En ce jeudi 5 mai 2011 les électeurs britanniques voteront deux fois. Ils vont renouveler leurs local councils, élection qui, sauf surprise, devrait engendrer une défaite pour la coalition Tories-Lib Dems, et participer à un référendum d’ampleur nationale pour choisir, pour les prochaines élections législatives, entre FPTP (First-Past-The-Post) et AV (Alternative Vote). FPTP, c’est le système actuel, scrutin uninominal à un tour qui consacre littéralement le candidat qui, métaphore sportive, franchit la ligne d’arrivée le premier. AV, c’est ce que Nick Clegg, vice-premier ministre, leader des Lib Dems, a obtenu de David Cameron pour s’associer aux conservateurs et partager le pouvoir avec eux.
AV, Alternative Vote, ce serait une transformation du paysage du paysage électoral britannique, car, au lieu de se contenter de cocher une case en face du nom de son candidat préféré, ce qui est la situation actuelle avec le FPTP, l’électeur devrait numéroter ses préférences de 1 à 4 ou 5, parmi les candidats potentiels qui lui seraient proposés sur la liste électorale. Le but de cette innovation est non seulement de préparer le terrain pour la proportionnelle, mais aussi d’introduire cohérence et équité. Le site officiel www.electoral-reform.org.uk donne comme exemple une circonscription imaginaire de 100 électeurs inscrits dans laquelle s’affrontent 4 candidats, A, B, C et D. Une fois numérotés de 1 à 4 par les votants, si aucun candidat n’obtient 50%, le plus mal classé est éliminé avec report des préférences. Si la majorité n’est pas atteinte, une nouvelle élimination du plus mal classé est opérée, jusqu'à ce que la majorité soit atteinte. Ainsi le candidat élu n’est plus nécessairement celui qui a franchi la ligne d’arrivée le premier, mais celui qui a obtenu le plus de voix.
Le quotidien britannique The Independent s’est engagé, en une de ce jour, pour le Yes to AV, avec cet argument de poids : Since 2005 this newspaper has campaigned for electoral reform. It became clear to us after the previous Labour government, led by Tony Blair, managed to win a majority of seats in the House of Commons with just 35 per cent of the votes cast across the country that something had gone badly amiss in our democracy, ce qui signifie donc : Depuis 2005 ce journal s’est engagé en faveur d’une réforme électorale. Il nous est apparu très clairement, après que le précédent gouvernement travailliste, dirigé par Tony Blair, soit parvenu à obtenir une majorité de sièges à la Chambre des Communes en ne récoltant que 35 pour cent des voix à travers le pays, qu’il y a quelque chose qui cloche dans notre démocratie.
Le même Independent donne 5 raisons pour adopter l’Alternative Vote :
1- L’AV donne plus de poids aux électeurs.
2- L’AV renforce le mandat démocratique des élus.
3- L’AV poussera les députés à entrer en contact avec un plus large électorat.
4- L’AV rendra les élus moins suffisants et sûrs de leur ré-élection.
5- L’AV est une étape vers un système électoral plus démocratique.
Le Guardian du 4 mai n’a pas pris partie, mais a recensé en 6 points les arguments du camp du No et de celui du Yes ;
YES!
1- L’AV mettrait un terme à la culture de la circonscription facile.
2- L’AV permettrait de se débarrasser, dans ces mêmes circonscriptions faciles, des élus qui dépensent généreusement.
3- L’AV mettrait un terme au vote tactique.
4- L’AV permettrait aux électeurs progressistes de dépasser le nombre des électeurs conservateurs.
5- L’AV est l’étape obligatoire vers la proportionnelle.
6- C’est une possibilité de sanctionner Cameron.
NO!
1- Les voix des candidats éliminés seraient ré-affectées, ce qui donnerait aux électeurs concernés un choix supplémentaire.
2- Ce système engendrerait davantage de coalitions de gouvernement et ne dégagerait pas de victoires électorales significatives.
3- Inversement l’AV pourrait conduire à des raz-de-marée électoraux plus importants.
4- Les seuls pays qui utilisent l’AV sont soit des dictatures militaires, comme les îles Fidji, soit des pays, comme l’Australie, où voter est obligatoire.
5- L’AV coûtera 247 millions de livres sterling supplémentaires.
6- C’est une possibilité de sanctionner Nick Clegg.
Verdict jeudi soir, avec une perspective pittoresque, Cameron s’étant engagé pour le NO, alors que, sans le dire vraiment, Clegg œuvre pour le YES.
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