Voici le texte du discours que le président Barack Obama a prononcé le 12 mai 2009, lors du dîner organisé par l’association des journalistes accrédités à la Maison Blanche. Plus qu’un discours, c’est une véritable profession de foi, une expression sincère, gage d’un fonctionnement démocratique. Barack Obama aime la presse et la respecte. En retour la presse le respecte, mais fait son travail, sans compromettre son indépendance. Il aime sa diversité et le contre-pouvoir qu’elle représente. Si, en étant puriste et exigeant, on peut regretter le choix sémantique d’industry, néanmoins on peut marquer dans le marbre l’ensemble de ce discours qui est d’une noblesse et d’une force exaltantes. S’il fallait résumer, on retiendrait volontiers ces deux phrases extraordinaires et qui font tellement rêver de ce côté-ci de l’Atlantique. Tout d’abord, your ultimate success…is essential to the success of our democracy, engagement qui semble si loin de notre petit hexagone étriqué dans le pouvoir personnel. Et puis a government without a tough and vibrant media…is clearly not an option for the United States of America.
‘’We meet tonight at a moment of extraordinary challenge for this nation and for the world. But it’s also a time of real hardship for the field of journalism. Like so many other businesses in this global age, you’ve seen sweeping changes and technology and communications that lead to a sense of uncertainty and anxiety about what the future will hold. Across the country there are extraordinary hard-working journalists who have lost their job in recent days, recent weeks, recent months. And I know that each newspaper and media that is wrestling without rest to respond to these changes, and some simply struggling to stay on. And it won’t be easy. Not every ending will be a happy one. But it’s also true that your ultimate success, as an industry, is essential to the success of our democracy. It’s what makes this thing work. And Thomas Jefferson once said that if he had the choice between a government without newspapers and newspapers without a government he would not hesitate to choose the latter. Clearly Thomas Jefferson never had cable news to contend with. But a central point remains, a government without newspapers, a government without a tough and vibrant media of all sorts is not an option for the United States of America’’.
Ce qui signifie : Nous nous retrouvons à un moment de défi extraordinaire pour cette nation et pour le monde. C’est également une période de réelle difficulté pour le monde du journalisme. Comme beaucoup d’autres secteurs économiques à notre époque de mondialisation, vous avez connu des changements radicaux, qui, comme la technologie et les communications, ont engendré quelque incertitude et une certaine angoisse sur ce que sera l’avenir. A travers tout le pays, il y a eu des journalistes extraordinaires et travailleurs qui ont perdu leur emploi dans ces derniers jours, ces dernières semaines, ces derniers mois. Et je sais que chaque journal, chaque media lutte sans relâche pour répondre à ces changements et certains se battent simplement pour rester en vie. Et ce ne sera pas facile. Toutes les fins ne seront pas nécessairement heureuses. Mais il est aussi vrai que votre succès ultime, en tant qu’industrie, est essentiel au succès de notre démocratie. C’est ce qui fait que ça fonctionne. Et Thomas Jefferson a déclaré, autrefois, que s’il avait le choix entre un gouvernement sans journaux et des journaux sans gouvernement, il choisirait sans hésiter la seconde solution. Bien sûr Thomas Jefferson n’a jamais connu le plaisir de connaître la télévision par câble (note de votre serviteur : aimable petit clin d’œil à CNN qui retransmettait la soirée). Mais il n’en demeure pas moins qu’un gouvernement sans journaux, un gouvernement sans des media coriaces et dynamiques de toutes sortes n’est certainement pas le choix des Etats-Unis d’Amérique.
En ce début d’été 2010 où la presse française est plus que jamais aux ordres directs de l’actuel président de la République, sinon aux mains de ses amis, à la notable exception du Canard Enchaîné et de Mediapart, ce discours a un goût de miel.