Dimanche 5 juillet la campagne interne au parti travailliste pour élire un successeur à Ed Miliband a pris un tournant sinon décisif du moins très important. En effet le puissant syndicat Unite, celui-là même qui avait fait élire Ed Miliband par des reports de voix inattendus au troisième tour en septembre 2010, a pris position pour Jeremy Corbyn, dont on rappelle la tardive candidature ici. Après le RMT (Rail Maritime and Transport workers) le syndicat le plus puissant des transports, le FBU (Fire Brigades Union) le premier syndicat de pompiers, l’ASLEF (Associated Society of Locomotive Engineers and Firemen) principale organisation syndicale des conducteurs de trains, et le BFAWU (the Bakers, Food and Allied Workers Union) organisation majeure des métiers de bouche, Unite constitue un renfort de taille pour Corbyn. Cela ne signifie pas pour autant qu’il sera élu à la tête du Labour, d’autant que les soutiens et le poids des syndicats au sein du parti travailliste ont toujours suscité de vifs débats, exacerbés par la situation de 2010 considérée par beaucoup comme un véritable vol à l’égard de David Miliband, qui était archi favori.
Cependant le bilan de 2015 est sensiblement différent. Le Labour sort d’une défaite qui n’était ni attendue ni programmée par son ampleur dévastatrice, contrairement à celle de Gordon Brown en 2010 d’une part, bien que la personnalité tiède d’Ed Miliband n’ait jamais emballé personne ; d’autre part le débat interne prend une tournure beaucoup plus constructive, à l’écoute des militants, et les déclarations, très vives de Jeremy Corbyn — que l’on peut écouter ici sur cette vidéo du Guardian — à l’égard des mesures d’austérité des conservateurs et des scandaleux contrats « zéro heure », entre autres, non seulement donnent de la crédibilité à sa candidature, mais, en plus, ont l’immense mérite de recentrer le parti travailliste sur sa mission, totalement dévoyée par les années Blair. Les semaines qui viennent vont peut-être permettre une renaissance intéressante du Labour, d’autant que les Tories grisés par leur victoire confirment les soupçons que leurs récentes et fracassantes déclarations ont fait naître.
On se souvient de l’inquiétude exprimée par Nick Robinson, chef du service politique de la BBC, à propos d’une petite phrase de David Cameron au cours de la campagne législative, selon laquelle il voulait en finir avec Auntie Beeb, voir ici. De toute évidence il s’agit bien d’une volonté de destruction du service public d’information, puisque la confirmation a été apportée par le ministre des finances, le chancelier de l’échiquier John Osborne, qui, au cours d’une émission politique de BBC1, The Andrew Marr Show, le 4 juillet, a accusé la BBC d’avoir des ambitions dignes d’un empereur, imperial in its ambitions, et a poursuivi sa diatribe en exigeant que la dite BBC participe à l’effort général de réductions budgétaires. Les coupes dans le budget global de la BBC vont déjà inéluctablement entraîner la suppression d’un millier d’emplois. Lorsque les électeurs britanniques ont accordé une majorité aux Tories le 7 mai, ils n’ont pas nécessairement voté pour la destruction progressive d’une véritable institution à laquelle ils sont historiquement attachés.