D'abord, consacrez quelques minutes à cette vidéo, qui vous en apprend une bien bonne:
http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=XM5n4NdB3ZQ
Les deux guerres Mondiales furent le suicide de la "première mondialisation". Mondialisation, est-il utile de le rappeler?, essentiellement européenne. Nous blaireaux de France de Navarre de Bavière ou d'ailleurs restons peut-être obnubilés par les rivalités de la Belle Epoque, mais pour le reste du monde, il n'y avait pas photo; le monde était un "Empire Européen". Divisé, certes, avec une âpre concurrence, mais c'était en sorte une concurrence interne.
Cet Empire donc, a disparu en 1945 (et les années suivantes avec la décolonisation) dans les décombres et ruines de la Seconde Guerre Mondiale. Il est une constante dans l'Histoire: lorsqu'un Empire disparaît, surgit un barbare qui s'installe sur les ruines. Rappelons que "barbare" ne signifie nullement "sauvage", mais simplement "qui parle mal la langue commune". Ce peuple barbare est plus fruste, plus "jeune", et infiniment moins sophistiqué que le défunt Empire.
En 1945, il y eut deux "barbares": à l'Est, l'URSS et à l'Ouest les USA qui effectivement s'emparèrent des dépouilles de l'Europe (d'aucuns dirent "se partagèrent").
Si les Soviétiques, à nos yeux, pouvaient ressembler aux Ostrogoths de Théodoric régnant sur l'Italie, les Américains (comme on les appelait alors) rappelaient plutôt Rome succédant à Athènes. Alors que le Russe ne connut guère de succès en tant que langue commune, l'Anglais tel que parlé aux USA (différent de l'Anglais du Royaume Uni; Churchill parlait de "deux peuples séparés par la même langue") devint assez facilement le latin du reste du monde. Pénétration facilitée par le tsunami des prqductions cinématographiques made in USA, et pour cause, les européens peinaient à trouver de quoi manger.
Pendant quarante ans, "l'American way of life" typiquement incarné par John Wayne (un type bourru, au grand coeur, qui résout les problêmes à l'emporte pièce) fut le paradigme par excellence du "monde libre". Jusqu'à l'arrivée de Richard Nixon.....
Il nous faut, à ce point, revenir en arrière: 1900, la Belle Epoque.
En 1900, la mondialisation de l'économie européenne (qui existe déjà au travers des participations croisées) est achevée. Comme la mondialisation actuelle, elle a son lot de scandales retentissants, de profits outranciers, et UNE crise majeure: la paupérisation systématique du monde paysan acculé pour survivre à devenir prolétariat. Cet exode rural a déjà entraîné des mouvements de masse chez les classes pauvres, et ce n'est qu'un début.
Mais surtout, elle a vu l'éclosion de la première "classe vraiment cosmopolite", composée de têtes couronnées (toutes parentes entre elles), de capitaines d'industrie (s'alliant volontiers par mariage) et la cohorte habituelle du demi-monde: artistes (jugés comme tels du moins), pique-assiettes et autres viveurs toujours bien présents depuis Hammourabi. On les appelle les "happy few", les "heureux peu nombreux". C'est une caste vivant en vase clos. Toute ressemblance....
L'ingrédient principal de la catastrophe de 14-18 semble bien être le crétinisme des dirigeants politiques et militaires de l'époque. Les militaires partagent avec les économistes un brio certain pour expliquer pourquoi leurs plans mirifiques se sont soldés par des fiascos sordides. Les politiques, eux, attendent éternellement le beau temps après la pluie: ne rien faire, puis se glorifier de la réapparition du soleil.
Petite variante avec 1913: ce sont bien la France et l'Angleterre qui sont "les créanciers du monde" en 1900. 90% de l'épargne française a été investie à l'étranger, la guerre va en vaporiser les 2/3. La crise de 29 vaporisera le reste et un peu plus.
