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Billet de blog 16 février 2015

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La politique, produit de consommation

Les élections législatives qui vont se dérouler au mois de mai au Royaume-Uni devraient, si l’on se fie aux plus récents sondages, consacrer le retour au pouvoir du Labour.

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Les élections législatives qui vont se dérouler au mois de mai au Royaume-Uni devraient, si l’on se fie aux plus récents sondages, consacrer le retour au pouvoir du Labour. Mais cette tendance, qui demeure fragile, s’accompagne très paradoxalement d’un manque d’enthousiasme évident de l’électorat britannique envers Ed Miliband, le chef du parti travailliste. La logique et le bon sens voudraient que, pour espérer une amélioration de son image auprès du public, le même Miliband aille à la rencontre des électeurs et multiplie les débats, d’autant que l’alignement du parti travailliste sur les positions conservatrices et libérales lors du débat sur l’indépendance de l’Écosse a été dévastateur, au point que le Labour pourrait perdre la totalité de ses sièges au profit du SNP dans la plupart des circonscriptions écossaises. Mais ce n’est pas du tout la solution que Miliband a retenue. Il a fait un tout autre choix qui pourrait appauvrir le débat politique, ou simplement l’anéantir, et ravaler la chose politique au rang de produit de consommation en sollicitant l’aide de David Axelrod.

David Axelrod est célèbre depuis 2008. Consultant politique et directeur de l’institut politique de l’Université de Chicago il a dirigé la première campagne présidentielle de Barack Obama. Au-delà de l’aura que lui a conféré le fait de diriger, avec succès, la première campagne d’un candidat noir américain, il est l’auteur et le créateur de Yes we can!, slogan répété à l’envi jusqu’à la nausée. Sept ans plus tard, au vu de tout ce que le président élu et porteur d’immenses espoirs n’a pas fait — de Guantanamo à l’égalité réelle entre blancs et noirs sans oublier le débat esquivé sur les armes en vente libre —, il serait tentant de lui renvoyer son slogan revu et corrigé But you, you couldn’t! pour se demander quelle mouche a bien pu piquer Ed Miliband pour appeler à la rescousse quelqu’un qui ne connaît strictement rien à la vie politique britannique et qui est donc censé apporter des phrases-clés, comme l’a fait le navrant Alastair Campbell avec Blair. On se souvient, entre autres, de Tough on crime, tough on the reasons of crime, sans oublier la ligne directrice nébuleuse du New Labour.

 Le débat politique s’appuie sur la confrontation d’idées entre citoyens et non pas sur le parachutage de phrases publicitaires par une élite présumée, pratique qui conforte l’analyse de Noam Chomsky et sa division de la société entre bewildered herd (le troupeau égaré) et the specialized class (la classe spécialisée). En 1981, François Mitterrand avait confié sa campagne électorale à un publicitaire, dont on a pu mesurer, depuis, le niveau de ses convictions et de son éthique personnelle et qui, par le choix de son impact publicitaire digne d’une marque de lessive, la force tranquille, avait relégué au second plan le débat sur les 110 propositions. La décision de Miliband est identique et va dénaturer le débat idéologique, ce que Nigel Farage et UKIP ont très largement commencé.

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