UKIP, United Kingdom Independent Party, a, certes, le vent en poupe au Royaume-Uni, mais sans doute ne faut-il pas se fier aux apparences d’une part, et encore convient-il de voir dans cet engouement provisoire la méfiance profonde que les britanniques ont toujours ressenti vis à vis de l’Union Européenne d’autre part. En effet si les sondages montrent que le parti fourre-tout pré-cité semble sur le point d’arriver en tête des suffrages de la prochaine élection à l’assemblée de l’UE, cela ne signifie pas nécessairement que les sujets de sa gracieuse majesté ont opté pour une dérive fascisante, peut-être cela signifie-t-il plutôt qu’ils sont prêts à envoyer les premiers plaisantins venus dans une assemblée qui ne les concerne pas, mais pour le parlement britannique c’est une autre affaire.
Certes Nigel Farage, le leader de UKIP, a pris un avantage très net au cours des débats télévisés préalables à l’élection européenne, mais, là aussi, encore faut-il se souvenir que David Cameron, le premier ministre conservateur, chef du gouvernement de coalition, avait habilement évité ces confrontations et décidé, courageusement selon son habitude, d’envoyer son vice-premier ministre LibDem, Nick Clegg, surtout connu pour sa capacité à avaler des couleuvres et pour son mimétisme de girouette. Cependant l’électeur britannique moyen semble s’offrir un divertissement avec l’Europe, car un sondage réalisé en mars par ICM et le Guardian montre deux conclusions intéressantes : d’une part lorsqu’il s’agit de choses sérieuses, entendez les élections législatives à venir, UKIP retrouve sa quatrième place, et le choix serré, de toute évidence, se jouera entre Labour et Tories ; d’autre part le même sondage montre que UKIP arrive bien en tête, avec 58%, mais au classement du parti le plus détesté et le plus impopulaire !
Rien n’est gravé dans le marbre, bien évidemment, mais tous les sondages, récents et plus éloignés, pour les prochaines législatives prouvent que la confrontation et la survie de UKIP va intervenir au niveau de la troisième place avec les LibDems, c’est-à-dire le partage des miettes dans le scrutin uninominal à un tour du Royaume-Uni. En d’autres termes, pour reprendre une métaphore sportive qui fait référence au cyclisme et à l’athlétisme, le candidat qui franchit la ligne d’arrivée le premier est élu, quel que soit son score, symbole du système bipartite qui broie les petits partis. Par ailleurs, si UKIP a connu son heure de gloire avec les élections locales de 2013 en gagnant 139 sièges, il est important de savoir, comme le rappelle judicieusement le Guardian du 14 mai, que depuis cette échéance électorale UKIP a perdu plus de 10% de ses élus, lassés par les dérives racistes et par l’absence totale de ligne politique directrice.
En conclusion, une fois terminée la parenthèse européenne les électeurs britanniques semblent déterminés à reprendre leurs esprits et à revenir à la bataille habituelle qui s’annonce plus serrée que prévue pour 2015, dernier délai, à moins que Cameron, débarrassé de la menace Boris Johnson sur son leadership, ne décide les anticiper comme il en a le droit.