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Billet de blog 15 juillet 2010

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Petite trousse de secours sémantique pour l'été

Fasciste : la définition donnée par le Grand Robert est : «partisan du fascisme, de l'italien fascismo, lui-même tiré de fascio», référence faite au faisceau des licteurs romains. Le fascisme est une doctrine, un système politique que Mussolini établit en 1922 en Italie. Le fascisme instaurait une dictature.

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Fasciste : la définition donnée par le Grand Robert est : «partisan du fascisme, de l'italien fascismo, lui-même tiré de fascio», référence faite au faisceau des licteurs romains. Le fascisme est une doctrine, un système politique que Mussolini établit en 1922 en Italie. Le fascisme instaurait une dictature. Le Trésor Informatisé de la Langue Française du CNRS ajoute, ce qui, dans cet été 2010, est particulièrement pertinent, que cette « doctrine (le fascisme donc) est caractérisée par la toute puissance de l'Etat, intervention de l'État dans l'économie, étatisation des appareils idéologiques, développement de l'appareil répressif dominé par la police politique, prépondérance de l'exécutif sur le législatif... ». Ajoutons cet extrait de L'Homme Révolté d'Albert Camus : « Le fascisme, c'est la mort de la liberté, la domination de la violence et l'esclavage de l'esprit. Le fascisme, c'est le mépris, en effet. Toute forme de mépris, si elle intervient en politique, prépare ou instaure le fascisme. » Plutôt que de tenter de récupérer lamentablement l'image de Camus, il vaudrait mieux le lire, pour commencer, et laisser ses cendres reposer en paix dans le magnifique cimetière de Lourmarin, qui lui convient mieux que le Panthéon.

  • Manipulation : selon le Dictionnaire étymologique de la langue française d'Oscar Bloch et Walther von Wartburg, PUF, ré-édité régulièrement depuis 1986, 1ère édition en 1932, «manipulation» trouve son origine dans le mot latin manipulus, la poignée, lui-même dérivé de manus, la main, et apparaît au XVIème siècle à travers le terme de pharmacie «manipule». Le Grand Robert n'accorde que deux sens à manipulation : d'une part l'action de toucher avec ses mains des produits chimiques ou physiques ; d'autre part le sens figuré et péjoratif , inéluctablement associé à l'adjectif «électoral». Le TILF du CNRS affine le sens péjoratif en évoquant «une manœuvre occulte ou suspecte visant à fausser la réalité». Ex: Faire croire que David Pujadas et Laurence Ferrari sont journalistes. Ou bien encore «manœuvre par laquelle on influence à son insu un individu, une collectivité». Ex : Eric Woerth est lavé de tout soupçon. On n'oubliera pas, bien évidemment, le sens premier, évoqué plus haut. Ex : MM. Devedjian, Longuet et Madelin ont manipulé des barres de fer en mai et juin 1968.
  • Officine : selon le même Bloch et Wartburg, le vocable est emprunté au latin officina qui signifie : atelier. Le terme apparaît au XIIème siècle et est utilisé jusqu'au début du XVIème siècle pour désigner une boutique, un atelier, et, plus particulièrement, un local où se font les préparations pharmaceutiques, les manipulations donc. A partir du milieu du XVIème siècle, officine prend le sens péjoratif de «lieu où l'on fait des machinations», transfert métaphorique pour illustrer la méfiance et l'ignorance par rapport au savoir et à la science. Le Littré et le Grand Robert confirment ce sens propre et ce sens figuré. Pour illustrer le sens premier, on pourrait dire que les vaccins anti-grippe AH1N1 ont été élaborés dans des laboratoires, descendants des officines donc, pour le second on peut avancer que Roselyne Bachelot, ci-devant docteur en pharmacie, a tenté de faire croire que l'ensemble de l'hexagone serait touché par l'épidémie. Quant à l'acception péjorative, on en trouve aussi l'application au palais de l'Elysée, où des «officines» ont fait circuler l'information, totalement fausse, contraire à la vérité et complaisamment relayée comme d'ordinaire par les habituels laquais de l'information, selon laquelle la comptable de Liliane Bettencourt s'était rétractée.
  • Trotskyste : selon le Grand Robert, cet adjectif apparaît pour la première fois en1924, lors du conflit entre Trotsky et Staline, puis est officialisé par Malraux, en1928, dans son ouvrage Les Conquérants. Pour mémoire, Lev Davidovitch Bronstein, dit Trotsky, également écrit Trotski, est l'une des trois figures emblématiques de la révolution d'octobre 1917, avec Lénine et Staline, immortalisées avec humour par George Orwell dans Animal Farm, sous les traits de trois cochons. Trotsky est considéré comme le fondateur de l'Union Soviétique. Partisan de la révolution permanente, il s'opposa très tôt à la tentation de la pratique du pouvoir personnel de Staline, lequel l'écarta du pouvoir, à la mort de Lénine, le contraignit à l'exil, pour le faire finalement assassiner à Mexico, en 1940, par Ramon Mercader, agent des basses œuvres staliniennes. Ne pas confondre Trotskyme avec Trident, organisation internationale, dont fit partie Raymond Barre, qui ne prônait pas la révolution permanente et où le port du cigare était obligatoire. On remarquera étonnamment que, de nos jours, lorsque l'on parle de quelqu'un qui, par ses choix politiques, a justifié le soutien indirect à un individu dont le seul credo était la terreur, on dit avec une connotation presque attendrie : « Ah! C'est un ancien stalinien! » Alors que lorsque l'on évoque, dans le passé d'un journaliste par exemple, l'option trotskyste - rappelons que le Trésor Informatisé de la Langue Française du CNRS évoque une pensée prophétique en parlant de trotskysme - la seule utilisation de cet adjectif est censée terrifier l'interlocuteur. Etonnant, non? Comme aurait dit Desproges.
  • Villepiniste : adjectif apparu récemment dans la langue française, non répertorié dans les dictionnaires étymologiques et qui fait référence à la sympathie manifestée à l'égard de M. Villepin (Galouzeau de), ex-premier ministre, déclaré coupable, dans l'affaire Clearstream, avant d'avoir été jugé et promis, malgré ou en raison de sa noble ascendance, à être vulgairement exhibé à un croc de boucher, improbable application du slogan Ensemble tout est possible. Ce néologisme adjectival fait, en général, l'objet d'une collocation hautement péjorative, ex : Tron est un député villepiniste (ne pas chercher nécessairement une éventuelle contrepèterie, ce n'est qu'un exemple). Autre exemple : Mediapart est une officine villepiniste. Mâle insinuation en provenance des officines de l'Elysée qui présuppose, si l'on souhaite passer par le syllogisme, que M. Dominique Galouzeau de Villepin a été trotskyste.

Il est évident qu'il en est des mots comme de certaines fonctions, trop lourds à porter parce que nullement maîtrisés.

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