D’une île à l’autre. Durant semaines, j’ai passé d’un pays européen à un autre avec, pour point commun, la mer. Le spectacle de la crise dette se déclinait totalement différemment que l’on soit à Arles, en Sardaigne, à Naples ou en Espagne. Les italiens boivent du « crodino » et se foutent totalement de ce qu’il se passe à Bruxelles. Si les journaux avaient parlé d’un pays d’Afrique l’intérêt aurait été semblable. L’Espagne se démène et débat de l’utilité du gouvernement grec pour décider ce qui sera voté aux prochaines élections. Podemos est en embuscade et au centre de tout les débats.
À Arles et Cannes, impossible de parler de la crise grecque sans avoir un clivage gauche-droite basique et une critique violente et brutale du président en exercice. À la terrasse de la meilleure pizzeria du monde, Di Matteo, le patron de ce grand lieu historique laisse les femmes discuter des éruptions cutanées sur le visage de Matteo.
À Egine, île qui est la banlieue d’Athènes ou les terrasses sont pleines mais les verres vides il faut parler français. Dès que les grecs entendent la langue de Molière, ils vous remercient, félicitent le gouvernement et surtout François Hollande, décrit comme le dernier rempart contre la barbarie Allemande. De vieux grecs insistent pour se cotiser affin de me payer une bière. En Sardaigne, la crise revient chez un petit fabricant de glaces qui peste parce qu’il ne reçoit pas ses pistaches grecques, seules habilitées à entrer dans la composition des petites merveilles glacées.
De retour chez Clavin je regarde deux semaines de débats français enregistrés sur France 5 à 17h50. Les prévisions des économistes sont toutes plus farfelues les une que les autres et seuls les extrêmement modérés approchent ce qu’il va se passer.
Il n’en reste pas moins que chaque fois que je mets la tête sous l’eau « mare nostrum » est vide. C’est pourtant la même eau, le même sel. Autours de cette eau commune, le soleil est généreux. Le soleil frappe trop fort pour que les esprits s’échauffent et je me dis qu’heureusement que ce triste spectacle n’ait pas eu lieu en avril.
L’admiration des pays du sud pour le président français m’impressionne et je me prends aussi à regarder Hollande comme un homme calme et solide, avec un cuir épais et des nerfs d’aciers. Un effroi me rafraîchit quelques secondes quand l’idée de la réélection de Sarkozy me passe par la tête. Le calme et les nerfs sont de mise, il est 13 heures et tout le monde va faire la sieste. La Sardaigne se vide et seules les cigales continuent à se manifester. Couché à l’ombre je me dis que cela doit être assez insupportable pour un allemand de Munich qui doit certainement bosser et qui n’a pas la plage à quelques centaines de mètres.