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Billet de blog 9 janvier 2011

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Jack Straw déclenche une vive polémique

Jack Straw a été ministre des affaires étrangères puis ministre de l'intérieur des années Blair et lors du bref passage de Gordon Brown à Downing Street, a hérité du portefeuille de la justice, après avoir dirigé la majorité travailliste aux Communes.

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Jack Straw a été ministre des affaires étrangères puis ministre de l'intérieur des années Blair et lors du bref passage de Gordon Brown à Downing Street, a hérité du portefeuille de la justice, après avoir dirigé la majorité travailliste aux Communes. Il est un des très rares membres du Labour, avec Gordon Brown et Alistair Darling, à avoir été ministre, de façon ininterrompue, de 1997 à 2010. Elu depuis 1977 à Blackburn, dans le Lancashire, il a été réélu très confortablement en mai 2010, malgré la défaite générale de son parti, avec près de cinq mille voix d’avance sur son concurrent conservateur. Straw est donc à la fois une figure et un personnage important du parti travailliste. C’est la raison pour laquelle les propos qu’il a tenus, dans la soirée du vendredi 7 janvier, dans l’émission de la BBC Newsnight, ont suscité de nombreuses réactions consternées.

Commentant les récentes et lourdes condamnations de deux citoyens britanniques d’origine pakistanaise, par le tribunal de Nottingham, pour une série de viols, Jack Straw a déclaré que les jeunes pakistanais installés au Royaume-Uni considèrent les white girls as easy meat for sexual abuse, langage assez abrupt qui signifie que les jeunes filles blanches sont des proies faciles pour des agressions sexuelles. Son collègue du parti travailliste, Keith Vaz, député de Leicester et président de la commission des affaires intérieures à la Chambre des Communes, a immédiatement réagi, comme l’aurait fait tout individu sensé, pour déclarer que le problème est dans la nature horrible des crimes commis contre des jeunes filles et non dans l’origine ethnique des coupables : I disagree with Jack. I don’t think you can stereotype an entire community.

Les explications de ce dérapage sont multiples. Jack Straw n’est pas atteint du syndrome Manuel Valls, c’est-à-dire qu’il n’a pas besoin de dire n’importe quoi pour exister, puisqu’il existe politiquement déjà depuis longtemps, d’autant qu’il a presque soixante-cinq ans. Les hypothèses explicatives sont sans doute ailleurs. La circonscription de Straw à Blackburn est toute proche des circonscriptions de Burnley et Oldham, où d’une part le flux d’immigration depuis les années 1960 a été important, et d’autre part le courant fondamentaliste est fort dans les deux zones citées. Straw est peut-être tenté de défendre son territoire électoral. Par ailleurs, Straw a toujours été une sorte d’électron libre plutôt à la droite du Labour.

Cependant il ne semble pas qu’il y ait eu continuité et cohérence dans ses différentes prises de position. En 2002, il avait pris position, fort courageusement alors que le parti travailliste choisissait la politique de l’autruche, contre le niqab, ce qui lui a valu l’indéfectible inimitié de la communauté musulmane. En 2006, Blair lui a retiré les affaires étrangères, sous la pression de Bush, Straw ayant répété à plusieurs reprises qu’il ne voulait pas être complice d’une invasion de l’Iran, ce qui semblait fort acceptable. Mais devenu aussitôt ministre de l’intérieur, Straw a renforcé les pouvoirs de la police au point d’obtenir un satisfecit de la part de la sinistre Margaret Thatcher : I trust Jack Straw. He is a very fair man. La ruade de Straw vise peut-être les élections municipales de mai 2011, puisque le Labour n’a plus de majorité absolue, et une telle déclaration peut engendrer des soutiens à la droite du parti travailliste.

(crédit photographique : Dave Thompson / PA)

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