Jusqu’à présent le New York Times et le Guardian ont toujours représenté des lignes éditoriales de référence dans le domaine du journalisme et de l’indépendance. Si le quotidien britannique maintient le cap courageusement dans un contexte politique qui n’est pas toujours favorable, le journal américain prend de plus en plus souvent ses distances avec la réalité, surtout lorsque les feux de l’actualité se focalisent sur l’ex-président de la République française. La nouvelle de la garde à vue de Sarkozy a bien atteint l’autre côté de l’Atlantique, mais avec un traitement qui ressemble singulièrement à la propagande menée par les amis de l’ex- sur les ondes françaises, à savoir qu’il s’agit d’un complot pour empêcher leur mentor de revenir en 2017, pour sauver la France. Le NYT, en effet, s’est contenté de reprendre, sans commentaire et sans nuance, la dépêche de l’Associated Press, cinq paragraphes et quatorze lignes, qui concluent sur cette apothéose de bienveillance propagandiste :
Sarkozy and his lawyer have denied wrongdoing. Sarkozy is considering a political comeback after his 2012 defeat by President Francois Hollande. Lisez : « Sarkozy et son avocat ont nié tout acte répréhensible. Sarkozy réfléchit à un retour politique après sa défaite en 2012 face au président François Hollande ». Voilà une conclusion qui ne peut que mettre en joie les Guéant, Balkany et autre Morano et qui accrédite l’idée du complot judiciaire contre le présumé sauveur. Ce n’est plus du journalisme, c’est de la désinformation totale, qui évacue avantageusement toutes les casseroles accrochées au veston de Monsieur Bismuth. On a connu le NYT plus inspiré, surtout dans le traitement des dépêches d’agence. Le Guardian, fort heureusement, ne s’est pas inscrit dans cette ligne.
Le titre est déjà sans équivoque, puisque le Guardian précise que Sarkozy est en garde à vue pour alleged corruption, corruption avérée, alors que le NYT évoque de façon floue a corruption probe, une enquête pour corruption. De plus le corps de l’article égrène les six affaires dans lesquelles Sarkozy est impliqué et que seul Mediapart a révélées en premier lieu, à force d’enquêtes minutieuses, longues et indépendantes. Le Guardian conclut malicieusement que Sarkozy pourrait ne pas avoir la chance de passer entre les gouttes, comme son prédécesseur Chirac. Bref une information traitée de façon saine et complète.