Le nombre d’affaires avec lesquelles le nom de l’ex-président de la République est associé demeure conséquent. Outre les affaires Karachi, Tapie, Bettencourt — qui, étrangement apporte du répit au premier nommé sans que son innocence ait été établie — et celle dite des sondages de l’Elysée, sans oublier l’ardoise laissée par sa compagne, surnommée la chanteuse de l’UMP par Alain Juppé, dans le cadre de la création d’un site, il y a également, plus grave encore, l’affaire Kadhafi. Les récents témoignages publiés par Fabrice Arfi et Karl Laske montrent qu’à la frénésie et à la précipitation de l’intervention militaire en Lybie ne semblent correspondre que les sommes colossales que feu le dictateur lybien aurait versées au candidat Sarkozy en 2007 et après. A ce jour la justice ne semble pas animée d’une volonté de rapidité pour demander des explications à ce dernier. Mais il y a plus grave.
Dans l’ensemble des media que l’on peut qualifier d’officiels, comme l’est le journal du même nom, tant ils sont aimables avec le prédécesseur de François Hollande, qu’il s’agisse de la presse écrite, radiodiffusée ou télévisée, personne n’a relayé régulièrement les solides enquêtes de Mediapart. C’est que, dans le petit monde de connivence cité plus haut, on ne saurait faire la moindre peine, même légère, à l’ancien « maître ». Silence dans les rangs, donc. Et non seulement on ne voit pas à l’horizon médiatique la moindre trace de solidarité confraternelle pour appuyer l’information, exiger des explications — pas l’ombre d’un Jeremy Paxman* sur les écrans français — mais à la censure s’ajoute une vaste propagande.
En effet, partout il n’est question que du « retour » du personnage en question. Europe 1 puis Canal + invitent madame Chirac, non pas pour lui demander ce que l’on peut ressentir à avoir passé une vie en profitant très généreusement des deniers publics, mais pour savoir si, par hasard, si, d’aventure, elle sait quelque chose sur la volonté de celui pendant le mandat duquel la droite a perdu toutes les élections, les salariés se sont appauvris et ses amis considérablement enrichis. Ne parlons pas des chaînes d’information en continu, qui sont à l’investigation ce que le hamburger est à la gastronomie, où l’on abandonne momentanément Renaud Lavillenie et Martin Fourcade, dont les exploits nous sont jetés en pâture jusqu’à la nausée, pour se perdre en conjectures sur le possible « retour ». Le microcosme se regarde le nombril jusqu’à en perdre la raison. Ce n’est plus de l’obséquiosité, c’est de la méprisable servilité. La démocratie, qu’Edwy Plenel a justement qualifiée de « basse intensité », continue de couler.
* Jeremy Paxman est journaliste à la BBC depuis 1977. Après avoir été grand reporter pour Panorama, il s'est rendu célèbre, en 1997, dans la cadre de son émission hebdomadaire Newsnight, par l'interview du Home Secretary de l'époque, Michael Howard, que l'on soupçonnait de vouloir limoger le directeur des prisons, Derek Lewis. Interview pendant laquelle Paxman demanda à Howard, 14 fois s'il allait limoger Lewis.