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Billet de blog 26 mars 2010

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Des menaces de mort et des briques contre des élus démocrates

Aux Etats-Unis, alors que le Sénat vient de voter, dans la douleur, la loi historique d’accès aux soins et à la protection sociale pour 32 millions d’Américains les plus défavorisés, et alors que le président Barack Obama s’apprête à promulguer cette même loi, une fois que la chambre des représentants aura revoté, les obscurantistes se sont déchainés pendant ces dernières quarante-huit heures.

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Aux Etats-Unis, alors que le Sénat vient de voter, dans la douleur, la loi historique d’accès aux soins et à la protection sociale pour 32 millions d’Américains les plus défavorisés, et alors que le président Barack Obama s’apprête à promulguer cette même loi, une fois que la chambre des représentants aura revoté, les obscurantistes se sont déchainés pendant ces dernières quarante-huit heures. Certains élus démocrates, une douzaine au total, des deux chambres ont été l’objet d’invectives, d’insultes, de menaces directes et indirectes. Une brique a même été lancée sur la vitrine du siège du parti démocrate de Rochester, dans l’état de New York, avec cette inscription anonyme éloquente : Extremism in defense of liberty is no vice, ce qui signifie « l’extrémisme n’est pas un vice quand il défend la liberté ».

Etrangement, le New York Times, d’ordinaire avisé et à la pointe de l’information, n’en a absolument pas parlé, ni en « une », ni en pages intérieures. On se souvient que la tragique disparition de Juanita Goggins, brillante militante et élue noire, n’avait pas passionné non plus la rédaction. Le quotidien britannique The Guardian a considéré les faits comme légitimement graves pour en faire une de ses manchettes de « une », le 25 mars. Mais c’est dans le journal télévisé coast-to-coast de Katie Couric sur CBS News, le 24 mars à 18h, que ces violences effarantes ont été détaillées de façon complète.

Comme l’a fort justement rappelé la journaliste présentatrice du jour, Mary Rodriguez, il s’agit d’une minorité, mais cette même minorité a manifesté son opposition in a very ugly way. Voici un florilège des horreurs, toujours anonymes bien sûr, lancées au téléphone à l’attention de plusieurs élus démocrates. A Bart Stupak, sénateur du Michigan, une voix féminine annonce : you will rue the day you did this, Mr. Stupak, vous maudirez le jour où vous avez fait cela, Mr.Stupak. Ou bien encore, à l’adresse du même : I hope you die, qu’il n’est pas nécessaire de traduire ; there are millions of people across the country who wish you ill, il y a des millions de gens dans ce pays qui vous veulent du mal.

Louise Schweitzer, élue démocrate de l’Iowa, a reçu la promesse téléphonique de « tuer tous les enfants des salauds de démocrates qui ont fait ça ». Gabrielle Giffords, représentante d’Arizona, fait partie de celles et ceux dont les vitres des permanences ont été brisées à coup de briques. Mais la parole avait été libérée d’en haut, pour ainsi dire, pour permettre aux obscurantistes de laisser libre cours à leur haine, puisque le sénateur républicain Randy Noggen Hurst a interrompu le sénateur Stupak qui annonçait sa volonté de voter cette avancée historique, par cette insulte très révélatrice baby killer!, qui montre que les adversaires du droit à l’avortement se sont engouffrés, sans état-d’âme, dans le sillage des opposants à la protection santé.

James Clyburn, représentant démocrate pour la Caroline du Sud, assure, devant les caméras et micros de CBS, qu’il n’a jamais vu autant de haine depuis les années1960, période qui vit la mort violente de John Kennedy, Martin Luther King et Robert Kennedy. Dans cet épouvantable tableau, il ne manquait que l’inénarrable Sarah Palin, dont le quotient intellectuel en ferait une candidate idéale pour les émissions de télé-réalité, qui s’est fendue, à l’attention des ennemis de la solidarité et du partage, d’un très violent et très ambigu Reload!, ce que l’on peut traduire, dans le meilleur des cas par« reprenez des forces », et, dans le pire, ce qui semble être le cas, « Rechargez ! », sous-entendu vos armes.

D’autres encore ont suggéré aux adversaires de la loi sur la santé to drop by, c’est-à-dire, de rendre une petite visite, certainement peu amicale, à tous les démocrates qui ont voté. La situation a été jugée suffisamment inquiétante par le FBI pour mettre tous les élus démocrates – et républicains qui ont voté semblablement – sous surveillance étroite. On notera que le sénateur républicain John McCain, présenté comme un élu modéré par des âmes sensibles qui avaient, sans doute oublié, qu’il prit Sarah Palin comme co-listière, a déclaré au Sénat : You can put lipstick on a pig, it is still a pig!, on peut mettre du rouge à lèvres à un cochon, ça reste un cochon.

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