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Billet de blog 15 janvier 2014

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La Révolution Française? Et puis quoi encore?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Dès que se profile un scandale, une protestation sont brandis "la Révolution Française" et "la Démocratie". Loin de moi l'idée de répudier les idéaux qui sous-tendent ces expressions, mais il conviendrait peut-être de revenir à la réalité.

Il y a eu quatre Révolutions, cinq si l'on compte la prsie du pouvoir des Communistes Chinois en 1949. Du moins quatre (ou cinq) qui comptent comme exemples. La Révolution Anglaise, la Révolution Américaine, la Française et la Russe se distinguent toute les quatre par un point commun: l'accès brutal au pouvoir des classes moyennes. Oui, car la Révolution russe n'est PAS celle d'Octobre, mais bien celle de Février qui amena brièvement au pouvoir Kerenski et ses alliés, tous des classes moyennes.

Ce classe moyennes: la bourgeoisie formant le gros des effectifs, comprenaient aussi la couche supérieure, industriels, gros propriétaires, clergé et petite noblesse. Des personnes donc, dont la fortune dépassait de loin leur "rang social" (allusion à la fameuse Table des Rangs de Pierre le Grand, devenue en raccourci "Nomenklatura") mais que le système existant excluait des affaires de l'Etat. En bref: ce que nous nommons le Tiers Etat. Leur importance économique jurait donc avec leur non-importance politique ce qu'elles corrigèrent les armes à la main.

"Le peuple" disons le tout net "le petit peuple" n'existait pas; non qu'il n'y ait eu largement le comptant d'ouvriers tant agricoles qu'artisanaux, ni d'exclus. Mais il n'avait tout simplement pas voix au chapitre. "L'armée des pauvres" était déjà la Grande Muette.

Parmi les "révolutionnaires" (les guillemets servent à souligner, non à dénigrer) il ne manquait pas non plus de vrais humanistes, soucieux de la condition humaine. Des idiots utiles? Car ce furent leurs idées, leurs aspirations, leurs rêves d'un monde meilleur, en tout cas un peu moins injuste qui furent mises en avant. La Déclaration d'Indépendance, les Droits de l'Homme et du Citoyen entre autres restent de forts beaux monuments de la pensée humaine et humaniste.

Mais, aussi amère soit-elle, il nous faut avaler la pillule de la réalité. Derrière ces idéalistes se faufilèrent nombre de réalistes bien décidés à profiter des circonstances. Passée la Terreur, le Directoire puis le Consulat furent comme toujours dans les périodes incertaines (République ou Royauté ou bien -nouveauté- l'Empire?) des périodes de course à l'enrichissement personnel. Enrichissement sanctionné en France par "le droit de propriété" qui demeure, je le rappelle, le principe premier de notre République comme "la poursuite du bonheur" l'est dans la Déclaration d'Indépendance. Course à l'enrichissement qu'on note aussi au début du règne de Napoléon III comme aussi bien sous la IIIe République. On peut remonter dans le temps, le schém&a se retrouve à l'identique nihil novi sub sole.

C'est cette réalité qui laissa naître les Maîtres de Forges chez nous, les grands domaines grâce aux "enclosures" en Angleterre (XIXe siècle) et les "robber barons" aux USA. J'écris "laissa" car les peuples, nos peuples les classes inférieures et les classes moyennes inférieures protèrent leur attention sur les grands débats politiques: capitalisme ou socialisme, sur les théories plutôt que sur la triste réalité: une petite "élite" (et là c'est péjoratif) toute occupée à tondre les moutons "d'en bas". A ceux qui en douteraient, je conseille de visionner les conférences du très regretté Henri Guillemin.

Et je dois à mon grand regret en remontrer à tous ceux qui, en France, parlent de Démocratie. Nous ne sommes pas en démocratie, nous sommes en République, ce qui est foncièrement différent.