Il n'y avait pas de crise économique en 1914, il y eut seulement un incident mineur: un Archiduc Autrichien assassiné à Sarajevo. Affaire à régler en trois missives et deux rencontres.... Pour mémoire, quelques années auparavant c'était l'Impératrice d'Autriche, Sissi, qui était assassinée par un anarchiste italien; l'autriche n'a pas déclaré pour autant la guerre à l'Italie....
Il n'y avait pas de crise économique, mais des rivalités: l'industrie allemande surpassait l'industrie anglaise et finançait une flotte de guerre menaçant la suprématie de la Royal Navy, l'Autriche et la Russie Impériale se tiraient la bourre pour obtenir l'hégémonie dans les Balkans, la France pleurait bruyamment "les Provinces Perdues" ... et l'Italie guignait le Trentin 'irredente".
Ces rivalités avaient amené les militaires à tirer des plans ran-tan-plan pour "faire face à toute agression". La clé, selon ces messieurs, était la concentration des troupes et surtout la VITESSE à laquelle on pouvait faire cette concentration. Leur cauchemar était de voir l'assaillant envahir le sol sacré de la Patrie alors qu'eux "concentraient" encore péniblement leurs conscrits. TOUS les belligérants étaient persuadés de mener une guerre "défensive", si! si! même les Allemands.
Et les "techniciens" militaires, les "Warlords" prirent le dessus sur les politiques qui s'avérèrent unanimement ineptes, lâches et indécis. Ces mêmes politiques qui durant quatre ans allaient se démener pour démontrer "qu'ils n'y étaient pour rien", que c'était "l'autre" qui avait commencé..... Là aussi le parallèle est criant.
En théorie, la Guerre de 14-18 (et par conséquent le deuxième round en 39-45) était impossible: "les démocraties font du commerce, et pas la guerre". Parce que l'Allemagne Wilhelmienne, voyez-vous, avait aussi le Reichstag... Bref, une belle connerie (en toutes lettres, oui Monsieur). Re-belote: en 1939 le "commerce principal" de l'Allemagne était avec... gagné! la France... Comme quoi...
Et dès lors s'éclairent toutes les contorsions, tous les coups tordus auxquels nous assistons, très étonnés, et même médusés, depuis l'élection de Richard Milhous Nixon. Piètre individu, mais grand stratège, ce personnage avait compris un fait capital: l'Empire Américain venait de subir son coup d'arrêt avec le Vietnam. Or, un Empire qui n'avance pas, recule... vers la falaise. Cela se vérifia avec l'aventure Soviétique en Afghanistan. Un des critères du début du déclin, selon Paul Kennedy, est "la répugnance des classes moyennes et supérieures à envoyer leurs rejetons se faire tuer". Cela s'est vérifié en Algérie, au Vietnam et en Afghanistan.
Nixon avait appris aussi que le moyen "classique" d'effacer ses dettes, pour un Etat était - outre le "défaut de paiement" (150 fois entre 1860 et nos jours dans le monde...) - la GUERRE. Outre cela, les rivalités économiques (le commerce, c'est la rivalité inévitable) pouvaient aussi, comme en 1914, entraîner une guerre. Et une guerre, ça se contrôle mal.
Et c'est là qu'intervient un facteur capital, malheureusement largement ignoré: les anciens "peuples dominants impériaux" regrettent leur défunt Empire. Beaucoup de Français regrettent les colonies, les Anglais pleurent les Indes, et les Russes enragent d'avoir perdu l'Asie Centrale. Il est donc "naturel" que les Etasuniens veuillent sinon recouvrer entièrement, du moins conserver autant que possible l' "empire informel" qu'ls dominaient à l'apogée de la puissance US. D'où Ronald Reagan, puis les deux Bush à la Maison Blanche. D'où aussi tout l'apparat très ostentatoirement "impérial" des cérémonies présidentielles US et des parades militaires. Et leur discours très "César s'adressant aux peuples fédérés" .
Les Etats Unis d'Amérique du Nord sont aux abois: leur ALENA le "Marché Commun Nord Américain" a fait plouff!, l'Amérique du Sud s'émancipe, et s'y profile un géant (le Brésil). Après le Japon, et la Corée du Sud c'est maintenant la Chine qui leur taille des croupières un peu partout dans le monde.
