Si Benjamin Griveaux était passé en vedette américaine.
Ce qu’on appelle l’affaire Griveaux est dans toutes les têtes pour quelques jours encore. Bien vite elle s’effacera au profit d’autres nouvelles qui deviendront pour une période éphémère le nouveau scoop du moment.
Certains considèrent cependant qu’elle constitue un tournant marquant l’américanisation de notre vie politique. Je souhaiterais préciser comment les Américains considèrent ce type de séquence et les différences d’interprétation que l’on peut observer entre les deux rives de l’Atlantique.
Lorsqu’une personnalité, aux Etats-Unis, se trouve dans la position délicate qui est celle de Benjamin Griveaux aujourd’hui, la majorité des Américains, démocrates comme républicains, exprime trois types de considération :
- Il est embarrassant qu’une personne sensée dire la vérité à ses électeurs mente à son conjoint
-Il est troublant qu’une personne souhaitant se voir confier un mandat nécessitant du sang froid ne contrôle pas ses pulsions
-Il est inquiétant qu’une personne détentrice de l’autorité publique ouvre des vulnérabilités dangereuses, par le biais d'un potentiel chantage, pour l’intérêt général ou pour la sécurité nationale.
La réaction du mis en cause sera également très différente outre atlantique de ce à quoi nous avons assisté lors du retrait de la candidature de Monsieur Griveaux:
-Il va publiquement et avant toute chose présenter des excuses à son épouse et à sa famille
-Il va également exprimer ses plus profonds regrets aux militants de sa campagne qu’il abandonne dans une situation difficile alors qu’ils lui avaient consacré leur temps et leur argent.
-Il va reconnaître sa responsabilité dans une attitude inappropriée (la preuve c’est qu’elle induit sa démission).
-Enfin dans un pays où l’on croit en Dieu à 80% (le Dieu de son choix, but « in God we trust »), il va se réfugier dans la grâce qui a toujours surabondé où le péché a abondé.
Certes sa carrière politique en prendra un coup but « Praise the Lord » et « God Bless America ». « Louez le Seigneur » et «Que Dieu Bénisse l’Amérique ». Le ciel et l’Amérique se réjouissent du retour des pécheurs au bercail.
Dans le cas d’espèce Monsieur Griveaux n’émet publiquement aucun regret, même s’il est vraisemblable qu’il le fasse à la maison. Il n’est pas question de donner des leçons de morale, mais reconnaître que cette vidéo n’était pas la meilleure idée pourrait constituer une saine démarche.
Pour nous Français, les seuls et véritables coupables sont identifiés : un anarchiste russe (c’est une tradition ancienne), une jeune maitresse ingrate, l’internet et les réseaux sociaux, et peut-être un avocat militant (brillant intellectuellement mais n’aimant vraiment pas Monsieur Macron et ses amis)
Et cela relance le débat sur les médias alternatifs : devons nous n’avoir accès qu’aux informations délivrées par des médias autorisés ?
Une fake news est-elle une information fausse ou une information vraie préjudiciable à l’ordre public tel que défini par le pouvoir en place ?
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