La démocratie moderne naît dans les pays anglo-saxons qui ont comme caractéristique commune un principe: le primat de l'individu. Issu de vieilles traditions germaniques et nordiques (Norse), notamment celle du Thing ou Ring, proto-Parlement où chaque individu adulte pouvait intervenir, elle proclame la liberté individuelle en bien ou en mal (la fameuse "recherche du bonheur") symobolisée par le fait qu'en Angleterre un policier ne peut entrer dans un appartement sans y être invité, et aux USA qu'un mandat délivré par un juge soit nécessaire pour effectuer une perquisition. L'Etat y est considéré comme un mal nécesaire et seule la somme des initiatives individuelles y est sensée créer et entretenir "le bien commun". Enfin le Droit y est originellement oral, et a donné le système judiciaire dit de "la common Law"; le meilleur symbole en est le Royaume Uni qui n'a pas de Constitution et se réfère unqiuement à un ensemble de traditions ou d'écrits antérieurs (la Magna Charta, le Bill of Rights, et al.)

La République moderne, est largement inspirée de la République Romaine, donc issue des traditions des "pays du Sud" si méprisés actuellement. La notion de "bien public" (Res Publica) y est à la fois centrale et primordiale; plus qu'un rapport de supériorité (nous y reviendrons) c'est un rapport sinon d'égalité du moins d'équilibre entre intérêts privés et intérêt public. L'un ne doit pas faire négliger l'autre, l'un ne doit pas nuire à l'autre. Il est essentiel de noter que la Déclaration française marque nettement que "la contribution au bien public doit se faire en rapport avec les moyens du citoyen". Tout cela est rassemblé dans un corpus de droit écrit selon la tradition romaine qui est sensé être exhaustif. Là, nous pouvons parler carrément de voeu pieux.... L'Etat, pensé comme le fédérateur à la fois des aspirations des citoyens et son exécuteur, y est donc central. A la différence du monde anglo-saxon, où placer ses partisans aux postes clés est considéré comme normal (spoils system), les fonctionnaires sont sensés être neutres et seulement pénétrés du bien public. Noble pensée....

Ces deux systèmes souffrent du même mal: leur âge. Ils ont au mieux deux siècles et demi d'âge; ils sont vieux et vermoulus. Eh oui, l'Histoire nous apprend que "la stabilité des institutions" a une espérance de vie bien plus courte que nous ne le soupçonnons. Et ce tout simplement parce que les hommes sont des hommes et non des ordinateurs répétant fidèlement à l'infini ce qu'on leur a infestibulé. La cupidité, la malice, font partie intégrante de notre condition. Au fil du temps, comme il est pratiquement impossible de couvrir en un seul texte relativement court TOUS les cas de figure possibles, des brêches sont découvertes dans les deux cas, qui permettent de circonvenir le système.

C'est ainsi, au fil de ces interstices (le Diable se cache dans les détails, dit on) peu à peu découverts, que nous en arrivons de nos jours à ces véritables crises de système, et à la prise de pouvoir d'une frange des classes moyennes supérieures "la Finance" par éviction des classes moyennes. A malin, malin et demi.

Cela durera-t-il? Dieu seul le sait (et encore il n'en est pas sûr). Ce qui est certain, en revanche, c'est que nous ne sommes plus en République et que les anglo-saxons ne sont plus en Démocratie. L'avenir n'est écrit nulle part, donc je ne pronostiquerai rien.

Et le Peuple? (je me gratte le crâne) Eh bien, comment dire? Dans la Démocratie originelle, l'Athénienne, la Démoctarie n'était l'attribut que des propriétaires terriens: le Démos, propriétaire d'un "Dême" surface de terre arable sensée être distribuée équitablement entre Athéniens "de souche". Lorsque le nombre d'Athéniens dépassait le nombre de Dêmes à distribuer.... les ecédentaires émigraient et fondaient des "colonies" (bien différentes des colonies européennes de sinsitre mémoire). A noter: le Grec ne travaillait pas. Seuls travaillaient les métêques (étrangers autorisés à résider) et les esclaves. dites, ça ne vous rappelle rien? Si, pardi, la France d'aujourd'hui inaugurée par Valéry Giscard d'Estaing (titre acheté - on dit "relevé" c'est plus noble - par son père) avec son Union pour la Démocratie Française. Futé, le bougre!...

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