Si David Cameron et François Hollande n’ont pas la même nationalité et ne sont pas du même bord politique, quoique ceci reste de plus en plus à démontrer, ils ont indéniablement un point commun, une fâcheuse tendance à la tergiversation et à l’atermoiement en guise de décision et d’action politique. Les positions du premier ministre britannique sur l’appartenance à l’UE se résument à de frénétiques et permanents pas de danse: trois grands pas en arrière, un petit pas en avant. Ainsi, en début de semaine, ce sont deux ministres de l’actuelle coalition Tories/LibDems, et non des moindres non pas par la profondeur de leur vision politique mais par l’importance des postes qu’ils occupent, Michael Gove, ministre de l’éducation, et Philip Hammond, ministre de la défense, qui ont clairement indiqué qu’en cas de référendum immédiat sur l’appartenance à l’UE, ils appelleraient à sortir de l’Europe.
Ces deux déclarations en forme de provocation, à la veille de la rencontre entre Cameron et Obama à Washington, ressemblent étrangement à une mise en cause de l’autorité du premier ministre et à la volonté de se passer de ses services. Elles venaient en prolongement d'appels identiques émanant de deux anciens ministres des gouvernements Thatcher et Major, Nigel Lawson et Michael Portillo. Boris Johnson, le maire de Londres qui rêve de plus en plus ouvertement de s’installer au 10 Downing Street, a rejoint la meute des protestataires, qui a regretté que, dans the Queen’s speech, le discours programmatique écrit par le premier ministre et que le souverain lit devant les parlement, aucune ligne n’ait été consacrée à ce qui est considéré comme une nécessité, à savoir un référendum immédiat sur l’Europe, comme le rappelle le Guardian. Cette frénésie est, bien évidemment, à rapprocher des scores importants réalisés par UKIP à travers diverses élections depuis deux ans, et notamment la dernière législative partielle et les dernières locales partielles. En réaction à cette fronde, Cameron s’est contenté de réaffirmer que si les conservateurs gagnaient les prochaines législatives — perspective désormais à peu près aussi solide que de voir le prix Nobel de littérature attribué à Ibrahimovic — il organiserait un référendum en 2017. Mais le problème majeur avec ce premier ministre-là c’est que l’on ne sait pas vraiment s’il encourage les frondeurs en coulisses ou s’il est incapable de leur résister.
La preuve est ce discours des plus ambigus sur le sentiment d’appartenance européenne et des plus paradoxaux dans le choix du lieu, que l’on peut voir et écouter ici, aux côtés de Barack Obama, en d’autres termes la puissance économique qui ne veut pas d’une Europe forte, avec cette phrase savoureuse : well, first of all, on the issue of the referendum, look, there’s not going to be a referendum tomorrow, eh bien, tout d’abord quant à la question du référendum, il ne va pas y avoir un référendum demain. Faut-il considérer ce début de discours comme une réponse ferme aux frondeurs ? Ou l’expression d’une crainte réelle face aux nouveaux sondages réalisés par ICM et le Guardian ? Et qui montrent d’une part que le Labour arrive en tête avec 34%, les conservateurs loin derrière avec 28% et UKIP à 18%, d’autre part que 35% des sondés veulent sortir de l’UE immédiatement et 30% veulent une renégociation du statut du Royaume-Uni au sein de l’UE. Cameron va devoir apprendre de nouveaux pas de danse…