste à venir. En 1971 Richard M. Nixon supprime les dernières traces de convertibilité du Dollar en or. Désormais, le Dollar sera gagé sur la santé économique du pays. Cela peut leurrer votre serviteur, mais ça ne passe ab-so-lu-ment pas avec les économistes, et surtout ceux qui ne sont pas US.
Personne n'aime à être payé en monnaie de singe. Or, dès les années 60 il y a un "problème du dollar"; en fait il y en a deux: les eurodollars et les pétrodollars. Les eurodollars sont issus du Plan Marshall: prêtés aux Etats européens en échange de clauses facilitant l'implantation d'industries US en Europe. Les pétrodollars résultent des achats de pétrole, des royalties versés aux pays producteurs. Ni les uns ni les autres ne doivent être rapatriés aus USA, à aucun prix: leur volume ferait automatiquement chuter le Dollar.
Dès les années 70, TOUTE la politique US va tourner autour de la défense du Dollar. Dollar dont la "valeur" s'apprécie à l'aune non plus de la santé économique US, mais bien à celle de l'économie mondiale. Et c'est le début du chantage perpétuel: les "alliés" des USA sont sommés de soutenir le Dollar, faute de quoi "l'économie mondiale s'effondre". C'est surtout, en fait, la peur de voir l'économie US s'effondrer comme en 1929 qui prévaut: les Présidents, les Congressmen, les Gouverneurs sont ELUS: pas question de couper le crédit, ce qui ferait basculer la population dans la pauvreté. Leur réélection en dépend.....
SI le Dollar perd sa position de monnaie des échanges internationaux, non seulement l'économie US s'effondre, mais aussi les USA perdent le leadership mondial faute de pouvoir financer leur puissance militaire. Ce qui rappelle furieusement la chute de l'Union Soviétique.
A la fin des années 70, les Monarchies du Golfe envisagent de vendre leur pétrole non plus seulement contre des dollars, mais aussi contre ce qu'on appelle alors "un panier de monnaies". La Guerre d'Afghanistan, l'invasion soviétique, avec les énormes dépenses pour soutenir les Moudjahidin qu'elle entraîne (les Monarchies ont financé à parts égales avec les USA) fait mettre l'idée sous le boisseau. Puis la guerre Iran-Irak entraîne des frais supplémentaires: Saddam livre une guerre de matériel, que les Occidentaux lui vendent avecc bonheur.
Lorsqu'au début des années 80 les Monarchies ressuscitent le projet du "panier de monnaies" pour se garantir contre les premières divagations du dollar, surprise: Saddam Hussein envahit le Koweit.
Bien que ça rallonge, une petite précision: l'Emirat du Koweit a été créé en.. 1961 par le Royaume Uni, finalement chassé d'Irak sur lequel Sa Majesté Britannique exerçait un "mandat" depuis... 1920 (Traité de Sèvres avec la Turquie). C'était auparavant une Province de l'Irak; comme quoi Saddam Hussein n'avait pas tout à fait tort avec sa "17e Province".
La 1ère Guerre du Golfe fut quasi entièrement financée par les Emirats et le Japon. Ce qui aurait du nous mettre la puce à l'oreille: les USA ne pouvaient donc pas payer? Le fameux "mandat de l'ONU" ne servirait-il en définitive qu'à défrayer un belligérant du coût de la guerre?
Bon, ce n'était peut-être qu'une coïncidence. A mon avis, ce n'en était pas une, voir les vociférations du Diable de Bagdad sur les "encouragements voilés" proférés par l'Ambassadrice US AVANT l'invasion du Koweit.
Ce qui n'en est pas une, c'est qu'en 2000 Saddam Hussein envisage de faire payer le pétrole qu'il est autorisé à vendre... en Euros. tines, à l'époque c'est passé inaperçu... 2001, le World Trade Center est anéanti. Et, contre toute attente, contre toute logique, Washington décide d'envahir...l'Irak. Pas la peine de revenir sur les prétextes dont on connaît désormais la vacuité.
L'aventure Afghane (guerre contre Ben Laden, veuillez ne pas rire) + l'Irak sont les LIMITES de la capacité d'effort US en matière de coerction militaire... hors évidemment l'option nucléaire. Limites dûment notées à Moscou et à Beijing... Beijing qui, justement, pour prix de son acceptation à l'OMC, soutient le dollar en achetant des obligations du Trésor US. Mais Beijing aussi qui, pour diversifier ses investissements, passe des accords avec des pays de l'ASEAN pour commercer aavec eux en Yuan. Et ça, c'est la faille dans le barrage.....
Cette modeste diminution de la position dominante du dollar est, à mon sens, le détonateur (mais pas la cause) de la Crise dite des subprimes, qui a déclenché la récession mondiale actuelle.
Et l'Iran, qui a une dent contre Washington depuis 1953 et le complot de la CIA contre le Docteur Mossadegh, se met à son tour en tête de vendre son pétrole... contre des Euros! Monde Arabe, Irak, cette démarche est un "acte de guerre" pour Washington. Qui entame aussitôt une campagne effrénée contre le danger nucléaire Iranien. Saddam aussi "avait" ou "allait sous peu avoir" la Bombe......
Qui s'attaque à la suprématie du dollar s'expose aux bombes US. Vouloir des Euros en paiement est un crime, et la peine de mort n'est pas abolie aux USA.
Et cela fait immédiatement penser à la "crise de solvabilité de l'Europe": la frénésie de notation d'agences "privées" auxquelles par miracle on prête une attention démseurée alors que jusqu'à présent elles pondaient leurs rapports dans l'indifférence générale.