Ils sont endettés jusqu'aux oreilles, et leur capacité industrielle, jadis souveraine, est en voie de désintégration. Ne leur reste, en somme, QUE la puissance militaire. Mais de ce côté là je me méfierais.
Leur coup tordu, car ne nous leurrons pas, c'était un coup tordu, la fameuse crise des subprimes qui fut une tentative de nous refiler une partie de leurs dettes irrécouvrables, a à moitié foiré. La preuve? le Dollar US est toujours menacé de perdre sa place de "monnaie d'échange internationale". You missed the bull's eye, Mr Bush Jr...
Bon ça a créé un boxon pas possible en Europe. Laquelle, comme en 1914, se voit affublée d'un tas de nullards en guise de dirigeants.
Mais la crise n'est pas financière, contrairement à ce qu'on nous corne aux oreilles depuis cinq ans: la crise provient d'une manque dramatique de demande mondiale. C'est ça qui plombe les Etats, et qui commence à plomber la Chine: faute d'acheteurs, les usines ne tournent pas à pleine capacité, quand elles ne ferment pas.
Et pourquoi, je vous prie? Parce que 97% des sommes investies en Bourse restent dans le circuit boursieur: la Bourse s'est "débranchée" de l'économie mondiale. D'où un manque criant de liquidités, d'argent tout court, pour les acheteurs potentiels, qui sont des milliards. Et des "fortunes" qui n'en sont pas: l'argent "boursier", les actions et autres fariboles, ne devient REEL que lorsqu'on VEND ses titres et qu'on garde l'argent pour soi. Et que constate-t-on? Que plus souvent qu'on ne le croit, cette vente ne rapporte qu'une FRACTION de l'argent initialement investi. Autrement dit c'est "qui investit perd". Ou à peu près (je ne suis PAS économiste).
D'où la pharamineuse idée du Grand Marché Transatlantique, dernière poudre de perlimpinpin en date pour soigner la fracture sociale. C'est évidemment une illusion: des deux côtés de l'Atlantique, on espère que "vendre à l'autre" va relancer la croissance. Je préfèrerais un exorciste, c'est moins cher. Le commerce extérieur ne représente qu'une fraction minotitaire de la création de richesse, laquelle se fait en majorité par le commerce intérieur. Ce fut la grande force du Marché Commun: transformer le "commerce extérieur" en "commerce intérieur" par l'abolition des barrières douanières.
En fait, comme le GATT en son temps, le GMA vise à éviter une guerre générale entre "pays développés", entraînant ipso facto une guerre des pays émergents. Oui, "éviter" à condition que la manoeuvre réussisse; or il y a de fortes chances pour qu'elle capote, parce que les "intérêts supérieurs" des parties entrrent alors en jeu. Et l'Europe n'est pas si mal placée qu'on le dit.
Le maître mot en politique internationale est "PUISSANCE": il implique un comparatif démographique, d'activité, et surtout, surtout, une capacité de développement. Sur les trois critères, l'Europe devance les USA haut la main.
Et de plus elle a un atout maître, que n'ont pas les USA: elle peut encore grandir. LA "réserve" européenne, c'est la Russie. Souvenez vous: l'Europe de l'Atlantique à l'Oural. Encore mal mis en valeur, cet immense territoire, très riche, et surtout SON PEUPLE, n'attendent qu'une chose: s'allier avec leurs voisins européens(pas dans une Fédération, non, mais une coopération renforcée confinant à l'intégration) pour enfin atteindre le niveau de développement qu'ils sont en droit d'attendre. Oui, bien sûr AVEC l'écologie; vous prenez les Russes pour des bonobos?
AVEC la Russie, nous n'avons quasi rien à craindre des USA ni d'ailleurs du fantasmatique Islam radical. AVEC nous, la Russie n'a rien à craindre de la Chine. En quelque sorte des "dialogues appaisés".
Et alors, peut être frerons nous l'économie d'une guerre.
Mais, "contre la stupidité, les dieux eux-mêmes luttent en vain".