Les clameurs se sont tues. L’élection présidentielle américaine appartient au passé depuis une semaine et le moins que l’on puisse dire est que la seule catastrophe annoncée et réellement dévastatrice qui a bien eu lieu est celle du passage de l’ouragan Sandy. Car dans le domaine des prévisions politiques, on ne peut s’empêcher de penser que le faux suspense maintenu par certains media américains et français n’avait d’autre but que de maintenir en haleine le téléspectateur et vendre ainsi davantage d’espaces publicitaires. Et quelle aubaine pour les analystes qui vendaient de l’inquiétude (et d’ailleurs quelle inquiétude ?) que ce premier débat raté par Barack Obama, par dilettantisme ou fatigue (nul ne saura vraiment)!
Même la grand’messe quotidienne fourre-tout de Canal Plus, le Grand Journal, guidée par son Buster Keaton de service s’était mis au diapason en invitant, non pas des universitaires reconnus par tous et depuis longtemps, mais des spécialistes autoproclamés des Etats-Unis, tels que Philippe Labro ou le fils de Jean-Claude Dassier. On imagine, en toute logique, que, si le Grand Journal se penche sur la situation politique de la Chine ou du Japon, les experts invités seront Mireille Mathieu et Alain Delon. Et qu’a conclu tout ce petit monde très auto-satisfait ? Que non seulement les résultats seraient serrés et que le président sortant pourrait perdre. L’un d’entre eux, particulièrement inspiré, a même lancé que l’on pourrait avoir une répétition de la situation de 2000 et que Barack Obama allait perdre la Floride, donc l’élection.
Certes une élection n’est jamais jouée à l’avance, certes les trois débats télévisés n’ont rien eu d’exaltant, certes Obama n’a pas vraiment donné l’impression d’avoir envie de forcer son talent lors de ces trois rencontres. Néanmoins, les journaux américains jugés sérieux et fiables, tels que le New York Times, le Washington Post ou le Los Angeles Times n’évoquaient aucun scénario-catastrophe et faisaient état, régulièrement, de l’écart, favorable au sortant, dans le nombre potentiel de grands électeurs, base déterminante, comme chacun sait, dans l’élection du président des Etats-Unis. Or la veille du scrutin, le 3 novembre, le NYT a publié un sondage, effectué, de façon indépendante, par plusieurs universités, et qui prévoyait à Barack Obama un minimum de 270 grands électeurs contre 206 à Mitt Romney, sur un total, rappelons le, de 538, composition du Grand Electoral College, ce qui signifie que Barack Obama était déjà potentiellement ré-élu.
En d’autres termes, il aurait fallu que le candidat républicain obtienne 64 grands électeurs sur l’ensemble des swing states, ce qui mathématiquement était impossible. Tout le monde sait désormais que jusqu’à vendredi dernier Obama totalisait 306 grands électeurs contre 206 à Romney, qui n’a donc pas bougé par rapport aux sondages. Or vendredi on a appris que Barack Obama avait gagné la Floride, soit 26 grands électeurs, donnée pourtant archi-acquise aux républicains par les experts cités plus haut, ce qui lui donne un total de 332 grands électeurs. Les mêmes présumés spécialistes affirmaient que le vote populaire serait très serré. Obama a obtenu 61.710.131 voix contre 58.504.025 à Mitt Romney, soit une avance de 3.206.106. Serré ? Manipulation ou élucubrations, on peut choisir, mais information est éliminée du QCM.