Telle semble être la devise de l'actuel ministre des affaires étrangères, pour rester bien en cour auprès de son souverain préféré. On savait depuis longtemps qu'au parti socialiste Bernard Kouchner n'a jamais représenté personne d'autre que lui-même. On savait également qu'il n'y faisait partie d'aucun courant, attendant vainement la création de la motion permanente "parlez-moi-de-moi-il-n'y-a-que-ça-qui-m'intéresse". On soupçonnait aussi qu'idéologie et conviction devaient être des gros mots, dans son vocabulaire. On était convaincu que l'ouverture concerne des idées et des projets de société, alors que le débauchage n'implique que de petits intérêts personnels. Néanmoins, ce qui s'est passé cette semaine, et que François Bonnet a magistralement relaté, dépasse l'entendement et le sens de la dignité.
Attendre qu'une secrétaire d'Etat ne soit plus en cour et choisir le jour du soixantième anniversaire de la déclaration des droits de l'homme, domaine qui relève de l'action de la dite secrétaire d'Etat, pour asséner quelques méprisables propos à son endroit est d'une insondable bassesse. Il aurait été plus crédible, ou tout au moins plus correct, de l'entendre s'interroger, en mai 2007, sur la présomption de compétence de ses collègues de gouvernement, Rama Yade et Rachida Dati. Il aurait été tout aussi rassurant de le voir conseiller à sa compagne, Christine Ockrent, de se retirer du petit écran, lorsqu'il exerçait des fonctions dans le gouvernement de Lionel Jospin. On notera, incidemment, que cette dernière a été nommée à la tête de France 24, mais c'est certainement le fruit du hasard, bien sûr. Cet épisode remet en mémoire ce bon mot que l'on prête à Edgar Faure, lorsqu'il apprit la nomination, dans les années 1970, d'un membre du RPR, René Han, comme président de FR3 : "Ils ont nommé un chinois du RPR à FR3, mais je ne crois pas que c'est parce qu'il est chinois". On peut donc légitimement se demander si Christine Ockrent a été choisie parce qu'elle est journaliste.
Il est permis, aussi, de se demander en quoi consiste la ligne politique d'un ministre des affaires étrangères, affublé de l'étiquette "humanitaire" par d'aimables thuriféraires, qui conduit à ne rien dire lorsque son président va se prosterner devant Bush, alors que la planète entière, y compris son propre parti, s'en détourne, et qui pousse, ensuite, à chanter les louanges de Khadafi. Pendant la crise, qui frappe de plein fouet la planète et la société française, les petits jeux de cour continuent ! Les Guignols de l'Info ont toujours représenté le personnage en question avec un sac de riz sur l'épaule, par référence à sa participation à une distribution alimentaire savamment calculée en fonction de la présence des caméras. Peut-être faudrait-il envisager d'ajouter à la panoplie de cette marionnette une brosse à reluire et une livrée verte chamarrée d'or.