C'est la question que se posent toujours les Américains pour se situer dans le temps et dans l'espace, après l'effroyable coup de massue que fut l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy: que faisais-tu ? Que faisiez-vous le 22 novembre 1963, en ce début d'après-midi, à 13 heures, heure de Dallas, 14 heures central time, lorsque le célèbre anchorman de CBS, Walter Cronkite, au bord des larmes, la voix brisée par l'émotion, confirma [comme le rappelle ce lien] la mort du président américain?
Comme si le temps s'était figé, vidé devant l'inimaginable. Il n'y avait plus rien autour. L'espoir d'un homme de 40 ans élu brillamment et porteur d'espoir, auquel chacun s'identifiait, y compris de ce côté-ci de l'Atlantique. La peine et l'abattement furent partagés lorsque feu Maurice Seveno annonça, à 20h30 heure française, sur l'unique chaîne de télévision française en noir et blanc, la fin du rêve.
Lorsque Neil Armstrong foula le sol lunaire, on admira, on s'émerveilla, mais le cœur n'y était plus, ce n'était pas tout à fait pareil. C'était de la technique, de la science, mais pas l'espoir noble qu'engendre la confrontation d'idées, celle qui fait naître l'espoir irraisonné, irrationnel. D'autant que treize mois auparavant, c'est Robert Kennedy qui fut assassiné en Californie, deux mois après Martin Luther King. Il avait rallumé la flamme de l'espoir foudroyé en 1963. L'un de ses ouvrages, In his own words, avait été judicieusement affublé d'un titre français exaltant, Vers un monde meilleur.
Alors aujourd'hui, mardi 4 novembre 2008, il est grand temps que le rêve renaisse, que la chose politique retrouve ses lettres de noblesse. Bien sûr, tout ne sera pas réglé par la seule élection d'un homme, mais les Américains pourront d'ici quinze ou vingt ans dire à leurs amis; que faisais-tu, toi, le mardi 4 novembre 2008 ? Où étais-tu ? Te souviens-tu ? Alors, sans sombrer dans l'engouement de midinette ou la passion de groupie pour une rock star, on a simplement envie de dire en parlant de Barack Obama: Of course you can! More than that, you must!