Chacun sait que les exigences de rapidité et de concision de l’information parlée, qu’elle soit radiophonique ou télévisée, ne sont pas toujours aisément compatibles avec la clarté de l’énonciation et avec les figures de style. Ainsi, dimanche 23 juin dans le journal de 9h de France-Info, à propos de la situation au Brésil, la journaliste, qui était à l’antenne, chargée de la présentation du bulletin, a lancé cette phrase mystérieuse : « les manifestants n’ont pas entendu la main tendue de la présidente brésilienne. » On ne sait si on est dans l’épenthèse, la catachrèse ou dans l’oxymore métaphorique ou une violente collision des trois, mais, même en accordant le bénéfice du doute à cette assertion pour considérer que « entendre » est pris comme synonyme de « comprendre », cette phrase est à ranger dans la catégorie du mystère inepte.
Certes on aurait pu admettre que les manifestants n’ont pas saisi la main tendue par la présidente brésilienne ou qu’ils n’ont pas entendu l’appel de la même présidente, mais entendre une main qui se tend semble soit voué à l’échec, à moins d’avoir une affection profonde pour le langage des signes, soit révélateur d’un certain désordre. Reste que les manifestations de la jeunesse brésilienne sont loin d’être terminées et il reste à espérer qu’il n’y aura pas une étincelle qui ferait déborder le vase ou une goutte d’eau qui mettrait le feu aux poudres. De toute façon la présidente brésilienne pourra toujours attendre le moment venu pour ne rien décider...