Le Scott Trust, qui dirige le Guardian Media Group, a pris une décision marquante, hier vendredi 20 mars 2015. Pour succéder au brillant et courageux Alan Rusbridger, qui dirigeait, depuis 1995, la rédaction du quotidien britannique The Guardian et de sa Sunday sister, selon la terminologie du groupe, The Observer, le Trust a nommé au poste de rédactrice-en-chef Katharine Viner, qui était l’adjointe de Rusbridger depuis 2008. Cette nomination est, en elle-même, une petite révolution car elle porte trois symboles de taille. Tout d’abord, Katharine Viner est jeune, 44 ans. Ensuite c’est la première fois qu’une femme accède à la direction du journal depuis sa création en 1821, une grande première donc en 194 ans. Enfin — et la valeur du symbole n’est pas mince dans l’establishment de la presse britannique —, Katharine Viner, fille d’un couple d’enseignants, est issue de l’enseignement public britannique, ce qui n’était plus arrivé à ce niveau de responsabilité du quotidien depuis 1956. Avant ses études supérieures à Oxford, Katharine Viner a fait ses études secondaires à la Ripon Grammar School dans le North Yorkshire.
Lors d’un vote interne aux deux rédactions qui a eu lieu le 5 mars, Katharine Viner a été adoubée par plus de 53% de ses collègues. Dans la liste restreinte des candidats, Katharine Viner a reçu 438 voix contre Emily Bell, journaliste sur le site du Guardian, 188 voix ; Janine Gibson, rédactrice du guardian.com, 175 voix ; et, l’inattendu de la short list, Wolfgang Blau, responsable de la stratégie digitale au sein du groupe Guardian, 29 voix. Sa nomination a été saluée avec enthousiasme par la rédaction et par son prédécesseur, Alan Rusbridger : ‘She will bring immense experience, flair, warmth, imagination and formidable energy to her new role’, ce qui signifie : elle apportera son immense expérience, son don naturel, sa chaleureuse présence et sa formidable énergie à ses nouvelles fonctions.
Alan Rusbridger, qui peut s’enorgueillir d’un bilan exceptionnel, fait, notamment, de la publication, contre vents et marées — il a résisté avec le flegme d’un authentique gentleman aux insupportables pressions du pouvoir conservateur —, des révélations d’Edward Snowden et de l’attribution à la rédaction du Prix Pulitzer, va prendre sa retraite en juillet et prendra la direction du Scott Trust, au début de l’année 2016, lorsque le mandat de l’actuelle présidente, Liz Forgan, prendra fin.